Le 10 juin 2015, le ministre des Affaires étrangères Jean Asselborn a reçu Harlem Désir, secrétaire d’État français aux Affaires européennes, pour une réunion de travail où il a été question des priorités de la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE qui débutera le 1er juillet 2015. Harlem Désir a souligné que les priorités fixées par le Luxembourg étaient "très largement partagées par la France".
Revenant sur la première priorité de la Présidence luxembourgeoise, à savoir "libérer l’investissement pour la croissance et l’emploi", le ministre et le secrétaire d’Etat ont évoqué le Plan Juncker, censé libérer 315 milliards d’investissements publics et privés pour l'économie réelle au cours des trois prochaines années (2015-2017). Harlem Désir a fait part de la volonté de la France de "mettre en œuvre rapidement le Plan Juncker. Le secrétaire d’Etat a également rappelé la nécessité d’approfondir la dimension sociale de l’Union économique et monétaire, par exemple en mettant en place des projets permettant aux jeunes en formation professionnelle de bénéficier d’une mobilité dans l’espace européen, "une sorte d’Erasmus+", ou encore en améliorant la règlementation sur le détachement des travailleurs, pour laquelle le Parlement avait voté une révision de la directive le 16 avril 2014.
Harlem Désir a également salué la priorité que s’est fixée le Luxembourg en matière de "liberté, justice et sécurité". Ainsi la France soutiendra la Présidence dans les dossiers relatifs à la protection des données, la liberté sur internet ou encore la lutte contre les formes de radicalisation et le PNR, deux priorités également inscrites dans la feuille de route anti-terrorisme sur laquelle s’étaient entendus les chefs d’Etat ou de gouvernement européens le 12 février 2015 après les attentats de Paris. La France œuvrera également aux côtés du Luxembourg pour l’achèvement du marché unique numérique, réguler les plate-formes et les conditions de concurrence, et faire respecter le droit d’auteur, a fait savoir Harlem Désir.
En matière de migration, "l’un des points forts de la Présidence", Jean Asselborn a rappelé que la situation s’était améliorée ces dernières semaines, notamment depuis le Conseil européen extraordinaire du 23 avril 2015, où de nombreux pays avaient décidé d’envoyer des bateaux en Méditerranée pour "sauver des vies" après les drames du mois d’avril. Le ministre Asselborn a plaidé pour faire avancer le débat au Conseil de sécurité des Nations Unions sur la lutte contre les passeurs. Harlem Désir a pour sa part rappelé que la France n’était "pas favorable à la notion de quotas" car "l’accueil des réfugiés politiques relève de conventions internationales" qui définissent sur base des risques encourus par chaque réfugié si l’asile doit lui être accordé ou non. Le secrétaire d’Etat a davantage plaidé pour "combattre les réseaux de trafiquants".
Au sujet de la politique de développement, Jean Asselborn et Harlem Désir ont rappelé l’enjeu d’importance qui se déroulera à Paris du 30 novembre au 11 décembre 2015, à savoir la 21e Conférence des Parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (ou COP21). Le ministre a rappelé que le Luxembourg allait "coopérer avec la France" et œuvrer en vue d’une "bonne coopération dans l’UE". Harlem Désir a pour sa part souligné que la France avait "besoin de l’appui de la Présidence luxembourgeoise", tout en insistant sur la nécessité que "l’Europe soit mobilisée pour que la conférence soit un succès".
Enfin, en matière de compétitivité et de transparence fiscale, le ministre Asselborn a annoncé que le Luxembourg allait "tout faire pour combattre l’évasion fiscale et lutter contre la fraude fiscale", par exemple en travaillant de concert avec l’OCDE pour mettre en place un "level playing field" en la matière, et en œuvrant pour faire avancer le dossier sur l’échange automatique de rulings pour lequel la Commission a fait une proposition le 18 mars 2015. Harlem Désir a souligné le fait qu’il s’agissait d’un enjeu "décisif" pour la France, notamment pour le "financement des services publics et l’équité entre les Etats membres".
Jean Asselborn et Harlem Désir ont évoqué la situation de la Grèce et se sont entendus sur le fait que le pays devait pouvoir rester dans la zone euro. Le ministre a indiqué que "l’Europe devait être capable de trouver des solutions dans les prochains jours", tout en soulignant le fait que les Grecs avaient "le droit de vivre dans la dignité", avec des salaires et des pensions de retraites "assez élevés pour vivre". Harlem Désir a lui aussi rappelé la nécessité de déboucher sur un accord "très rapidement", tout en "respectant les aspirations des citoyens grecs" et a appelé à la "cohésion dans la zone euro".
Au sujet de la Grande-Bretagne, dont le Premier ministre David Cameron a promis d’organiser un référendum d’ici à fin 2017 sur le maintien ou la sortie du pays de l’UE, la France et le Luxembourg partagent également le souhait que le pays se maintienne dans l’Union européenne. "Nous devons tout faire pour que le Royaume-Uni reste dans l’UE mais le Royaume-Uni doit respecter ce qu’est l’UE dans sa totalité", a souligné Jean Asselborn.
Enfin, en matière de politique internationale, le ministre et le secrétaire d’Etat ont évoqué le conflit ukrainien. Jean Asselborn a indiqué que la Présidence luxembourgeoise aura été une "bonne présidence" si, au 31 décembre, l’isolement de la Russie aura pris fin et les sanctions à l’encontre de la Russie seront levées. Harlem Désir a pour sa part évoqué la nécessité de "faire progresser notre politique de sécurité et de défense commune", au vu des nombreux défis qui préoccupent l’UE actuellement.