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Justice, liberté, sécurité et immigration - Marché intérieur
La Commission européenne veut faciliter les droits des citoyens européens dans le contexte de la libre circulation des travailleurs
26-04-2013


Laszlo Andor © Commission européenneLe 26 avril 2013, le commissaire en charge de l'emploi, des affaires sociales et de l'inclusion, László Andor a présenté une proposition de directive relative à des mesures facilitant l'exercice des droits conférés aux travailleurs dans le contexte de la libre circulation des travailleurs. Le texte doit permettre une meilleure application de la loi européenne sur le droit des citoyens européens de travailler dans un autre Etat membre que le leur. La non-discrimination sur base de nationalité pour l'emploi, le salaire et les conditions de travail est garantie par l'Article 45 du Traité sur le fonctionnement de l'UE tandis que le droit à la libre circulation des travailleurs est régi par le règlement 492/2011 qui définit les domaines spécifiques dans lesquels la discrimination fondée sur la nationalité est interdite.

Le problème et la solution

"Les employeurs publics et privés ne connaissent pas suffisamment les dispositions de l'Union. Cette méconnaissance ou incompréhension du droit est une source majeure de discrimination fondée sur la nationalité. En outre, les citoyens ne savent pas où s'adresser dans l'État membre d'accueil, lorsqu'ils rencontrent des difficultés à exercer leur droit de libre circulation", lit-on dans le communiqué de presse diffusé par la Commission européenne.

La Commission a ainsi listé une série d'obstacles auxquels la directive doit s'attaquer : des conditions de recrutement différentes entre les citoyens et les migrants ; des restrictions sur la base de la nationalité pour l'accès à certains postes ; des quotas pour les nationaux, dans le monde du sport notamment; des privilèges pour les nationaux dans l'accès à certains avantages sociaux, dont les bourses ; l'absence de prise en compte des qualifications ou expériences professionnelles obtenues à l'étranger.

Pour y pallier, la directive propose que les États membres soient tenus :

  • de mieux informer les travailleurs migrants et les employeurs de l'Union de leurs droits, en créant des points de contact nationaux fournissant aide, information et conseil dans ce domaine;
  • d'offrir des moyens de recours appropriés au niveau national;
  • d'autoriser les syndicats, les ONG et d'autres organisations à engager des procédures administratives ou judiciaires au nom des travailleurs victimes de discriminations;
  • et de fournir une meilleure information aux travailleurs migrants et aux employeurs.

Dans un Memo publié à cette occasion, la Commission européenne énumère une liste d'exemples de discriminations dans les différents Etats membres. Pour le Luxembourg, elle semble avoir déjà tranché l'affaire des bourses d'études encore pendante devant la CJUE pour enfants de travailleurs frontaliers puisqu'elle y dit que le choix d'exclure les enfants frontaliers de cet avantage social est contraire à l'article Article 7(2) du règlement 492/2011.

La Commission européenne a des doutes sur l'ampleur du tourisme social

La Commission européenne avait déjà évoqué, lors de la présentation, le 18 avril 2012, de son "paquet Emploi", son intention de déposer une proposition législative d'ici la fin de 2012 visant à aider les travailleurs mobiles à exercer leurs droits. Néanmoins, la présentation de cette proposition de directive est intervenue au lendemain de l'envoi, par les ministres de l'Intérieur de quatre Etats membres, l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, d'une lettre dénonçant la charge financière que ferait porter la libre circulation des travailleurs.

Le courrier, initié par l'Allemagne, rapporte que "des villes et communes de différents Etats membres croulent sous la charge très élevée que leur font porter certains immigrés d'autres Etats membres". "Ceux-ci utilisent les possibilités que la libre circulation offre, sans toutefois remplir les conditions pour l'exercice de ce droit", dénoncent les quatre Etats membres. Demandant à ce que le sujet soit mis à l'ordre du jour du Conseil Justice et Affaires intérieures du mois de juin 2013, ils revendiquent le droit de prononcer une interdiction de territoire, dès lors qu'un individu a perçu une aide sociale indue. Les dispositions européennes actuelles ne leur permettraient pas de mettre fin à cette forme de tourisme social. "Ceux, qui sont effectivement renvoyés en cas de fraude ou de falsification de documents, ne peuvent être empêchés de revenir, quasiment le jour d'après, dans le pays." Même s'ils ne sont pas nommés, les immigrés visés seraient principalement originaires de Roumanie, Bulgarie et Hongrie.

"Il y a une perception répandue dans différents Etats membres qu'il y a un réel problème de migrants venant d'autres pays non pas pour travailler mais pour demander des avantages. Mais jusqu'ici, aucun Etat membre n'a fourni de données et de faits pour soutenir cette perception", a rétorqué László Andor, comme on le lit dans sa déclaration. Le commissaire considère par ailleurs que le droit européen propose déjà des garde-fous sévères dans la mesure où l'accès au système social est conditionné par l'obtention d'un travail et une résidence permanente dans le pays ou l'appartenance à la famille d'une personne qui a un travail. Il a par ailleurs tenu à rappeler que "la libre circulation des travailleurs est un principe fondamental du marché unique de l'Union européenne".

La mobilité comme solution au taux de chômage élevé

La Commission européenne mise justement sur la mobilité à l'intérieur du marché unique pour régler en partie le problème du chômage et de l'écart grandissant entre pays du Nord et du Sud. Ainsi, László Andor a, durant son discours, souligné que l'Allemagne tirait bénéfice de la libre circulation des travailleurs, elle qui "par exemple, connaît un manque de main d'œuvre dans différents secteurs et essaie activement d'attirer des travailleurs d'Espagne, d'Italie et d'autres Etats membres connaissant des forts niveaux de chômage, en particulier chez les jeunes. "Le commissaire est d'avis qu'il s'agit là d'un mouvement à suivre. "Alors que certains États membres affichent un taux de chômage beaucoup plus élevé que d'autres, il est d'autant plus important d'aider ceux qui le souhaitent à travailler dans un autre pays de l'Union"  a-t-il considéré.

La mobilité de la main d'œuvre serait une situation "gagnant-gagnant". Elle "profite aux pays d'accueil, puisqu'elle permet à des entreprises de pourvoir des postes qui resteraient sans cela vacants et leur évite ainsi de se retrouver dans l'impossibilité de produire certains biens ou de fournir certains services", et "également au pays d'origine des migrants, dans la mesure où elle permet aux travailleurs qui auraient autrement moins de possibilités professionnelles de trouver un emploi, d'apporter un soutien financier à la famille restée dans le pays d'origine et d'acquérir des compétences et une expérience dont ils seraient sinon privés."

Le commissaire en charge des affaires sociales a par ailleurs balayé l'idée que la mobilité intra-européenne aiguiserait la concurrence sur le marché du travail. "La preuve empirique indique que les ouvriers viennent d'autres pays en réponse au manque de compétences et de main d'œuvre dans le pays hôte. Ils sont complémentaires des travailleurs du pays hôte plutôt qu'ils ne les remplacent."

3 % de la main d'œuvre de l'Union travaille dans un Etat membre qui n'est pas le sien

Par ailleurs, László Andor a rappelé que la Commission européenne avait déjà récemment agi pour favoriser la libre circulation des travailleurs, en prenant, en novembre 2012, la décision de réformer le réseau d'emploi européen EURES afin de faciliter le contact entre travailleurs et employeurs cherchant des compétences particulières et pour soutenir des "schémas de mobilité ciblée pour les jeunes gens", ainsi qu'en créant, en décembre 2012, le site internet baptisé EU Skills Panorama, centralisant des informations quantitatives et qualitatives sur les compétences recherchées dans les différents Etats membres.

Actuellement, 3 % de la main d'œuvre de l'Union, soit 6,5 millions de personnes, vivent et travaillent dans un autre Etat membre, tandis qu'il existe 1,2 million de travailleurs frontaliers, rappelle la Commission européenne. Si les travailleurs les plus mobiles sont les Roumains, les Irlandais et les Portugais, (plus de 10 % d'entre eux travaillent à l'étranger), les plus rarement actifs à l'étranger sont les travailleurs allemands (moins de 1 %), selon des chiffres d'Eurostat publiés en 2012 et rappelés par la Commission européenne.