La Commission européenne a présenté le 13 avril 2011 deux propositions législatives visant à introduire un brevet unitaire qui pourrait entraîner une réduction du coût des brevets en Europe de l’ordre de 80 %. Cette initiative, qui s’inscrit dans le cadre de l’Acte pour le marché unique présenté le même jour, relève du régime de la coopération renforcée et concernera 25 Etats membres, l’Espagne et l’Italie ne souhaitant pas pour le moment y participer. Ces deux pays avaient signé l’arrêt en 2010 des propositions visant à instaurer un brevet unique européen en s’opposant à une proposition de régime de traduction y applicable, ce qui a conduit au lancement de cette procédure de coopération renforcée.
Les deux propositions législatives définissent les conditions et modalités d’obtention de la protection par brevet unitaire, ses effets juridiques et les modalités de traduction applicables. Les projets de règlement vont maintenant être transmis au Conseil et au Parlement européen pour examen.
La proposition de la Commission relative à un brevet unique de l’UE était en discussion depuis plus de dix ans, mais était bloquée au Conseil en raison de désaccords sur le régime linguistique.
Le Conseil n’étant pas parvenu à l’unanimité sur le régime de traduction applicable en novembre 2010, une dizaine de pays, parmi lesquels le Luxembourg, ont souhaité lancer un processus de coopération renforcée pour avancer. La Commission a présenté en décembre 2010 une proposition visant à autoriser une coopération renforcée dans ce domaine. L’Espagne et l’Italie s’étaient opposées à l’option proposée en matière de traduction et sont désormais les deux seuls pays à ne pas participer à ce processus. Le 10 mars 2011, suite à l’accord exprimé par le Parlement européen le 15 février 2011, le Conseil Compétitivité a adopté la décision autorisant l’instauration d’une protection par brevet unitaire sur le territoire des 25 États membres participants.
La mise en œuvre de la décision du Conseil autorisant la coopération renforcée nécessite l'adoption de deux règlements : un premier pour créer une protection unitaire par brevet et un second, sur les dispositions applicables à la traduction pour le brevet européen avec effet unitaire.
Les titulaires de brevets européens pourront demander à l’Office européen des Brevets (OEB) une protection par brevet unitaire pour le territoire des 25 États membres. Ce brevet garantira à leurs inventions le même niveau de protection dans ces 25 pays.
Les demandes de brevet peuvent être déposées dans n’importe quelle langue, mais conformément à la procédure actuellement en vigueur, l’OEB continuera d’examiner les demandes et de délivrer les brevets en anglais, en français ou en allemand (qui sont ses trois langues officielles). Les demandeurs résidant dans l’UE qui soumettront leur demande de brevet dans une langue autre que les trois langues de l’OEB recevront une compensation pour leurs frais de traduction dans l’une de ces langues. Enfin, après la délivrance du brevet, les revendications, qui définissent la portée de la protection, devront être traduites dans les deux autres langues de l’OEB.
Durant une période de transition de douze ans maximum, les brevets européens à effet unitaire délivrés en français ou en allemand devront être traduits en anglais. Ceux qui auront été délivrés en anglais devront être traduits vers une autre langue officielle de l’UE. Ces traductions seront obligatoires jusqu’à la mise à disposition d’un système de traduction automatique de grande qualité garantissant l’accessibilité des informations concernant les brevets. Les traductions supplémentaires fournies durant la période de transition serviront directement à mettre au point un système de traduction automatique de grande qualité.
Le système de brevet actuel en Europe est très coûteux et très complexe, surtout dans la phase qui suit la délivrance du brevet, ce qui est généralement reconnu comme une entrave à l’innovation. L’OEB, qui fait partie de l'Organisation européenne des brevets, structure intergouvernementale regroupant 38 pays (les 27 pays de l’UE + 11 autres pays européens), est chargé d’examiner les demandes de brevet et de délivrer les brevets européens sous réserve du respect de certaines conditions. Toutefois, pour qu’un brevet soit valable dans un État membre, l’inventeur doit en demander la validation dans chaque pays où il souhaite bénéficier d’une protection. Cette procédure entraîne des frais de traduction et des coûts administratifs considérables, pouvant atteindre environ 32 000 euros pour une validation dans les 27 États membres, dont 23 000 euros pour les seules traductions. À titre comparatif, le coût moyen d’un brevet aux États-Unis est de 1 850 euros.
De surcroît, le maintien en vigueur des brevets impose l’acquittement de taxes annuelles dans chaque pays, et tout transfert du brevet ou contrat de licence en vue de l’exploitation de l’invention brevetée doit être enregistré de la même manière.
Grâce aux mesures proposées, après une période de transition durant laquelle le coût d’un brevet européen ayant un effet unitaire dans 25 États membres sera inférieur à 2 500 euros, ce coût ne sera plus, à terme, que de 680 euros.