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La gouvernance économique européenne au centre d’un débat d’orientation à la Chambre
Les forces politiques sont d’accord pour une coordination des politiques économiques, mais aussi pour accentuer la dimension sociale de l’UE
08-03-2011


Débat d’orientation à la Chambre des députés sur la gouvernance économique le 8 mars 2011, à quelques jours du sommet informel de la zone euro. Au programme de ce dernier, un accord qui devrait permettre une convergence renforcée des économies des Etats membres de l’Union économique et monétaire.

Le concept de "compétitivité", qui est devenu central dans le débat européen, "vaut une discussion politique", estime le socialiste Lucien Lux

Lucien Lux intervenant à la Chambre le 8 mars 2011 Source : ChamberTVC’est Lucien Lux, le chef de file du groupe politique socialiste qui a lancé le débat.

Vers où se dirige l’UE ? La zone euro risque-t-elle de se désagréger ? L’UE risque-t-elle d’être réduite à une simple zone de libre échange ? Vers quel modèle social va-t-on dans l’UE ? Qui décidera ? Les Etats membres sont-ils toujours égaux ? Où en est-on avec la méthode communautaire qui régresse dans les prises de décisions et qui garantit aux petits Etats membres d’avoir voix au chapitre et à la Commission d’avoir le monopole de l’initiative et au Parlement européen d’avoir plus d’influence ? Ou va-t-on vers un directoire franco-allemand ?

Lucien Lux est allé jusqu’à citer le texte du 3 mars 2011 du chef de file des libéraux au Parlement européen, Guy Verhofstadt qui met en garde contre ces évolutions. Pour Lucien Lux, l’UE est devenu le terrain de luttes d’influence, par exemple entre capitalisme rhénan et capitalisme de Manchester, entre une idée d’Etat-providence qui ne s’oppose pas à l’évolution économique et la régression sociale. Or, met en garde Lucien Lux, l’UE est en train de se fabriquer un problème de crédibilité, car les citoyens veulent une dimension sociale de l’UE. 

Passant en revue les éléments d’un pacte de compétitivité franco-allemand revu par le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, et le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy - un texte dont le Premier ministre Juncker dira à la fin des débats qu’il s’agit d’un papier "qui n’existe pas mais qui est seulement cité par la presse" - Lucien Lux a déclaré que les socialistes sont d’accord avec le principe d’objectifs communs en politique économique et financière, et avec une coordination accrue des économies de la zone euro, à condition que les Etats décident eux-mêmes du chemin qu’ils prendront pour les atteindre. Lucien Lux rejette en tout cas une pensée unique qui ne mise que sur la réduction des salaires, la flexibilisation du marché du travail et la libéralisation à tout crin.

Le concept de "compétitivité", qui est devenu central dans le débat européen, "vaut une discussion politique", pense Lucien Lux. Mais faut-il seulement se référer à des facteurs monétaires, ou ne faudrait-il pas inclure dans la définition de ce qu’est la compétitivité celle donnée par le Conseil économique et social (CES) ? Celle-ci inclut aussi des aspects qualitatifs comme par exemple la stabilité politique et sociale, la qualité de vie, la bonne administration et les infrastructures. Vu sous cet angle, le Luxembourg ne s’en sort pas si mal dans les index internationaux auxquels les investisseurs font référence, selon Lucien Lux.

Abordant les 6 mesures proposées par la France et l’Allemagne - l’abolition de l’indexation des salaires sur l’inflation, la reconnaissance mutuelle des diplômes pour faciliter la mobilité des travailleurs en Europe, la prévision d’un taux minimum d’impôt sur les sociétés, l’ajustement des systèmes de retraites sur le développement de la démographie, l’obligation pour les Etats membres d’inscrire dans leur constitution une "règle d’or" sur le respect des règles budgétaires européennes et l’établissement d’un régime national de gestion de crises à destination des banques – Lucien lux a fait un certain nombre de remarques. Dans la mouture Barroso - Van Rompuy du pacte de compétitivité, l’abolition de l’indexation des salaires a disparu, ce qu’il salue, mais aussi la reconnaissance mutuelle des diplômes, ce qu’il ne comprend pas. Il a exprimé son accord avec un renforcement du pacte de stabilité et avec une modération salariale pondérée. Il a en revanche mis en garde contre une inflation de taxes directes, qui ne sont pas basées sur la progressivité, et plaidé pour un maintien d’une TVA au niveau le plus bas permis au sein de l’UE. Quant à la réforme des systèmes de pension, il pense que le Luxembourg n’a pas eu besoin du pacte de compétitivité pour réformer ses systèmes. Pas question non plus d’inscrire la clause de limitation de la dette publique dans la Constitution. Par ailleurs, le Luxembourg s’est déjà engagé depuis 2008 sur le chemin d’un régime national de gestion de crises à destination des banques. Qui protège notamment les avoirs des épargnants. Une assiette commune d’imposition des entreprises dans l’UE n’est pas non plus acceptable pour le chef de file des socialistes qui a s’est demandé dans quel cadre légal le pacte de compétitivité s’insérerait.

Si les dirigeants de la zone euro font montre de leurs discordes, les marchés financiers se jetteront sur l’euro, met en garde Lucien Thiel, le nouveau chef du groupe politique CSV

Le nouveau président du groupe politique chrétien-social, Lucien Thiel fut le second orateur.

Lucien Thiel intervenant à la Chambre le 8 mars 2011. Source : ChamberTVPour lui, le mécanisme de stabilité financière ne suffira pas pour maîtriser la crise qu’il faudra prendre à la racine. Et seules deux des propositions franco-allemandes sont évidentes : l’unification des systèmes de formation professionnelle et la mise en place d’un système de stabilisation du secteur financier.

Mais les autres propositions sont, selon Lucien Thiel, loin d’être évidentes. Pourquoi inscrire la limitation du déficit budgétaire et de la dette publique dans la Constitution alors qu’on y travaille au Luxembourg ? Pourquoi abolir l’indexation des salaires ? Ne vaudrait-il pas mieux prendre en compte la productivité et le temps de travail fourni par les salariés ? L’imposition des entreprises n’est pas un problème au Luxembourg, mais plutôt dans les pays où le fisc a la main lourde. Les systèmes de pensions sont en train d’être revus dans un pays où la moyenne d’âge de départ à la retraite est de 61 ans. Aller d’emblée vers un départ à 67 ans n’est pas la solution. Il faudra augmenter le taux d’activité des anciens et accorder montant des pensions et prestation d’années de travail. D’ailleurs, la revendication d’un départ à la retraite à 67 ans ne figurerait plus selon Lucien Thiel dans le papier révisé du pacte de compétitivité, ni non plus l’exigence d’amender les constitutions des Etats membres sur la question de la discipline budgétaire. 

Dernière remarque de Lucien Thiel : Y aura-t-il de nouvelles attaques contre l’euro par les marchés financiers ? Oui, si les dirigeants de la zone euro font montre de leurs discordes. Dans ce cas, les marchés financiers se jetteront sur l’euro, car ce sont "des marchés que la politique ne domine pas".

Le libéral Claude Meisch a plaidé le retour à la méthode communautaire, à l’instar de son collègue eurodéputé Charles Goerens

Claude Meisch, au nom du groupe politique libéral, a mis en exergue les faiblesses d’une gouvernance économique de l’UEM qui est elle-aussi pour lui une "communauté de destin". Ceux qui ont la même monnaie ont aussi besoin de politiques communes. D’un côté, les menaces de sanctions proférées dans le cadre du pacte de stabilité ont été vaines, car jamais appliquées. D’autre part, les indicateurs considérés alors et maintenant ne rendent pas compte de toute une économie.

Claude Meisch Intervenant à la Chambre le 8 mars 2011. Source ChamberTVComme l’eurodéputé libéral Charles Goerens quelques jours auparavant, Claude Meisch a souligné la nécessité de réformes au Luxembourg comme en Europe, le retour à la méthode communautaire "qui a fait grandir l’Europe et donne une voix à tout Etat membre", alors que la méthode intergouvernementale montre à tout bout de champ ses faiblesses. Le député libéral a proposé que le futur gouvernement économique de l’UE s’insère dans les institutions actuelles et qu’il soit composé des commissaires européens compétents, et que le Parlement européen s’occupe de manière intense de la question. Il a rappelé que les dix pistes de la Commission européenne pour la stabilisation macro-économique formulées dans le cadre de l’examen annuel de croissance * n’ont pas toutes le soutien de la DP. Pour lui, tout ce qui est actuellement proposé ne sera pas dans les conclusions du sommet.

Mais comment transformer ces pistes en politique nationale ? Selon Claude Meisch, il faudra repenser la politique des subventions, adapter le système d’indexation des salaires en modulant l’impact des prix de l’énergie, miser sur plus de formation continue, plus de soutien aux personnes à la recherche d’un emploi et une plus grande sélectivité sociale dans les prestations sociales, finalement favoriser la R&D.

"Une Europe à l’image de l’Allemagne ne peut pas fonctionner", estime François Bausch des Verts qui juge "antisociale" l’orientation de la proposition Merkel-Sarkoy

Pour l’intervenant qui s’exprimait au nom des Verts, François Bausch, deux  éléments dominent le débat depuis la proposition Merkel-Sarkozy. : la compétitivité et le désendettement. Pourquoi donne-t-on tant d’importance à la compétitivité, pourquoi faut-il l’améliorer et pourquoi se serait-elle dégradée, s’interroge François Bausch. Pour que les boni des dirigeants d’entreprises augmentent ? Pour que les super-riches deviennent encore plus riches ? L’action économique n’est pas un but en soi, mais devrait servir l’intérêt général. La compétitivité sert-elle à lutter contre la pauvreté ou le changement climatique ou à augmenter la prospérité ? "Non !", répond François Bausch à ces questions. 

Pourquoi faut-il plus de convergence économique en UE, veut-il également savoir. Ne faudrait-il pas plutôt soutenir les efforts des pays économiquement plus faibles et ne pas les tirer vers le bas avec certains critères de convergence, comme cela se fait actuellement selon lui. On parle ensuite de compétitivité-prix. Mais qu’est-ce qui fait le prix ? Les frais. Mais les frais, ce ne sont pas seulement les salaires, dont tous parlent, mais aussi le coût du capital et le prix des ressources qui pose de plus en plus de problèmes.

François Bausch intervenant à la Chambre le 8 mars 2011. Source ChamberTVPourquoi y-a-t-il tellement de divergences en UE, demande encore François Bausch, notamment quand on regarde l’Allemagne. Il est d’accord pour qu’un Etat gère ses finances de manière efficace et évite le surendettement. Mais d’où vient la dette excessive ?  Elle surgit là où l’on a réduit les impôts pour augmenter la compétitivité d’abord, puis des programmes de relance conjoncturelle coûteux qu’il a fallu mobiliser comme antidote à la crise. Pour François Bausch, ce constat a pour conséquence qu’il faut, avant d’aborder la question du désendettement, aborder en premier lieu la question de ce que doivent être les dépenses qui incombent à l’Etat et quelles doivent être ses capacités financières sans que celles-ci ne soient entamées par une crise qui les déséquilibrerait au moindre écueil.

L’Allemagne n’est en tout cas pas un exemple à suivre pour le chef de file des Verts. La précarité y a augmenté, en termes proportionnels, c’est un des pays où il y a eu le moins de créations d’emploi. 10 % des emplois sont de mini-jobs à 400 euros par mois, ce qui constitue une lourde charge pour les systèmes de sécurité sociale. 5 millions de personnes gagnent moins de 5 euros par heure. "Une Europe à l’image de l’Allemagne ne peut pas fonctionner, mais encouragera les victoires électorales de personnages du type Marine Le Pen", conclut François Bausch qui soumet une motion à la Chambre sur "la gouvernance économique au sein de l'UE et le pacte de convergence et de compétitivité".

Dans cette motion, l’orientation de la proposition Merkel-Sarkoy est qualifiée "d’antisociale", et la proposition Barroso-Van Rompuy renchérit selon les Verts sur les "pressions sur les acquis sociaux". La gouvernance économique et financière de l’Union européenne est qualifiée de "faible" et "incapable" de réagir de façon adéquate à la crise de l’euro. Pour les Verts, il existe un "risque d’une récession économique suite à des politiques d’austérité fiscale et sociale exagérée qui menace à présent les pays sous pression de spéculations financières".

Rappelant les conclusions du Conseil européen du 17 juin 2010 sur la  réduction des émissions de gaz à effet de serre de 20 %, sur le passage à 20 % de la part des sources d'énergie renouvelable dans notre consommation finale d'énergie et sur l’augmentation de 20 % de notre efficacité́ énergétique, sur la réduction aussi du taux de décrochage scolaire à moins de 10 % et d’aller vers 40 % de personnes âgées de 30 à 34 ans ayant obtenu un diplôme de l'enseignement supérieur ou atteint un niveau d'études équivalent, et sur la réduction de la pauvreté́, les Verts invitent le gouvernement "à plaider au niveau européen pour un pacte de solidarité européen qui comporte notamment les mesures fiscales, sociales et politiques suivantes :

au niveau fiscal:

  • une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés;
  • un taux d’impôt minimal à appliquer sur cette assiette consolidée ;
  • l’introduction d’impôts innovants afin de taxer d’avantage les flux spéculatifs de capitaux et la consommation de ressources naturelles et moins le facteur travail ;
  • l’introduction d’Euro-Bonds, non seulement pour faciliter le financement des dépenses publiques, mais plus particulièrement pour financer la transition vers une économie plus durable ;

au niveau social:

  • abandon des programmes d’austérité sociale qui contribuent à renforcer la récession économique ;
  • mise à contribution des créanciers à l’assainissement des dettes publiques ;
  • l’introduction d’un salaire minimum européen harmonisé c’est à dire adapté au niveau de vie des différents pays de l’UE ;
  • la réintégration d’une fiscalité progressive plus prononcée afin de permettre une redistribution effective des revenus vers le bas ;

au niveau politique:

  • débat sur les déséquilibres macro-économiques entre les différents pays de la zone euro afin d’arriver à des politiques ne visant pas unilatéralement les pays à balance commerciale extérieure déficitaire ;
  • meilleure régulation des marchés financiers européens et lutte efficace contre les attaques spéculatives à l’encontre des dettes publiques ;
  • une politique monétaire qui vise à côté de l’inflation également un soutien aux activités économiques vertes et créatrices d’emplois."

"Notre gouvernement ne défend plus les intérêts de notre pays", accuse Fernand Kartheiser (ADR)

Fernand Kartheiser de l’ADR s’en est pris ensuite d‘emblée au "processus d’une brutalité et d’une vitesse inouïe de la mise en œuvre du traité de Lisbonne qui donne raison à ceux qui ont dit  Non en France et aux Pays-Bas en 2005 lors des référendums sur le traité constitutionnels", un traité de Lisbonne qui selon lui "mine chaque jour la souveraineté et l’identité des petits Etats membres".

Fernand Kartheiser intervenant à la Chambre le 8 mars 2011. Source Chamber TVPour Fernand Kartheiser, le traité de Lisbonne ne prévoit pas de gouvernement économique, ni de semestre européen, et la Chambre va perdre dans ce jeu de fait sa souveraineté budgétaire. Faisant allusion au déplacement du Premier ministre à Berlin le 4 mars 2011, il pense que c’est à Berlin que l’on décide dorénavant si le Luxembourg a le droit de garder l’indexation des salaires. Et il accuse : « Notre gouvernement ne défend plus les intérêts de notre pays."

L’évolution de la productivité et de la compétitivité sont des éléments qu’il faudrait évidemment prendre en considération, pense Fernand Kartheiser, et les systèmes de pensions nationaux doivent être rendus plus durables. Il n’est pas non plus contre l’idée qu’il faut arriver à un consensus dans l’UEM, mais cela doit se faire "dans le respect de la souveraineté des Etats membres, y compris de ceux qui ont des problèmes". L’ADR n’a par contre pas de problème avec le désendettement des Etats et avec l’idée d’inscrire dans la Constitution des limites budgétaires. Pour Fernand Karthiser, le CSV est « le parti de l’endettement au niveau national et européen, car les eurobonds sont la voie royale vers un endettement excessif ». L’ADR récuse l’idée de nouveaux impôts pour l’UE. Le parti de droite plaide pour le renversement de la hiérarchie des normes : "Le droit national doit primer sur le droit européen."

Pour Fernand Kartheiser, les idées concernant le dépassement de l’Etat nation et la mise en place d’une souveraineté européenne à travers un budget européen prônées par l’eurodéputé CSV Frank Engel dans une série d'articles sont symptomatiques pour un CSV qui ne défend plus l’intérêt national dans un "gouvernement usé et fatigué". Pour le député ADR, l’UE équivaut à "toujours plus de déconstruction sociale".

André Hoffmann : Le problème central de l’UE, c’est la dérégularisation

André Hoffmann devant la Chambre le 8 mars 2011. Source : ChamberTVPour le député de la Gauche, André Hoffmann, la croissance et la compétitivité sont au centre du débat européen. Croissance pour qui et pourquoi ? Pourquoi une compétitivité qui "conduit à un cercle vicieux anti-social en dopant la concurrence dérégularisée".. Le problème central de l’UE, c’est pour lui la dérégularisation. Même dans la compétition sportive, il y a des règles. Il faut à l’Europe un système de règles sociales, une gouvernance économique, mais dans le sens de gouvernance sociale.

40 questions restent à résoudre en relation avec la stabilisation macro-économique, et il faut la codécision avec Parlement européen, a rappelé Jean-Claude Juncker

Le Premier ministre Jean-Claude Juncker a répondu à la fin du débat d’orientation aux députés. Il a souligné l’urgence qu’un accord soit trouvé au sein de l’UEM d’ici la fin du moins de mars 2011. Il y a les propositions de la Commission, qui doivent être transformées en législation européenne, notamment en ce qui concerne le pacte de stabilité, les sanctions automatiques et le principe d’une majorité qualifiée renversée qui protège les intérêts des petits Etats membres. Il y a la consolidation de l’EFSF à 440 milliards d’euros et la mise en place du mécanisme de crise permanent, dont les moyens restent à définir, comme il faut encore décider sur quels marchés il pourra intervenir. Autre question : le prix de l’aide à l’Irlande et à la Grèce. 40 questions restent à résoudre en relation avec la stabilisation macro-économique, et il faut la codécision avec Parlement européen.

Le Premier ministre répondant aux députés à l'issue du débat d'orientation du 8 mars 2011 Source : ChamberTVDans ce cadre, le pacte de compétitivité proposé a "créé beaucoup de confusion", même s’il s’agit en fait de définir des règles de convergence de la zone euro. Pour Le Premier ministre, le Luxembourg fait partie d’une zone monétaire de 17 pays "dans laquelle nous ne pouvons faire ce que nous voulons". Il est pour une politique de coordination économique, mais aussi pour un socle commun social. Il est pour le principe d’un salaire minimum dans tous les Etats membres. Contrairement à ce que Fernand Kartheiser a pu avancer, la coordination économique est déjà inscrite dans les traités européens depuis le traité de Maastricht du début des années 90. Le renforcement de la coordination des politiques économiques a été décidé dès le Conseil européen de novembre 1997. Si le pacte de compétitivité initié par la France et l’Allemagne "est un papier qui n’existe pas mais qui est seulement cité par presse", il n’empêche que de nouvelles réflexions sur la convergence de la zone euro sont menées, mais il faut "faire entrer ces mesures dans les instruments existants".

Le gouvernement luxembourgeois a rejeté certaines propositions du pacte de compétitivité "sans beaucoup demander", comme l’abolition de l’indexation des salaires. Reste qu’il est dangereux pour l’UEM que les taux d’inflation en son sein soient totalement divergents, a souligné Jean-Claude Juncker. Dans un tel contexte, le Luxembourg doit déterminer comment juguler son inflation. En ce qui concerne la compétitivité, il faut pour le Luxembourg aussi prendre en considération les investissements dans les infrastructures comme des éléments de compétitivité, et pas seulement les salaires, et aussi la formation continue. Il est juste pour le Premier ministre que les salariés restent plus longtemps dans la vie active, que les taux d’emploi, que l’on réforme le système des pensions en fonction de l’évolution démographique et de la charge qu’il impose aux générations futures. Mais il n’est pas juste pour Jean-Claude Juncker que l’on "nous impose des changements de Constitution comme sur la question de la dette publique".

Le Premier ministre a mis en garde, à l’instar de Lucien Lux, contre une explosion sociale : "Notre système risque d’exploser si les citoyens commencent à avoir l’impression que ce sont eux et pas les fauteurs de crise qui vont payer la note."

Le Luxembourg s’est par contre prononcé pour une coordination de l’assiette d’imposition des entreprises, contrairement au souhait  exprimé dans les interventions de Lucien Luix et Lucien Thiel, les porte-parole des partis de la majorité gouvernementale. Ce qui importe maintenant pour Jean-Claude Juncker, c’est ce qui va se passer dans les trois prochaines années pour consolider l’économie européenne, et pas ce qui va se passer dans les dix prochaines années, une allusion à la stratégie Europe 2020. Si l’on va vers des résultats, il n’y a pas de raison que le Luxembourg ne s’y retrouve pas, puisqu’il est "maintenant copropriétaire de la monnaie la plus forte du monde". Et pourquoi insister sur la souveraineté nationale qui n’aurait pas servi à grand-chose en temps de crise ? Il faut "plutôt miser sur la souveraineté partagée qui potentialise notre souveraineté nationale".

Jean-Claude Juncker a ensuite abordé la motion des Verts qui contient selon lui des "éléments qui méritent d’être discutés, même si elle est formulée en termes excessifs". Il a fait la proposition qu’elle soit discutée avec lui en commission des finances. Une proposition inhabituelle aussitôt acceptée par les Verts, qui ont donc renoncé à la soumettre au vote. 

* Annexe

Les dix pistes de la Commission européenne pour la stabilisation macro-économique

Créer les conditions fondamentales nécessaires à la croissance

  • mettre en œuvre un assainissement budgétaire rigoureux
  • corriger les déséquilibres macroéconomiques
  • garantir la stabilité du secteur financier

Mobiliser les marchés du travail et créer des emplois

  • rendre le travail plus attractif
  • réformer les systèmes de pension
  • réinsérer les chômeurs sur le marché du travail
  • concilier sécurité et flexibilité

Donner la priorité à la croissance

  • exploiter le potentiel du marché unique
  • attirer les capitaux privés pour financer la croissance
  • permettre l’accès à l’énergie à un coût abordable