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Migration et asile - Justice, liberté, sécurité et immigration
Conseil JAI – Le Luxembourg s’oppose à un accord sur le contrôle des armes à feu qui offre trop d’exemptions, tandis que Jean Asselborn appelle une fois de plus les Etats membres à prendre leurs responsabilités en matière de migrations
10-06-2016


Les ministres de l’Union européenne en charge des Affaires intérieures et des Migrations se sont réunis à Luxembourg le 10 juin 2016 pour la deuxième journée du Conseil Justice et Affaires intérieures (JAI).

Les ministres se sont entendus sur la position que le Conseil va défendre dans ses négociations avec le Parlement européen au sujet du projet de directive relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes : un accord rejeté par le Luxembourg qui déplore de trop nombreuses exemptions.

Les ministres en charge des questions migratoires ont pour leur part eu un échange de vues sur la mise en œuvre de la déclaration UE-Turquie, sur l'évolution de la situation en Méditerranée centrale, ainsi que sur la situation générale des réfugiés et des migrants. "Nous voyons que peu-à-peu, les relocalisations et les réinstallations s’accélèrent, et il faut donc veiller à continuer sur la bonne lancée", a déclaré Jean Asselborn avant d’appeler une fois de plus chacun à "prendre ses responsabilités".  Le ministre juge en effet "intenable que certains Etats-membres refusent de procéder à des relocalisations de réfugiés, sous prétexte de raisons sécuritaires."

Les ministres s’entendent sur la position du Conseil au sujet du projet de directive relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes : un accord rejeté par le Luxembourg qui déplore de trop nombreuses exemptions

Les ministres se sont notamment entendus sur la position que le Conseil va défendre dans ses négociations avec le Parlement européen au sujet du projet de directive relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes. Cette directive a été proposée par la Commission européenne dans la foulée des attentats qui ont frappé Paris en novembre 2015 dans l’objectif de renforcer le contrôle des armes à feu au sein de l’Union européenne. Le Parlement européen doit encore adopter sa position avant que les négociations en trilogue puissent commencer.

Les débats ont toutefois été vifs au Conseil. Et si Ard Van Der Steur, ministre néerlandais qui présidait le Conseil, s’est félicité d’être parvenu à "un équilibre juste et équitable entre un marché intérieur des armes autorisées et un renforcement de la sécurité des citoyens", la position adoptée n’a pas suscité l’enthousiasme de toutes les délégations. Plusieurs d’entre elles se sont opposées à un texte jugé trop restrictif, quand un certain nombre de pays plutôt en faveur d’un texte strict se sont finalement rangés derrière l’approche générale dégagée qui, selon le commissaire Dimitris Avramopoulos, aurait pu être plus ambitieuse.

Felix Braz et Wolfgang Sobotka au Conseil JAI le 10 juin 2016 (c) Union européenne / Le Conseil de l'UELe Luxembourg, qui était représenté pour cette discussion et ce vote par son ministre de la Justice, Félix Braz, s’est pour sa part opposé à un texte qui prévoit de nombreuses exemptions.

Selon l'orientation générale arrêtée, les tireurs sportifs pourront détenir des armes semi-automatiques et des chargeurs, même si ce sera dans un cadre restrictif. Les tireurs devront en effet satisfaire au préalable à une évaluation médicale et psychologique. Enfin, ils devront prouver qu'ils participent à des compétitions reconnues par les organisations de tir officielles nationales ou internationales.

Pour Félix Braz, cité par le Tageblatt et le Luxemburger Wort datés du 11 juin 2016, ces exemptions affaiblissent la proposition initiale et éloignent cette orientation générale de l’objectif de la réforme qui consiste à introduire des règles uniformes dans tous les Etats membres. "D’un côté, on veut renforcer la loi, et de l’autre on ouvre la porte aux exceptions", a ainsi confié le ministre au journaliste Diego Velasquez du Luxemburger Wort qui estime que "la réponse cohérente au terrorisme" qu’était censée apporter cette directive sera "difficile" avec un tel texte. Le Luxembourg, qui a fait le choix de voter contre l’approche générale en plaidant pour une approche plus restrictive a voulu ce faisant "envoyer un message au Parleent européen", qui doit encore adopter sa position, et montrer que tous les pays ne soutiennent pas de telles exceptions. Pour autant, le ministre a montré peu d’espoir quant à une révision plus ambitieuse du texte au cours des négociations avec le Parlement européen.

Les ministres de l’Intérieur ont par ailleurs adopté une feuille de route pour améliorer le partage d’informations dans le cadre de la lutte anti-terroriste de façon à renforcer l'échange d'informations entre leurs services et sur l'interopérabilité des systèmes d'information. Cette feuille de route recense 50 actions destinées à améliorer la gestion et l'échange d'informations entre les 28. L'objectif est de soutenir les enquêtes en cours et de fournir rapidement ces informations aux professionnels sur le terrain comme les policiers, les gardes-frontières ou les procureurs.

Les ministres ont aussi débattu de l'alimentation des bases de données européennes comme le Système d'Information Schengen, alors que des lacunes avaient été pointées du doigt dans la foulée des attentats de 2014 à Bruxelles au Musée Juif ou de janvier 2015 à Paris. Selon le ministre néerlandais à la Sécurité et à la Justice, Ard Van Der Steur, les États membres ont considérablement amélioré leurs pratiques. Au cours des derniers mois, ils auraient en effet "doublé ou triplé" le nombre d'informations partagées avec ces bases de données, a-t-il indiqué.

Un groupe de travail sur le contre-terrorisme a également été mis en place. Cette plateforme regroupe 30 pays avec la Norvège et la Suisse

Jean Asselborn : "Nous voyons que peu-à-peu, les relocalisations et les réinstallations s’accélèrent, et il faut donc veiller à continuer sur la bonne lancée"

Jean Asselborn au Conseil JAI le 10 juin 2016 (c) Union européenne : Le Conseil de l'UELes ministres en charge des questions migratoires ont pour leur part eu un échange de vues sur la mise en œuvre de la déclaration UE-Turquie, sur l'évolution de la situation en Méditerranée centrale, ainsi que sur la situation générale des réfugiés et des migrants, rapporte un communiqué de presse diffusé par le ministère des Affaires étrangères et européennes du Luxembourg.

Le ministre a luxembourgeois de l’Immigration, Jean Asselborn, a déploré que le rythme des relocalisations de réfugiés à partir de l’Italie et de la Grèce, ainsi que celui des réinstallations de réfugiés syriens en provenance de la Turquie, soit toujours insuffisant. "Nous voyons que peu-à-peu, les relocalisations et les réinstallations s’accélèrent, et il faut donc veiller à continuer sur la bonne lancée", a-t-il toutefois déclaré avant d’appeler une fois de plus chacun à "prendre ses responsabilités".  Le ministre juge en effet "intenable que certains Etats-membres refusent de procéder à des relocalisations de réfugiés, sous prétexte de raisons sécuritaires."

En ce qui concerne le nouveau cadre pour les partenariats de migration avec les pays tiers, qui a été présenté par la Commission européenne le 7 juin 2016, Jean Asselborn s’est dit satisfait de la teneur générale du texte : "Il s’agit d’attaquer les origines de certains flux migratoires en Afrique à leur racines." Cependant, le ministre a également soulevé que certains éléments du paquet sont en contradiction avec la politique de coopération au développement du gouvernement luxembourgeois. "Le Luxembourg s’oppose à une approche less for less en matière de coopération au développement",  a insisté le ministre selon qui "il faut rester fidèle à l’esprit de La Valette, qui avait su trouver le bon équilibre, et travailler avec les pays qui sont prêts à coopérer".

La libéralisation des visas reste en débat

Le Conseil JAI a également débattu de la libéralisation du régime des visas, notamment en ce qui concerne la Géorgie, l’Ukraine, le Kosovo et la Turquie.

Si la Commission estime que la Géorgie remplit tous les critères demandés, les Etats membres ne sont pas parvenus à s’entendre sur un mandat visant à entamer les négociations avec le Parlement européen à ce sujet. La réticence de certains Etats membres, parmi lesquels l’Agence Europe cite l’Allemagne, la France ou encore l’Italie, fait face au mécontentement d’autres pays, comme la Lettonie, l'Estonie, la Lituanie, la Roumanie et la Bulgarie, qui espèrent au contraire qu’un mandat sera approuvé au plus vite. Jean Asselborn a estimé à ce sujet que ces différends pourraient être résolus d’ici la fin de l’année, sous présidence slovaque.

En ce qui concerne la Turquie, Klaas Dijkhoff, secrétaire d’Etat néerlandais qui présidait le Conseil au moment de cette discussion, a rappelé que la Turquie remplit actuellement 65 des 72 critères. Si elle remplit les sept critères restant d'ici au 1er juillet prochain, alors une discussion entre les États membres sur la décision de lui accorder ce régime pourra avoir lieu. Aucune décision ne sera rendue "aussi longtemps que les critères ne sont pas remplis", a-t-il toutefois souligné. Jean Asselborn a pour sa part expliqué au journaliste Guy Kemp du Tageblatt qu’il faudrait vraisemblablement attendre l’automne pour qu’une décision puisse être prise. C’est essentiellement la réforme de la loi antiterroriste exigée par l’UE qui pose problème, a-t-il rappelé en indiquant que "n’est pas terroriste celui qui dit son opinion".