Le 10 juillet 2013, la Commission européenne a présenté ses propositions visant à mettre en place un mécanisme de résolution unique (MRU), élément attendu qui doit venir compléter l’architecture de l’union bancaire qui est en train d’être bâtie pierre à pierre.
Ce mécanisme doit en effet venir aux côtés du mécanisme de surveillance unique (MSU) qui pourrait être opérationnel d’ici fin 2014 et dans le cadre duquel la BCE sera chargée de la supervision bancaire dans la zone euro et dans les Etats membres de l’UE qui décideront de rejoindre l’union bancaire.
Si le MSU représente le volet préventif de l’Union bancaire, avec les nouvelles règles prudentielles offertes par le CRD IV / CRR, le MRU offrira lui les outils et les moyens d’une réparation organisée et préparée. Le principe est simple : dans le cas où une banque relevant du MSU serait confrontée à de graves difficultés, le mécanisme de résolution unique permettrait, sans préjudice d’une supervision plus stricte, de procéder efficacement à sa résolution de manière à en minimiser le coût pour le contribuable et pour l’économie réelle.
Cette proposition vient compléter la directive sur les fonds de résolution au sujet de laquelle les ministres des Finances de l’UE sont tout juste parvenus à s’entendre en vue de l’ouverture de négociations avec le Parlement européen. Un accord en trilogue est escompté pour la fin de l’année 2013.
L’objectif du MRU rejoint celui de ce projet de directive, dont il va appliquer les règles de fond dans l’union bancaire, à savoir faire en sorte qu’en cas de défaillances bancaires, "les banques elles-mêmes, et non le contribuable européen, assumeraient à l’avenir les pertes subies".
Quant aux principes qui président à sa conception, Michel Barnier les a ainsi résumés : "Nous avons besoin d’un système permettant de prendre des décisions rapidement et efficacement, sans qu’il y ait de doutes quant à l'impact sur les finances publiques, et avec des règles apportant une sécurité au marché.(…) En faisant en sorte que la supervision et la résolution soient alignées à un niveau central, tout en faisant intervenir tous les acteurs nationaux concernés, et qu’elles s’appuient sur un dispositif approprié de financement des procédures de résolution, ce mécanisme permettra de gérer plus efficacement les crises bancaires au sein de l'union bancaire et contribuera à briser le cercle vicieux entre crise des dettes souveraines et défaillances de banques".
La BCE, en tant qu’autorité de supervision, signalerait si une banque dans la zone euro, ou établie dans un État membre participant à l’union bancaire, se trouvait en grave difficulté financière nécessitant de procéder à sa résolution.
Un Conseil de résolution unique, composé de représentants de la BCE, de la Commission européenne et des autorités nationales concernées (les autorités des États dans lesquels se situent le siège de la banque, ses succursales et/ou ses filiales), préparerait la résolution de la banque. Il serait doté de vastes pouvoirs lui permettant d’analyser et de définir l’approche à adopter pour la résolution d’une banque: quels instruments utiliser et quelle intervention du Fonds de résolution européen. Les autorités nationales de résolution seraient étroitement associées à ce travail. Comme l’a précisé Michel Barnier lorsqu’il a présenté sa proposition à la presse, ce conseil de résolution serait géré comme une agence et fonctionnerait au départ avec une équipe de 300 personnes. L’agence aura pour fonction de contrôler les plans de résolution que les banques de la zone euro devront préparer et quand il y a une résolution à mettre en œuvre, c’est ce conseil qui préparera les décisions. Il le fera naturellement sur l’alerte et la demande du superviseur, la BCE.
Sur la base des recommandations du Conseil de résolution unique, ou de sa propre initiative, la Commission déciderait alors si la banque doit être soumise ou non à une procédure de résolution, et à quel moment, et mettrait en place un cadre pour l’utilisation des instruments de résolution et du Fonds. Pour des motifs juridiques, la décision finale ne pourrait appartenir au Conseil de résolution unique.
Sous la supervision du Conseil de résolution unique, les autorités nationales de résolution seraient chargées de l’exécution du plan de résolution.
Le Conseil de résolution unique superviserait la résolution. Il surveillerait l’exécution au niveau national par les autorités nationales de résolution et, dans le cas où une autorité nationale de résolution ne se conformerait pas à ses décisions, il pourrait adresser des ordres exécutoires directement aux banques en difficulté.
Un Fonds de résolution bancaire unique serait mis en place sous le contrôle du Conseil de résolution unique pour garantir qu’un soutien financier à moyen terme soit disponible pendant la restructuration de la banque. Il serait approvisionné par des contributions du secteur bancaire, remplaçant les fonds de résolution nationaux des États membres de la zone euro et des États membres participants à l'union bancaire, comme le prévoit le projet de directive sur le redressement et la résolution bancaires. L’idée de la Commission est que ce fond européen montera en puissance progressivement sur une dizaine d’années, comme l’a précisé Michel Barnier.
Le rôle de la Commission serait limité à la décision de déclencher la résolution d’une banque et à la décision concernant le cadre de résolution, garantissant ainsi la compatibilité avec le marché unique et avec les règles de l’UE en matière d’aides d’État et préservant l’indépendance et la responsabilité de l’ensemble du mécanisme.
Comme l’a souligné Michel Barnier, cette proposition se base sur un corpus de règles qui sont celles du single rule book et de la directive sur la résolution des banques. Le commissaire, qui ne perd pas de vue son rôle de gardien de l’intégrité et de l’unité du bon fonctionnement du marché unique, a en effet rappelé son attachement au single rule book pour les 28 pays de l’Union européenne. Dans la zone euro, a-t-il expliqué, nous allons appliquer le même single rulebook de manière plus intégrée et plus efficace.
La proposition de la Commission a pour base juridique l’article 114 du Traité, un choix que Michel Barnier a expliqué en soulignant que la stabilité de la zone euro est une des conditions de la stabilité du marché unique et de toute l’UE. Le commissaire a confié avoir discuté les ministres des Finances à ce sujet. On se souvient en effet des doutes exprimés par Wolfgang Schäuble au mois de mai dernier, alors qu’il affirmait que les traités actuels ne permettraient pas de mettre en place un tel mécanisme. Il proposait donc, en attendant de modifier les traités, de procéder par étapes. Michel Barnier, qui assure avoir assuré la sécurité juridique du texte en lui donnant cet article 114 comme base, n’a toutefois pas exclu que le système puisse être précisé, consolidé ultérieurement à la faveur d’une modification du traité.
Lors du Conseil européen des 27 et 28 juin, les dirigeants de l’Union européenne se sont fixé l’objectif de parvenir à un accord sur le mécanisme d’ici à la fin de l’année 2013 afin qu’il puisse être adopté avant la fin de la législature actuelle du Parlement européen en 2014. Il pourrait ainsi être appliqué à partir de janvier 2015, parallèlement à la directive sur le redressement et la résolution bancaires.
En attendant l’entrée en vigueur des règles proposées, les éventuelles crises bancaires continueraient d’être gérées sur la base des régimes nationaux. Ces régimes sont néanmoins appelés à converger de plus en plus vers les principes admis en matière de résolution, à savoir la prise en charge des pertes des banques par les actionnaires et les créanciers plutôt que par le contribuable.
C’est ce que permettent d’atteindre d’une part les lignes directrices révisées concernant les aides d’État accordées aux banques, également adoptées le même jour et qui vont être d’application à compter du 1er août 2013, et d’autre part la possibilité d’une recapitalisation directe des banques par le mécanisme européen de stabilité. Dans les deux cas, un partage de la charge financière par les investisseurs privés de la banque est exigé comme condition à l’octroi d’une aide publique par l’intermédiaire du mécanisme européen de stabilité ou de ressources nationales.
Le mécanisme de résolution unique a été annoncé par la Commission dans ses communications intitulées Feuille de route pour une union bancaire et Projet détaillé pour une Union économique et monétaire véritable et approfondie.
Le Conseil européen, en décembre 2012, a reconnu la nécessité de mettre en place un mécanisme de résolution unique pour accompagner le mécanisme de surveillance unique dans l’union bancaire. En mars 2013, il s’est engagé à finaliser l’union bancaire à travers une série d’étapes et a confirmé que la proposition de la Commission d’instaurer un mécanisme de résolution unique serait examinée en priorité dans l'intention de l'adopter avant la fin de la législature actuelle du Parlement européen en 2014.
Le Parlement européen a prôné à maintes reprises une plus grande intégration des dispositifs de résolution des banques, et dans une résolution adoptée le 13 juin 2013, il a invité la Commission à adopter dans les plus brefs délais ses propositions sur un projet de règlement établissant un mécanisme de résolution unique.