Les ministres des Finances des Etats membres de la zone euro étaient réunis exceptionnellement à Riga, la capitale lettonne, le 24 avril 2015, à l’occasion d’une réunion informelle de l'Eurogroupe à l’ordre du jour chargé.
Les ministres ont ainsi notamment fait le point sur la situation de la Grèce, de Chypre et de l’Espagne, ils ont débattu des progrès réalisés dans la mise en place du mécanisme de supervision unique dans le cadre de l’Union bancaire et ils ont tenu un échange de vue sur la mise en œuvre des dernières recommandations par pays dans le cadre du Semestre européen.
Si la Grèce n’était pas le principal sujet à l’ordre du jour de la réunion, c’est bien la situation financière d’Athènes dont les caisses sont quasiment vides qui aura dominé les débats, alors que les ministres des Finances de la zone euro ont exprimé leur inquiétude sur les "progrès limités" dans les discussions engagées avec cet Etat membre.
"Nous avons eu une discussion très difficile" a ainsi reconnu le président de l’Eurogroupe, le ministre néerlandais des Finances, Jeroen Dijsselbloem, sans vouloir détailler davantage lors de la conférence de presse organisée à l’issue de la rencontre. "Comme convenu en février, une liste complète et détaillée des réformes est nécessaire comme base pour une conclure l'examen en cours […] mais nous en sommes encore loin", a-t-il poursuivi, notant que cela "reflète le grand sentiment d'urgence".
Pour rappel, l’accord en question obtenu à l’Eurogroupe du 20 février 2015 donnait le feu vert à une prolongation de quatre mois du programme d’aide à la Grèce en échange de la présentation par le gouvernement grec issu de la gauche radicale d’une liste de réformes précises au plus tard fin avril. Or, si des progrès ont bien été enregistrés avant la réunion, ils ont été jugés insuffisants. "Des discussions intenses ont eu lieu ces dernières semaines. Il y a des signes positifs mais des différences trop grandes à combler", a ainsi souligné Jeroen Dijssebloem.
L’enjeu des discussions est vital pour la Grèce : un accord avec les institutions créancières doit en effet ouvrir la voie au versement au pays de la dernière tranche de 7,2 milliards d'euros bouclant l’aide financière de quelque 240 milliards octroyée depuis 2010. Cela dans un contexte où, comme le souligne l’Agence France Presse (AFP), la Grèce devra s'acquitter le 1er mai 2015 d'un remboursement de 200 millions d'euros, et le 12 mai d'un autre de 750 millions d'euros, avant de devoir verser salaires des fonctionnaires et retraites à la fin du mois.
"Nous sommes tous conscients que le temps presse. Il y a eu trop de temps perdu", a poursuivi Jeroen Dijsselbloem, notant que la responsabilité en incombait "principalement" aux autorités grecques. "Trouver un accord est d'abord et avant tout dans l'intérêt de la Grèce" a encore insisté le président de l’Eurogroupe, qui a par ailleurs exclu tout décaissement partiel, réitérant "qu'un accord global [était] nécessaire avant qu’un déboursement des fonds puisse avoir lieu".
"Nous avons besoin d’un accord global, d’une approche d’ensemble, et nous n’y sommes pas du tout, nous en sommes encore loin, et pour parvenir à cet accord global, il faut des réformes", a de son côté estimé Pierre Moscovici, le commissaire européen en charge des Affaires économiques, lors de la conférence de presse. "Notre message est très clair, il faut accélérer dès aujourd'hui, intensifier les efforts et il n'y a pas d'autre choix pour une Grèce stable et ancrée dans la zone euro", a-t-il poursuivi.
"Nous sommes tous d'accord qu'il faut accélérer", a convenu le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, à l’issue de l’Eurogroupe selon des propos rapportés par l’AFP. Mais selon l’agence, il a décrit à la presse grecque des négociations tournant souvent au dialogue de sourds, la faute selon lui à un "cloisonnement" des discussions. Le ministre grec est par ailleurs davantage entré dans les spécificités des blocages sur la substance, évoquant notamment la réforme des pensions ainsi que le cadre sur les saisies immobilières sur les résidences principales, rapporte l’édition du 25 avril du Bulletin de l’Agence Europe.
Le prochain rendez-vous de l’Eurogroupe sera le 11 mai 2015 à Bruxelles, Jeroen Dijsselbloem n’ayant pas exclu la tenue d’un Eurogroupe extraordinaire en amont, mais uniquement en cas d’évaluation positive des institutions. "Nous n’allons pas nous enfermer pendant des semaines en tant que ministres de l’Eurogroupe pour négocier cet accord. Le travail doit être fait avec les institutions, de manière très rapide, puis l’Eurogroupe pourra prendre une décision politique".
Lors de la réunion de l’Eurogroupe à Riga, les ministres des Finances de la zone euro ont par ailleurs fait le point sur la situation de l’Espagne et de Chypre. Pour ce qui est de l’Espagne, les ministres ont ainsi été informés par la Commission et la BCE sur les principales conclusions de leur troisième mission de surveillance post-programme qui s’est déroulée à la mi-mars.
Dans ce contexte, l’Eurogroupe a salué "les progrès significatifs" accomplis par l'Espagne "tant en termes budgétaires qu’économiques" mais "nous réalisons aussi que la dette et le chômage restent élevés", a souligné Jeroen Dijsselbloem à l’issue de la réunion. "Il y a donc encore clairement des défis importants à venir", a poursuivi le président qui a assuré que l’Eurogroupe était "confiant" dans le fait que l'Espagne maintiendra son bon bilan et respectera ses engagements en vertu du cadre de surveillance.
Concernant Chypre, Jeroen Dijsselbloem s’est félicité de pouvoir "partager de bonnes nouvelles". Le président de l’Eurogroupe a ainsi noté que les ministres avaient été informés que le parlement chypriote avait voté le 17 avril 2015 "pour établir un cadre en matière d’insolvabilité qui permettra également de mettre un terme à la suspension du cadre sur les saisies immobilières". Pour mémoire, lors de sa réunion informelle du 12 septembre 2014, l’Eurogroupe avait gelé la nouvelle tranche d’aide de 436 millions d’euros suite à la tentative des parlementaires chypriotes de réduire les effets de la loi sur les saisies immobilières – demandée par la troïka – pour les personnes à faibles revenus et d’empêcher ainsi des saisies de masse.
Le nouveau cadre adopté, qui devrait entre en application le 6 mai 2015, "est nécessaire pour rétablir la conformité" avec les exigences dans le contexte de la cinquième évaluation du programme d'ajustement macroéconomique pour Chypre, a-t-il poursuivi, se félicitant d’une "étape importante qui remet le programme sur les rails, ce qui permettra aux institutions de revenir à Nicosie pour mener à bien la prochaine évaluation". Par ailleurs, Jeroen Dijsselbloem a souligné "un autre développement important", à savoir la levée des derniers contrôles de capitaux dans l’île le 6 avril. "La libre circulation des capitaux a donc été restaurée".