Le 16 décembre 2014, la Commission européenne présentait son programme de travail pour 2015 au Parlement européen. Elle y présentait notamment une liste de propositions législatives qu’elle propose de retirer. Parmi elles, on trouve le projet de règlement sur le matériel de reproduction des végétaux, un texte encadrant la production de semences qui avait été proposé par la Commission en mai 2013 et que le Parlement européen avait rejeté massivement en mars 2014.
Ce texte faisait partie du paquet intitulé "De meilleures règles pour des aliments plus sains" et était destiné à moderniser et remplacer les 12 directives européennes et leurs nombreux actes secondaires régissant le commerce de semences et l’inscription au catalogue européen.
La Commission Juncker explique sa décision par une lettre que lui a adressée le président du Parlement européen, Martin Schulz, en date du 11 septembre dernier. Martin Schulz y demanderait le retrait de ce règlement suite au rejet de la proposition en première lecture.
Ce retrait n’a pour le moment pas fait grand bruit, si ce n’est dans les réseaux spécialisés. Ainsi, le réseau Semences paysannes déplore que la Commission "referme ainsi les quelques ouvertures proposées par son prédécesseur pour tenter d'enrayer l'effroyable érosion actuelle de la biodiversité cultivée". "Le droit des agriculteurs d'échanger leurs semences, le droit des petites entreprises de moins de 2 millions d'euros de chiffre d'affaires de commercialiser toute la diversité disponible sans obligation d'enregistrement au catalogue, ou encore l'ouverture du catalogue à moins de standardisation des semences et donc de notre nourriture, sont renvoyés aux oubliettes", regrette le réseau français.
Semences paysannes s’inquiète aussi du fait qu’en l'absence de nouveau règlement, "les Accords de Libre Échange actuellement négociés avec la Canada (CETA) et les États-Unis (TAFTA / TTIP) risquent d'obliger l'Union Européenne à s'aligner sur la dérèglementation libérale qui a permis dans ces pays aux brevets de deux ou trois multinationales semencières de s'emparer de plus de 90 % des semences agricoles cultivées".
A la veille de l’annonce du retrait de cette proposition, la plateforme luxembourgeois Meng Landwirtschaft avait publié une prise de position appelant à une reformulation complète des projets de règlement européens qui ont trait aux semences.
L’eurodéputé vert Claude Turmes, qui s’était impliqué au Luxembourg et au Parlement européen contre ce projet de règlement, estime que "le retrait pur et simple de la directive comme proposé par la Commission Juncker n’est pas une solution", ainsi qu’il l’a confié à la rédaction d’Europaforum. "Les Verts européens avaient demandé la modification de points essentiels comme par exemple le droit de pouvoir protéger les espèces autochtones historiques comme certains arbres fruitiers ou aussi certaines lignées de légumes", rappelle en effet l’eurodéputé écologiste. "Nous allons nous battre pour que la Commission revienne avec une nouvelle proposition qui tienne compte des revendications des associations qui se battent pour la protection de la biodiversité et contre la dominance des Monsanto et autres", assure-t-il désormais.