Le 18 janvier 2012, le Parlement européen réuni en plénière a adopté par 521 voix pour, 124 voix contre et 50 abstentions, une résolution affichant les doutes de l’institution quant à l’accord international sur un pacte budgétaire qui est en cours de négociation suite au Conseil européen du 9 décembre 2012.
Elmar Brok (PPE), Roberto Gualtieri (S&D), Guy Verhofstadt (ALDE) et Daniel Cohn-Bendit (Verts/ALE), qui portent la voix du Parlement européen dans les négociations, s’entendent tous les quatre pour admettre que l'accord international envisagé est inutile voire même dangereux. Ils ont ainsi plaidé le respect des institutions et de la méthode communautaire face à un système intergouvernemental.
Les doutes exprimés par les parlementaires dans leur résolution portent sur "la nécessité" d’un tel accord dont la plupart des objectifs essentiels pourraient, indique la résolution adoptée, "être atteints de manière plus efficace grâce à des mesures prises en vertu du droit l'Union, afin d'apporter une réponse énergique, immédiate et durable aux crises financière, économique et sociale qui frappent de nombreux États membres de l'Union".
S’il reste néanmoins "disposé à rechercher une solution constructive", le Parlement européen réaffirme sa conviction "que seule la méthode communautaire peut faire évoluer l'Union monétaire vers une véritable Union économique et budgétaire".
Dans leur résolution, les parlementaires plaident notamment pour que le nouvel accord reconnaisse "expressément la primauté du droit de l'Union sur ses dispositions", pour que sa mise en œuvre se fasse selon les procédures prévues par les traités, que l’accord se doit de respecter. Il s’agit en effet de ne pas créer de "double norme".
Les parlementaires exigent que le nouvel accord prévoie, sous une forme juridiquement contraignante, un engagement des parties prenantes à prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que, dans un délai maximal de cinq ans, l'accord sera intégré en substance dans les traités.
Les parlementaires insistent aussi pour que toutes les parties à l'accord, qu'elles soient ou non membres de la zone euro, puissent bénéficier du même droit de participer aux sommets de la zone euro, un sujet sensible dans un certain nombre de capitales, comme l’ont montré notamment les déclarations du Premier ministre polonais du même jour. "Obtiendrons-nous un statut qui permettra à la Pologne une sorte de participation ?", s’est demandé Donald Tusk devant la presse, indiquant que la décision finale sur ce sujet allait "déterminer la décision de la Pologne de participer ou non au pacte".
Les eurodéputés veulent que la responsabilité démocratique soit garantie et ils plaident ainsi pour un renforcement de la participation parlementaire tant au niveau européen que national, en tenant compte de tous les aspects de la coordination et de la gouvernance économiques européennes. La coopération entre les parlements nationaux et le Parlement européen devra s'effectuer dans le respect des traités de l'Union, conformément à l'article 9 du protocole n°1 aux traités, rappellent-ils aussi.
Comme ils l’ont souvent affirmé dans l’hémicycle, les parlementaires ont rappelé dans cette résolution la nécessité de se consacrer aussi à une croissance durable, et par conséquent à la relance économique, une volonté qui devraient selon afficher les signataires du pacte.
Un appel est donc lancé à la Commission pour qu’elle joue bien son rôle de gardienne des traités.
Un appel qui n’est pas resté sans écho dans les déclarations du président de la Commission, qui était dans l’hémicycle le 18 janvier 2012. Remerciant le Parlement européen pour son soutien dans les négociations, le président José Manuel Barroso a ainsi souligné que la Commission n’a jamais laissé planer la moindre ambiguïté quant au fait qu’elle a fait une priorité de parvenir à un accord qui respecte notamment la primauté du droit de l’UE, la nécessité d’intégrer l’accord aux traités ou encore la nécessaire responsabilité démocratique.
Aussi, dans les derniers amendements proposés par la Commission au sein du groupe de travail, José Manuel Barroso a souligné avoir insisté pour une clause garantissant la primauté du droit de l’UE et sa pleine application, et notamment celle des procédures de l’UE quand l’adoption de droit secondaire est requise. Mais le président de la Commission exige aussi que les Etats membres s’engagent à soutenir une proposition de la Commission qui viserait à renforcer le paquet sur la gouvernance en introduisant, pour les Etats membres de la zone euro, une nouvelle série d’objectifs à moyen terme en ligne avec l’accord. La Commission insiste elle aussi pour l’ouverture adéquate des sommets de la zone euro à tous les Etats membres. Enfin, la Commission défend, comme le Parlement européen, le fait que la coopération entre parlements nationaux et européen doit se faire dans le cadre des traités, conformément au protocole n°1, et ce afin d’éviter l’émergence de différentes assemblées concurrentes au niveau européen qui pourraient affaiblir le Parlement européen.
La résolution a rencontré l’aval de cinq des eurodéputés luxembourgeois, qui ont voté comme leur groupe parlementaire respectif. Ce fut le cas d’Astrid Lulling et Georges Bach (PPE), de Charles Goerens (ALDE), de Claude Turmes (Verts/ALE) et de Robert Goebbels (S&D).
Pour ce dernier, ce ne fut pas de gaité de cœur ainsi qu’il l’a laissé entendre par voie de communiqué. "Cet accord en dehors des structures éprouvées de l'Europe ne résoudra rien et n'impressionnera pas les marchés", estime en effet Robert Goebbels qui déplore "l'abandon de la méthode communautaire", mais aussi "l'élimination du Parlement européen". "J'ai néanmoins donné mon aval à la résolution pour ne pas mêler ma voix aux anti-européens notoires", explique le parlementaire socialiste. Les eurodéputés qui se sont exprimés contre cette résolution sont notamment ceux du groupe ECR, EFD et GUE.
Pour ce qui est du benjamin des eurodéputés luxembourgeois, Frank Engel (PPE), il s’est, comme une douzaine de ses confrères du PPE, parmi lesquels Rachida Dati, et à peu près autant de socialistes, parmi lesquels Catherine Trautmann, abstenu.