Comme promis après sa victoire lors des élections législatives britanniques du 7 mai 2015, le Premier ministre conservateur David Cameron a entamé sa tournée des capitales européennes, le 28 mai 2015, en se rendant aux Pays-Bas, puis en France pour y défendre sa volonté de réforme de l'Union européenne. Le même jour, le projet de loi visant à organiser un référendum sur l'appartenance britannique à l’UE, annoncé la veille devant les députés par Elizabeth II à l'occasion du traditionnel discours de la reine, était déposé par le gouvernement britannique au parlement de Westminster.
Pour mémoire, à peine réélu, le Premier ministre conservateur avait répété sa promesse de longue date d'organiser d'ici la fin 2017 un référendum sur le maintien ou la sortie du Royaume-Uni de l'UE, qui serait précédé d’une renégociation des "termes de l'appartenance" de son pays au groupe des 28. David Cameron souhaiterait notamment le rapatriement de certaines compétences à Londres et en particulier la réforme du principe de la libre-circulation dans l'UE.
Le durcissement des conditions d'accès aux aides sociales pour les immigrés de l'UE, notamment en provenance des pays de l'Est, serait envisagé dans ce contexte, alors que le nombre d'arrivées sur le sol britannique a fait un nouveau bond en 2014, selon les estimations officielles. A ce sujet, le Royaume-Uni dénonce depuis plusieurs années l’existence supposée d’un "tourisme aux prestations sociales" qui serait pratiqué par les migrants intra-UE, mais dont la réalité a été régulièrement mise en doute par la Commission européenne, et même infirmée par une enquête du quotidien britannique The Gardian.
En marge du sommet du Partenariat oriental, le 21 mai 2015, David Cameron avait profité de son premier déplacement à l’étranger depuis sa victoire électorale pour annoncer qu'il allait "sérieusement entamer les discussions" avec les autres leaders européens, et il avait dans la foulée participé à un dîner de travail, le 25 mai, avec le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. Le Premier ministre britannique a prévu dans ce contexte de rencontrer les dirigeants des 27 autres Etats membres d'ici le Conseil européen des 25 et 26 juin à Bruxelles.
Comme attendu depuis la victoire du Premier ministre conservateur qui en avait fait une promesse de campagne, la tenue d’un référendum visant à donner le choix aux britanniques 2017 entre le maintien dans l'UE ou le "Brexit" (pour "British exit") a été confirmée le 27 mai 2015. C’est la reine Elizabeth II qui l’a annoncé devant le parlement de Westminster à l'occasion du traditionnel discours de la reine, lu par la souveraine mais rédigé par le gouvernement, qui présente les grandes lignes du programme législatif du nouvel exécutif.
"Mon gouvernement renégociera la relation du Royaume-Uni avec l'Union européenne et cherchera à réformer l'UE pour le bénéfice de tous les Etats membres", a-t-elle ainsi déclaré, avant d’indiquer que "parallèlement, une loi sera[it] présentée pour organiser un référendum sur le maintien ou pas (du Royaume-Uni) dans l'Union européenne avant la fin 2017" (voir la version écrite du discours).
Dès le lendemain, le gouvernement britannique déposait le projet de loi relatif au référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’UE, "respectant [ainsi] l'engagement du Premier ministre de donner au peuple britannique un choix très simple sur l'adhésion du Royaume-Uni de l'UE", lit-on dans un communiqué diffusé sur le site du gouvernement le jour même. Le texte du projet de loi précise notamment la question qui sera soumises aux électeurs, et il définit l’électorat qui sera appelé à se prononcer.
Ainsi, le projet précise que l'électorat sera pratiquement le même que pour les élections législatives, c'est-à-dire composé des citoyens britanniques et des citoyens irlandais et du Commonwealth résidents du Royaume-Uni, tous âgés de plus de 18 ans. Les citoyens britanniques résidant à l’étranger depuis moins de 15 ans pourront également s’exprimer, et, contrairement à la pratique habituelle, les membres de la chambre des Lords aussi.
"Cela signifie que résident irlandais, maltais et chypriotes au Royaume-Uni pourront voter", précise le communiqué, qui souligne en revanche que les autres ressortissants de l'UE, même autorisés à voter lors des élections locales, ne pourront pas s'exprimer. Le projet de loi confirme par ailleurs que le référendum sera organisé d’ici au 31 décembre 2017, soit "40 ans après le dernier référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l'UE", y lit-on.
Quant à la question qui sera soumise à l’approbation (ou non) des votants, elle se veut simple : "Le Royaume-Uni doit-il rester membre de l'UE ?". Il s’agit d’une formulation positive qui place les europhiles dans le camp du "oui", comme le soulignent plusieurs médias, et qui a d’ailleurs été immédiatement critiquée par le parti europhobe et populiste Ukip, qui la juge biaisée et en faveur du maintien dans l'UE.
Suite au dépôt du projet de loi sur le référendum, David Cameron a donc entamé sa tournée des capitales européennes en vue d’y défendre sa volonté de réforme de l'UE, le 28 mai. Après avoir déjeuné avec le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, un allié sur lequel il espère pouvoir compter, le Premier ministre britannique s'est rendu à Paris, où il a dîné à l'Elysée avec le président français, François Hollande, et le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius. Le lendemain, il s’est rendu en Pologne pour rencontrer la Première ministre polonaise, Ewa Kopacz, et il a participé à un déjeuner de travail avec la chancelière allemande, Angela Merkel.
A Paris, David Cameron a soutenu que sa priorité était "de réformer l'Union européenne pour la rendre plus compétitive et répondre aux inquiétudes des Britanniques quant à notre appartenance" à l'UE, à l’occasion d’une déclaration conjointe prononcée à l'issue de son entretien avec le président français (une déclaration que rapporte d’ailleurs un communiqué diffusé par le gouvernement britannique et un communiqué de la présidence française). "Le statu quo n'est pas suffisant, des changements peuvent être faits et bénéficier non seulement à la Grande-Bretagne mais aussi au reste de l'Europe", a-t-il ajouté.
Reconnaissant que la priorité de son interlocuteur français était le fonctionnement de la zone euro et le succès de la monnaie unique, David Cameron a assuré que "le Royaume-Uni soutient cette approche". "Nous voulons que la zone euro fonctionne mieux encore et nous ne voulons pas faire obstacle à une intégration plus grande", a-t-il poursuivi. "Mais si nous avons des priorités différentes, nous avons un objectif commun de trouver des solutions à ces problèmes. Ce qui compte, c’est que l’Union européenne et ses vingt-huit membres soient suffisamment flexibles et fassent suffisamment preuve d’imagination pour répondre à ces questions", a encore estimé le Premier ministre britannique.
De son côté, François Hollande a réaffirmé qu'il était de "l'intérêt de l'Europe et du Royaume-Uni d'être ensemble" tout en disant son "respect" pour ce que décidera le "peuple" britannique. "La France souhaite que la Grande-Bretagne reste dans l’Union européenne. Il y aura un référendum, il a été annoncé. Ce sera au peuple britannique de choisir, souverainement, ce qu’il veut pour son avenir", a-t-il ainsi indiqué. "David Cameron présentera ses propositions, nous les discuterons et nous verrons comment nous pouvons avancer pour que le peuple britannique puisse être consulté sur une base qui lui permette de faire le choix qui lui correspondra le mieux", a-t-il poursuivi.
Au matin de la rencontre, Laurent Fabius s’était néanmoins voulu mois optimiste, jugeant "très risqué" le référendum initié par David Cameron, selon des propos rapportés par l’AFP. "La population britannique a été habituée à ce qu'on lui dise: ‘l'Europe c'est une mauvaise chose’", a-t-il estimé, notant que "le jour où on va la consulter, il y a un risque qu'elle dise que l'Europe est une mauvaise chose". Les Britanniques, a ajouté le ministre français, "ont adhéré à un club de football. On ne peut pas dire au milieu du match: maintenant on va jouer au rugby".
"Le Premier ministre est catégorique en disant à nos partenaires européens que si nous ne sommes pas capables de répondre aux grandes inquiétudes du peuple britannique, nous ne gagnerons pas le référendum", a de son côté insisté le ministre britannique des Affaires étrangères, Philip Hammond, le 28 mai, au micro de la BBC. "Nous nous attendons à ce que certains de nos partenaires soient réticents au départ des négociations, car c'est comme ça que fonctionnent les négociations, a-t-il ajouté. Mais nous sommes très confiants dans nos capacités à négocier des réformes significatives cet été ou, au besoin, cet hiver". Pour rappel, la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE couvre cette période.