Les ministres des Finances de la zone euro, réunis le 26 novembre 2012 pour un Eurogroupe extraordinaire consacré à la Grèce, ont poursuivi leurs discussions laissées en suspens le 20 novembre dernier. Entre temps, ils avaient eu l’occasion de discuter par téléphone le samedi 24 novembre et, au terme de plus de douze heures de négociations, ils ont pu annoncer aux premières heures du 27 novembre les termes de l’accord auquel ils sont parvenus. Il concerne tant la soutenabilité de la dette grecque que le versement de la prochaine tranche de l’aide financière à la Grèce.
"L'accord a été très difficile", a reconnu le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, en soulignant qu'il avait "nécessité des efforts significatifs de chaque partie". Mais, comme l’a relevé Olli Rehn, commissaire européen aux Affaires économiques, "pour la zone euro, il s'agissait d'un vrai test de notre crédibilité, notre capacité à prendre des décisions sur les questions les plus difficiles". "Cela a été laborieux, constructif, nous avons fait un effort collectif", a commenté pour sa part Christine Lagarde, directrice générale du FMI.
Comme l’a rappelé Jean-Claude Juncker, les ministres partaient du constat que les autorités grecques et la troïka BCE-UE-FMI avaient trouvé un accord sur la mise à jour du programme de conditionnalité de cette aide, et que la Grèce avait bien mis en œuvre toutes les actions jugées prioritaires requises, tant en matière de réformes que de consolidation budgétaire.
L’Eurogroupe a aussi noté avec satisfaction que le nouveau programme conditionnant l’aide comprend de nouveaux instruments qui renforcent la mise en œuvre du programme, notamment en établissant des mécanismes de correction pour veiller à l’accomplissement des objectifs tant sur le plan budgétaire que sur celui de la privatisation, ainsi qu’en mettant en place des règles de suivi plus strictes.
Autre objet de satisfaction des ministres de la zone euro, la Grèce a renforcé considérablement l’usage du compte distinct ouvert pour le service de la dette. Ainsi, la Grèce va-t-elle transférer sur ce compte les revenus générés par les privatisations, les excédents prévus ainsi que 30 % des excédents dépassant les objectifs, l’objectif étant de procéder au paiement du service de la dette sur une base prospective trimestrielle. La Grèce va aussi renforcer la transparence et fournir à l’EFSF/ESM des informations complètes, à la fois ex ante et ex post, sur les transactions opérées sur ce compte distinct.
L’engagement des autorités grecques à respecter le programme d’ajustement et les efforts faits par les citoyens européens a été une nouvelle fois salué par les ministres des Finances qui sont cependant conscients que les perspectives de la dette publique grecque en termes de soutenabilité avaient empiré par rapport à mars 2012, moment où le second plan d’aide à la Grèce avait été conclu, et ce essentiellement en raison d’une détérioration de la situation macro-économique et de retards dans la mise en œuvre du programme.
Pour les ministres, la nécessaire révision des objectifs budgétaires et le report de l’objectif d’un excédent budgétaire de 4,5 % du PIB de 2014 à 2016 devaient aller de pair avec une vision plus large de la soutenabilité de la dette comprenant des taux de dettes plus bas à moyen terme et un lissage de l’accroissement financier après 2020 pour en faciliter le financement.
Au cours de la réunion, l’Eurogroupe a été informé de l’intention de la Grèce de prendre dans un avenir proche certaines mesures de réduction de la dette, qui pourraient inclure des appels d’offres d’achats des différentes catégories d’obligations souveraines. "Si cette voie devait être choisie, les prix de soumission ou d’échange ne devraient pas dépasser ceux de ces obligations à la fermeture des marchés le vendredi 23 novembre 2012", précise le communiqué de l’Eurogroupe.
Du point de vue des ministres des Finances de la zone euro, des exercices de gestion du passif devraient être conduits dans le cadre de la recapitalisation des banques grecques, et ce en respectant les créanciers subordonnés de façon à assurer une juste répartition de la charge.
C’est sur la base de ces engagements à poursuivre les réformes budgétaires et structurelles et d’un résultat positif de l’éventuelle opération de rachat de la dette que les ministres des Finances de la zone euro se sont dits prêts à envisager différentes mesures :
L’Eurogroupe souligne toutefois que ces initiatives seront mises en place par étapes et de façon conditionnée à la mise en œuvre par la Grèce des réformes prévues pendant la période du programme d’ajustement et pendant la période qui suivra. Mais les ministres se disent convaincus que ces mesures permettront de ramener la dette publique grecque sur la voie de la soutenabilité et facilitera son retour progressif sur les marchés pour se financer.
La déclaration des ministres des Finances annonce aussi qu’ils sont prêts à envisager des mesures supplémentaires si nécessaire, comme par exemple un co-financement réduit des fonds structurels et/ou une réduction supplémentaire des taux d’intérêts sur les prêts à la Grèce, dans l’objectif de réduire de façon durable et crédible le ratio dette / PIB de la Grèce, à condition que la Grèce atteigne l’excédent annuaire prévu dans le programme d’ajustement, remplisse pleinement toutes les conditions prévues dans le programme, de façon à garantir qu’à la fin du programme du FMI, en 2016, la dette de la Grèce atteigne 175 %, puis 124 % en 2020 et soit enfin largement en-dessous de 110 % en 2022.
"Le FMI voulait s'assurer que la zone euro prendrait les mesures nécessaires pour remettre la Grèce sur la voie d'une dette viable", a expliqué la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, qui s’est félicitée de pouvoir "dire aujourd'hui que cela a été fait".
Au vu de ces éléments, les ministres des Finances ont donc conclu que tout était en place en vue d’un lancement par les Etats membres des procédures nationales qui permettront l’approbation du versement de la prochaine tranche d’aide à la Grèce, qui s’élèvera en tout à 43,7 milliards d’euros. 10,6 milliards d’euros destinés au financement budgétaire et 23,8 milliards d’euros en obligations de l’EFSF destinés à la recapitalisation des banques seront donc versés.
Le communiqué indique que versement pourrait être formellement décidé pour le 13 décembre, en fonction de l’issue des procédures nationales et des résultats de l’éventuelle opération de rachat de dette par la Grèce. Pour la suite du versement, trois tranches sont prévues pour le premier trimestre de 2013, en fonction de la mise en place des étapes, comme par exemple la mise en œuvre de la réforme fiscale prévue en janvier, que définira la troïka dans le cadre du programme d’ajustement.