Sur la base d'un rapport d'avancement de la présidence slovaque, le Conseil a notamment abordé la réforme du système d'asile commun, suggérée le 6 avril 2016 par la Commission européenne.
Les ministres ont entériné l'approche en trois points suggérée par la Présidence pour examiner le système d'asile européen commun :
Le ministre allemand de l'Intérieur, Thomas de Maizière a déclaré espérer l'adoption de ce nouveau système à la fin de 2017 ce qui serait "un très bon tempo", alors que "le système actuel a montré durant la crise qu'il n'était pas adapté en pratique".
Toutefois, il n'y a pas eu d'avancée concernant la relocalisation et la réinstallation des migrants à l'intérieur de l'UE La Pologne et la Hongrie, ont de nouveau estimé que la solidarité ne pouvait pas être obligatoire et ont mis en avant leur concept de "solidarité flexible". Selon le ministre polonais, Mariusz Blaszczak, la position de la Commission a désormais clairement changé en faveur des pays de Višegrad. Le ministre de l'Intérieur slovaque, Robert Kalinak a fait remarquer que plusieurs pistes avaient déjà été évoquées ces derniers temps au sujet de ce concept.
Le ministre autrichien de l'Intérieur, Wolfgang Sobotka, a semblé lui aussi valider l'idée défendue par le groupe de Višegrad, en déclarant : "Si nous voulons mettre en place un système de Dublin commun, nous devons prendre en compte les différentes réflexions des uns et des autres". "C'est comme dans une famille : il y a des gens, qui ont plus de force, pour porter quelque chose, et les enfants en ont peut-être moins", a-t-il ajouté.
Au contraire, le ministre allemand de l'Intérieur, Thomas De Maizière a émis des réserves, confiant qu'il attendait encore de savoir ce que signifiait ce concept. "Ce ne peut être une solidarité à la carte. Si c'est une solidarité reposant sur un partage des tâches, alors je commencerai à y réfléchir", a-t-il prévenu.
Le ministre italien de l'Intérieur, Angelino Alfano, est ressorti agacé de la réunion, face à l'absence d'avancée. "Que ce soit clair : l'Italie n'est pas prête à devenir le hotspot de l'Europe, elle ne deviendra pas l'Ellis Island de l'Europe", a-t-il dit, en déplorant que les autres Etats membres ne remplissent pas leurs devoirs de relocalisations alors que l'Italie a fait le sien, dans l'enregistrement et la gestion des arrivées.
Concernant le règlement Eurodac, la base de données qui répertorie les empreintes digitales de tous les demandeurs d'asile et immigrés illégaux, les ministres ont confirmé leur soutien pour un accès plus large et simplifiée aux données par les autorités policières.
Ces deux derniers ministres ont l'un et l'autre évoqué la nécessité d'une plus grande collaboration avec les pays africains afin de pouvoir rapatrier dans les pays tels la Lybie et l'Algérie, les migrants secourus en mer. Le ministre allemand de Maizière a cité l'accord conclu avec la Turquie comme un exemple en la matière. Dans ce pays, le cas des migrants serait étudié, et des "contingents généreux" seraient répartis entre Etats européens, tandis que les autres devraient rejoindre leur pays d'origine.
Un rapport fourni par la Présidence slovaque indiquait également les difficultés rencontrées sur le terrain par le Bureau européen d'appui en matière d'asile (EASO), mais aussi Frontex et Europol, dans la gestion des arrivées de migrants en Italie et en Grèce. Les périodes de détachement d'experts par les Etats membres sont jugées trop courtes, tandis que leur profil ne convient pas toujours. Les ministres de l'Intérieur ont décidé notamment de la hausse du nombre d'experts fournis par les Etats membres aux agences, en particulier à l'EASO. "Néanmoins, nous atteignons des limites pour ce qui est de trouver les experts disponibles ayant le bon profil. Nous avons besoin de l'EASO pour former nos experts", a dit Robert Kaliňák, ministre de l'Intérieur de la Slovaquie, en charge de la présidence du Conseil, en soulignant bien que le problème était celui d'un "manque de capacité et non de volonté politique".
Concernant la future Agence européenne de l'asile, les délégations ont accepté que le mécanisme de surveillance soit similaire au test de vulnérabilité prévu dans le règlement sur l'Agence de garde-côtes et garde-frontières. A ce dernier propos, la France et l'Allemagne ont par ailleurs demandé l'organisation "le plus rapidement possible" d'un exercice "grandeur réelle" de la nouvelle agence de gardes-frontières et de gardes-côtes européens, lancée officiellement le 6 octobre.
Les ministres ont aussi échangé au sujet du règlement modifiant le Code frontières Schengen qui vise à appliquer des contrôles systématiques (sur la base des fichiers policiers européens et nationaux) sur toutes les personnes franchissant les frontières Schengen, y compris les ressortissants européens. Cette proposition, faite à la suite des attentats de Paris du 13 novembre 2015. Elle a fait l'objet d'un accord lors du Conseil JAI du 25 février 2016, et les négociations avec le Parlement européen ont commencé au mois de juillet suivant.
Le Parlement européen souhaite augmenter les possibilités de dérogations mais aussi introduire une clause de caducité qui limiterait à cinq ans, l'autorisation de ces contrôles systématiques. "On a discuté des contrôles systématiques aux frontières extérieures, on n'est pas entièrement d'accord avec le PE, mais il est essentiel que la sécurité soit prioritaire", a dit le ministre de l'Intérieur slovaque, Robert Kalinak. Il faut que le "Parlement européen intègre le fait que si nous témoignons de la moindre faiblesse dans la mise en œuvre de cette mesure que nous avons mis du temps à prendre, la crédibilité de l'Europe, des institutions européennes, des gouvernements européens, dans le domaine de la protection de leurs ressortissants face au risque terroriste s'en trouvera fortement obérée, et ce dans un contexte où montent les populismes", a déclaré le ministre français de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve.
Par ailleurs, le ministre allemand de l'Intérieur, Thomas de Maizière, et son homologue autrichien, Wolfgang Sobotka, ont plaidé pour une prolongation de six mois de l'autorisation des contrôles réintroduits à l'intérieur de l'espace Schengen par cinq pays confrontés à un afflux migratoire (Allemagne, Autriche, Danemark, Suède, Norvège), alors que l'échéance de cette mesure exceptionnelle arrive le 12 novembre. Les cinq pays concernés ont prévu d'adresser une lettre à la Commission en ce sens. Le Conseil doit décider sur proposition de la Commission.
Enfin, le Conseil a adopté le règlement relatif à l'établissement d'un document de voyage européen destiné à faciliter le retour et la réadmission des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire des États membres. Le renforcement des éléments de sécurité et des spécifications techniques du document de voyage européen destiné au retour devrait faciliter sa reconnaissance par les pays tiers et donc accélérer la procédure de retour.
“Le manque de documents de voyage valides a été l'un des principaux obstacles aux retours. Avec ce nouveau document, nous introduisons un format européen uniforme avec des éléments de sécurité renforcés qui devraient faciliter l'acceptation de ce document par des pays tiers", a expliqué à cette occasion, Dimitri Avramopoulos. "Il est désormais crucial de construire de bonnes relations avec les pays d'origine”, a fait remarquer Robert Kaliňák.