Principaux portails publics  |     | 

Compétitivité - Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Selon les nouvelles projections macroéconomiques de la BCL, "la sortie de crise sera vraisemblablement très lente, après une longue période de stagnation"
26-06-2013


BCLLe 26 juin 2013, la Banque centrale du Luxembourg a publié son deuxième bulletin de l'année 2013. Les perspectives de croissance y sont moins bonnes que prévu dans son Bulletin de décembre 2012. "La sortie de crise sera vraisemblablement très lente, après une longue période de stagnation", prévient la BCL dans le résumé de son bulletin.

"Un commerce international moins dynamique qu'à l'accoutumée" expliquerait ainsi que la progression du PIB luxembourgeois en volume se limiterait à un taux situé entre 0,5 et 1,1% en 2013, puis s'établirait aux alentours de 2% tant en 2014 qu'en 2015. Ce recul s'explique notamment par le fait que "le contexte européen s'est dégradé", comme l'indiquent les projections des services de l'Eurosystème sur la zone euro, lesquels envisagent une croissance négative, de -0,6 %, en 2013 et une croissance limitée à 1,1% en 2014, soit des taux revus à la baisse à raison de 0,3 et 0,1 point de pourcentage, respectivement.

La BCL prévient néanmoins que ces taux de 2 % parient sur "le scénario d'une sortie de la zone euro de la récession et sur une progression de la demande mondiale proche de sa moyenne historique". Le rebond de la demande domestique demeurerait "modeste", précise la BCL.

Incertitudes sur l'évolution du secteur financier

"L'évolution du secteur financier (…) est sujette à divers facteurs d'incertitude pour partie exogènes à l'économie nationale", poursuit la BCL.

Au premier trimestre de 2013 et par rapport au trimestre correspondant de l'année précédente, les revenus nets sur commissions des établissements de crédit ont progressé d'environ 10 %, à la faveur notamment de conditions plus favorables sur le marché des actions. En revanche, dans le même temps, la marge sur intérêt a diminué de quelque 16 %, "dans un environnement de taux d'intérêt faibles combinés à une réduction du volume des activités bilantaires". Enfin, le produit bancaire s'est réduit de 1,6 %.

La valeur nette d'inventaire des organismes de placement collectif a pour sa part progressé de plus de 10 % en glissement annuel au cours des trois premiers mois de 2013, en raison, en grande partie, d'investissements nets en capital systématiquement positifs depuis mars 2012, juin 2012 mis à part. Elle découle également du regain de dynamisme des cours sur les marchés internationaux d'actions depuis la mi-2012, lequel regain "pourrait ne pas perdurer".

La BCL dit ne pas être en mesure de définir l'incidence précise sur la Place financière du renforcement de la régulation des établissements financiers.

Elle est toute aussi incertaine quant aux répercussions des décisions récentes relatives à l'échange automatique d'informations entre différentes juridictions. "[Son] impact sur l'activité économique est difficilement quantifiable", dit-elle en effet. La BCL salue ces décisions, "tout en regrettant qu'elles n'aient pas été prises plus tôt et de façon plus cohérente".

"Si une certaine accalmie est survenue ces derniers mois entre autres sur les marchés de la dette souveraine, de nouvelles turbulences ne peuvent jamais être exclues" et cela pèserait nécessairement sur les perspectives macroéconomiques du Luxembourg, prévient encore la BCL.

Dans un de ses six encadrés, qui constituent des gros plans sur l'un ou l'autre sujet, la BCL constate que les crédits octroyés par les institutions financières monétaires aux sociétés non financières implantées au Luxembourg, en glissement annuel, ont progressé de l'ordre de 8 % en avril, tandis que leur volume stagnait dans la précédente enquête. "Certaines indications parcellaires suggèrent en outre qu'une telle inflexion pourrait en partie refléter l'évolution des crédits à des sociétés orientées vers le marché immobilier", précise la Banque centrale. L'encadré montre enfin que la progression en glissement annuel des crédits immobiliers octroyés aux résidents est demeurée soutenue en avril.

Le taux de chômage en progression

Dans ce contexte macroéconomique incertain, le taux de chômage devrait continuer à progresser d'ici 2015. La BCL estime désormais que le taux de chômage au sens strict (c'est-à-dire hors mesures pour l'emploi) passerait de 6,1 % en 2012 à 7 % en 2015.

Dans un encadré spécial dédié au chômage, la BCL souligne que la hausse du chômage observée au Luxembourg depuis 2007 ne serait que "partiellement attribuable à des phénomènes conjoncturels" et met en relief la nécessité de réformes structurelles du marché du travail, visant notamment à promouvoir l'employabilité des chômeurs et à favoriser la formation continue et initiale. Sans quoi, "les personnes enlisées dans le chômage – soit en particulier les chômeurs âgés, peu qualifiés ou de longue durée – ne profiteraient que modérément d'une reprise économique en termes d'accès à l'emploi".

Par ailleurs, la croissance annuelle de l'emploi salarié intérieur a atteint 1,7 % en janvier 2013, en forte décélération par rapport au mois précédent, contre 2 % à 2,3 % entre avril et décembre 2012. Et selon les plus récentes estimations, la croissance de l'emploi aurait poursuivi sa décélération entre février et avril 2013.

La BCL constate, en la matière, que l'emploi frontalier a continué de progresser de manière moins dynamique que l'emploi national jusqu'au mois de janvier 2013. Elle y voit à la fois la conséquence de la "surreprésentation des salariés frontaliers dans des branches davantage soumises à la concurrence internationale et aux fluctuations cycliques".

La recrudescence de l'immigration nette ces dernières années, en raison de l'attrait exercé par le Grand-Duché depuis  l'aggravation de la crise dans la zone euro, aurait provoqué une offre de travail résidente additionnelle, caractérisée par un niveau de qualification en moyenne plus élevé que celui des vagues d'immigration précédentes, qui a pu se substituer (en partie) à l'offre de travail frontalière.

L'inflation

En dépit d'une activité économique au ralenti et de la dégradation continue du marché de l'emploi, l'inflation hors énergie demeurera soutenue d'ici 2015, avance la BCE, qui y voit la nouvelle preuve du "biais inflationniste", déjà "manifeste au cours de la dernière décennie". La hausse des prix à la consommation harmonisés hors énergie demeurerait systématiquement supérieure à 2 % et équivalente à son niveau de 2012 tout au long de l'horizon de projection 2013-2015.

"Par ailleurs, l'inflation globale tend à rester bien plus élevée au Luxembourg que dans la zone euro ou dans les pays limitrophes." Au premier trimestre 2013, l'écart d'inflation cumulé depuis 1999 s'est établi à 5,4 % par rapport à la zone euro et à près de 10 % par rapport à la moyenne arithmétique des trois pays voisins.

Déficit des administrations publiques

Le déficit des Administrations publiques (Administration centrale, pouvoirs locaux et sécurité sociale) s'élèverait à 3 % du PIB en 2015 et résulterait dans une large mesure du ressac en 2015 des recettes de TVA liées au commerce électronique. En dépit d'une période transitoire de 2015 à 2019, les pertes de recettes en 2015 représenteront environ 1,3 % du PIB. "Il y a cependant lieu de signaler dans ce contexte que la disparition graduelle de ces recettes était largement prévisible et est de surcroît connue depuis plusieurs années, de sorte qu'elle ne peut être considérée comme un fait nouveau en matière de planification budgétaire", fait remarquer la BCL.

L'augmentation de la TVA, annoncée par le Premier ministre et équivalant à 0,8 % du PIB selon le Programme de stabilité, ramènerait néanmoins le déficit des Administrations publiques à environ 2 % du PIB pour 2015.

Ce que la BCL qualifie de "dérive des finances publiques" s'expliquerait par ailleurs par l'augmentation tendanciellement élevée des dépenses, égale à 5 % par an sur la période 2013-2015. C'est "un rythme bien supérieur à la croissance du PIB nominal attendue au cours de la même période", dit-elle en pointant les transferts sociaux. Ces derniers afficheraient une hausse de 6 % par an en moyenne, sans pour autant être, par le passé, "allée de pair avec une atténuation des inégalités, bien au contraire", note la BCL en renvoyant à la lecture du rapport Travail et Cohésion sociale 2012 selon lequel la disparité des revenus disponibles aurait augmenté au cours de la dernière décennie. "Un ciblage plus efficace des transferts sociaux permettrait à l'inverse de concilier un ralentissement de la progression des transferts avec un recul des inégalités", conseille la Banque centrale du Luxembourg

La dette brute consolidée des Administrations publiques atteindrait quant à elle 27 % du PIB en 2015 à politique inchangée. La vente de  la participation de l'Etat dans la banque BGL BNP Paribas permettrait de rembourser l'emprunt de 2 milliards d'euros émis en 2008  et ferait revenir la dette publique à une part de 23 % du PIB.

Balance commerciale et compétitivité

"La balance des marchandises et le solde courant subissent également une tendance à la détérioration", constate la BCE, qui évalue à 1,9 milliard d'euros au premier trimestre de 2013 le déficit de la balance commerciale, soit une hausse de 8,7 % sur un an.

Le déficit de la balance des marchandises, est pour sa part passé de 9 % du PIB en 2007 à 14 % en 2012. "Le solde courant affiche quant à lui toujours un considérable excédent, mais ce dernier a également marqué le pas de 2007 à 2012, passant de 10,1 % du PIB à 5,6 % du PIB", nuance la BCL.

Le second de ses six encadrés du Bulletin s'intéresse d'ailleurs de près aux éléments structurels de la compétitivité, en se basant sur les résultats récemment obtenus par le réseau de recherche sur la compétitivité créé au sein du Système européen de banques centrales (COMPNET).

"Une large part de la dégradation des performances exportatrices de l'industrie luxembourgeoise s'explique par une détérioration de la compétitivité globale des entreprises sur leurs marchés respectifs » tandis qu'un autre  facteur explicatif potentiel de cette détérioration réside dans les prix de la production domestique", lit-on dans le Bulletin. La BCL constate également le rôle négatif joué par des facteurs de compétitivité dits "hors-prix" dans certains secteurs où les prix de production avaient beau se situer sous le prix international, alors que les performances exportatrices restaient médiocres.

Ainsi, "toute mesure qui viserait à limiter l'évolution des coûts pour les entreprises (que ce soit du travail, du capital ou de l'énergie) serait la bienvenue". Mais d'autre part, "des mesures plus structurelles visant notamment à améliorer qualitativement le capital humain (en augmentant l'efficacité de l'enseignement, en améliorant la formation des demandeurs d'emploi et des salariés au sein des entreprises,…) pourraient probablement aider les entreprises à être mieux armées pour se positionner favorablement sur l'échiquier du commerce international".

Quelques divergences sur les hypothèses macroéconomiques à la base de la 14e actualisation du Programme de stabilité luxembourgeois

Un ultime encadré vise enfin à fournir une évaluation de la 14e actualisation du Programme de stabilité luxembourgeois. La BCL estime que les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles se fonde le Programme sont "généralement fiables". Abstraction faite de l'incidence d'hypothèses macroéconomiques différentes en fin de la période de projection, des écarts subsistent entre les projections de finances publiques de la BCL d'une part et la 14e actualisation d'autre part. "Ces écarts sont les plus manifestes sur le versant des dépenses", la BCL tablant sur une progression significativement plus importante de ces dernières – en particulier en ce qui concerne les transferts sociaux. Le Programme paraît également plus volontariste sur le versant des recettes à partir de 2015, mais ces écarts reflètent essentiellement le traitement différencié de la hausse des recettes de TVA en 2015. Enfin, alors que la BCL table sur une masse salariale en hausse de 4,7 % en 2013, les auteurs du programme de stabilité estiment pour leur part qu'elle n'augmentera que de 3,5 %.