Le 22 août 2012, le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker était en visite à Athènes afin de rencontrer le Premier ministre grec, Antonis Samaras et son ministre des Finances, Ioannis Stournaras. Cette entrevue était la première d'une série de trois pour Antonis Samaras qui entend, auprès de Jean-Claude Juncker d'abord, de la chancelière allemande, Angela Merkel, et du président français, François Hollande, ensuite, plaider la cause de son pays et obtenir un délai de deux ans pour mener à bien le plan d'assainissement budgétaire conclu avec la troïka. Ce plan, développée à travers deux accords conclus en mars 2010 et février 2012, prévoit pour objectif principal de ramener le déficit annuel des dépenses publiques grecques à 3 % du PIB en 2014, en contrepartie du versement des différentes tranches d'aide financière.
Le gouvernement grec fait valoir que le déficit public de la Grèce devrait atteindre 7 % en 2012 et non 4,5 % comme prévu avant le début de l'exercice. Il aimerait en conséquence obtenir un rabais de deux ans pour atteindre son objectif de consolidation budgétaire. Le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker n'a pas rejeté la requête du gouvernement grec. Il ne s'est toutefois pas prononcé ouvertement, renvoyant à la livraison puis la lecture du rapport de la troïka en septembre 2012 avant que toute décision ne soit prise, comme il l'avait déjà fait savoir dans une interview à la Tiroler Tageszeitung. Cette décision pourrait n'intervenir que lors du sommet européen du 18 octobre 2012.
Le président de l'Eurogroupe a en tout cas affirmé que "la Grèce doit encore poursuivre des efforts pour consolider son budget" et "en ce sens, des pas crédibles et vérifiables doivent être entrepris avant que le pays ne puisse obtenir davantage d'aides financières", comme il l'a déclaré au Luxemburger Wort.
En effet, Jean-Claude Juncker a fait savoir à son homologue grec, que la Grèce devrait entreprendre de nouvelles réformes structurelles, dans le secteur de l'énergie notamment, relancer le processus de privatisations et libéraliser certaines professions protégées. Comme il l'a à plusieurs reprises répété, Jean-Claude Juncker s'est dit "absolument opposé" à une sortie de la Grèce de la zone euro, qui aurait un coût plus élevé pour les pays de l'euro que le soutien financier accordé, sous conditions, à la Grèce.
Lors de la conférence de presse commune tenue à l'issue de son entrevue avec le Premier ministre grec, Jean-Claude Juncker a fait savoir que c'était "la dernière chance pour la Grèce". "Dans l'immédiat, la balle est dans le camp grec. En fait, c'est la dernière chance et les Grecs doivent le savoir." Jean-Claude Juncker considère que la crédibilité du gouvernement grec a souffert ces dernières années et que les Grecs doivent désormais "prouver qu'ils se tiennent à leurs obligations". La consolidation budgétaire doit selon lui rester pour l'heure l'horizon prioritaire.
Or, Antonis Samaras a garanti qu'un nouveau paquet de mesures d'austérité serait adopté dans les prochaines semaines. D'une hauteur de 11,5 à 13,5 milliards d'euros (soit 6 % du PIB), ce plan inclurait de nouvelles baisses dans les retraites pour la quatrième fois en deux ans, mais aussi des baisses de salaires dans les organismes publics ainsi que la suppression des primes ou d'emplois dans le secteur public. Le gouvernement grec espère ainsi pouvoir faire preuve de sa bonne volonté et obtenir une nouvelle tranche d'aide financière de 31 milliards d'euros. "Nous sommes sûrs que la crédibilité du pays sera rétablie", a-t-il le Premier ministre après sa rencontre avec Jean-Claude Juncker.
"Tout ce que nous voulons est un peu d'air pour respirer, pour relancer rapidement l'économie et augmenter les recettes de l'Etat. Plus de temps ne signifie pas automatiquement plus d'argent", avait déclaré Antonis Samaras, dans une interview du quotidien allemand Bild Zeitung paru le jour même de sa rencontre avec Jean-Claude Juncker. Le premier ministre grec y déclare encore que "les conséquences" d'une sortie de la zone euro "constitueraient une catastrophe pour la Grèce". "Cela signifierait au moins cinq années supplémentaires de récession et ferait passer le chômage au-delà de 40 %. Un cauchemar pour la Grèce : chute économique, désordres sociaux et une crise de la démocratie inédite. Le standard de vie grec a baissé d'environ 35 % en trois ans. Un retour à la drachme le ferait chuter aussitôt de 70 % de plus. (…) A la fin, ce serait comme dans la République de Weimar", prévenait-il.
Antonis Samaras a garanti "personnellement", dans une interview à la Süddeutsche Zeitung parue le lendemain, que les aides financières seront remboursées. L'ardoise s'élève à plus de 100 milliards d'euros auprès de ses partenaires de la zone euro.
Toutefois, à la veille de sa visite à la chancelière allemande, le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, et le vice-chancelier, Phillip Rösler, ont signifié leur grande réticence à allonger le délai accordé à la Grèce pour assainir son budget. Wolfgang Schäuble a en effet déclaré à la Südwestrundfunk (SWR) que la zone euro est arrivée "à la frontière de ce qui est économiquement défendable". "Plus de temps n'est pas une solution au problème. (...) Plus de temps signifie (...) plus d'argent", a-t-il dit.
Dans une interview accordée depuis la Grèce à la télévision luxembourgeoise RTL après la rencontre, Jean-Claude Juncker a expliqué qu'il avait parlé de "dernière chance pour la Grèce afin qu'elle prouve, qu'elle prend au sérieux la consolidation de ses finances publiques, de la réforme de l'Etat, de la manière dont les impôts sont levés, son engagement à lutter contre l'évasion fiscale". Et il a l'impression que son message a été bien entendu tout en soulignant par ailleurs que "le déficit grec a été réduit, la compétitivité grecque a augmenté. Tout n'est pas négatif dans ce qu'il se passe dans ce pays".
Pour gagner une confiance plus importante, le pays doit "faire avancer le processus de privatisation dans ce pays, non pas pour exproprier le peuple grec mais pour donner plus de force et de plus de possibilités de réussite à l'économie grecque".
Le présentateur du journal de RTL, Frank Goetz, est aussi revenu sur les déclarations du président de l'Eurogroupe à la télévision allemande WDR, qui avaient été interprétées comme une porte ouverte à la sortie de la Grèce. "La déclaration que j'ai faite à la télévision allemande a été consciemment mal interprétée par des parties intéressées. Je voulais dire qu'une sortie de la Grèce serait techniquement faisable, plus facilement faisable qu'il y a quelques années. Mais politiquement et macro-économiquement, c'est un pas, qui n'est absolument pas souhaitable, car cela jetterait le peuple grec dans une grave crise, la récession augmenterait, le chômage également, le niveau de vie des Grecs reculerait, tandis qu'aucun problème de la zone euro ne serait réglé, si la Grèce sortait de la zone euro. C'est pour cela que ce n'est pas une partie de mes hypothèses de travail", a rétorqué Jean-Claude Juncker.
A la sortie de sa rencontre avec le premier ministre grec, il avait d'ailleurs tancé ceux qui défendent ou spéculent sur une sortie de la zone euro de la Grèce. Une telle issue "n'aiderait personne". Que ceux qui réclament cette sortie "tiennent leur langue" pour ne pas mettre en danger les réformes, aiderait bien plus, a-t-il dit.
Au micro de RTL, il a également invité à l'empathie vis-à-vis du peuple grec: "La Grèce doit livrer des efforts préalables (…) Mais cela a pour conséquence que les autres Etats européens doivent se montrer solidaires. Il n'y a pas de solidarité sans solidité grecque préliminaire. Mais j'aimerais aussi que dans le reste de l'Europe on perçoive que les gens ici en Grèce, particulièrement les petites gens et il y en a ici beaucoup, vivent dans une situation extrêmement difficile. Et nous devons de temps en temps comparer le niveau de vie de ces Grecs, qui n'ont bientôt plus rien, avec celui que nous avons, pour réaliser que la solidarité, si la solidité vient, est absolument nécessaire. Nous sommes ensemble", a en effet dit le président de l'Eurogroupe qui n'a pas répondu à la demande d'entrevue que lui avait adressée le chef de l'opposition et dirigeant de la Gauche radicale Zyriza, Alexis Tsipras.