L’Union des Entreprises Luxembourgeoises (UEL), qui regroupe l’Association des Banques et Banquiers, Luxembourg, l’Association des Compagnies d’Assurances, la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, la Chambre des Métiers du Grand-Duché de Luxembourg, la Confédération Luxembourgeoise du Commerce, la Fédération des Artisans, la Fedil – Business Federation Luxembourg, la Fédération Nationale des Hôteliers, Restaurateurs et Cafetiers, (UEL) a répondu le 9 février 2011 par une prise de position à la consultation publique de la Commission européenne "Vers un acte pour le marché unique".
La Commission européenne a consulté les parties intéressées pour recueillir des contributions sur la relance du marché unique sur 50 mesures qu’elles a proposées dans une communication.
Pour l’UEL, la mise en place d’un marché unique efficace et d’une stratégie claire et cohérente pour assurer son bon fonctionnement est essentielle. Il devrait avoir comme objectif premier d’accroître la compétitivité des entreprises et de favoriser une croissance intelligente, durable et inclusive, conformément aux objectifs de la Stratégie Europe 2020. Pour assurer le succès de cet acte, le soutien tant des Etats membres, des entreprises que des citoyens est nécessaire.
C’est pourquoi l’UEL insiste sur la nécessité de respecter le principe général préconisé par la Commission de concevoir une "réglementation intelligente". Il ne faut légiférer que si cela apporte une plus-value réelle. Comme ce sont les entreprises qui sont les destinataires de nombreuses législations communautaires dans des domaines extrêmement variés (environnement, fiscalité, concurrence et protection des consommateurs, etc.), il s’agit aussi de veiller à réduire autant que possible les charges qui en résultent.
Il importe également pour l’UEL qu’il y ait concordance entre les principes préconisés par la Commission et les législations finalement adoptées. Si l’on veut par exemple soutenir les PME, il faut que éviter selon l’UEL que les exigences en matière d’étiquetage des produits alimentaires non-préemballés ou les obligations d’information et de formations en matière de sécurité et de santé ne soient disproportionnées ou pas adaptées aux réalités des PME concernées. L’UEL demande aussi une concordance claire entre les différentes législations communautaires lorsqu’elles traitent d’un même sujet.
L’UEL recommande à la Commission de se concentrer sur l’établissement d’un cadre général favorable aux mouvements transfrontaliers et à une élimination des entraves aux libertés fondamentales sur lesquelles le marché intérieur est fondé. Elle doit donc éviter des approches purement sectorielles du marché intérieur qui comporte un risque de fragmentation et de frein à son développement.
L’UEL considère que les 50 mesures proposées restent souvent "très générales et floues". Ses réponses sont de ce fait à considérer comme des réflexions préliminaires, et elle attendra la publication des textes annoncés avant de se prononcer plus en détail.
Parmi les 50 mesures, l’UEL pense que certaines sont prioritaires, qu’elle peut en soutenir d’autres et qu’il y en a qu’elle ne peut pas soutenir. Finalement, il y des mesures qui font défaut.
L’UEL est pour l’introduction d’un brevet de l’UE, car elle estime qu’une fragmentation du système des brevets entrave significativement l’innovation.
Elle est pour la mise en place d’un véritable marché unique des services. La libre circulation des services se doit d’être assurée au même titre que la libre circulation des biens.
Elle veut notamment que l’UE favorise le développement du commerce électronique transfrontalier au sein du marché intérieur et supprime toutes les barrières existantes qui limitent encore l’accès des consommateurs et des entreprises.
Il faut notamment trouver selon l’UEL une solution adéquate au problème de la fragmentation des règles protectrices des consommateurs qui font actuellement exception à la clause de "marché intérieur" de la directive 2000/31/CE, qu’elle juge pourtant fondamentale pour les échanges intracommunautaires électroniques. Cette fragmentation légale amène selon l’UEL des professionnels à renoncer à réaliser des transactions avec des consommateurs d’autres Etats membres.
L’UEL partage le constat général de la Commission que la réalisation d’un système de transport européen unique, interconnecté, durable et performant est important pour assurer la mobilité fluide des biens, des personnes et des services. Il est donc à ses yeux indispensable de changer de politique de transport en Europe.
La Commission devrait promouvoir la multi-modalité qui respecte l’apport de la route dans les chaînes logistiques et qui peut améliorer le rail et le fluvial. En aucun cas, l’UEL ne veut que le transport de marchandises par voie routière soit pénalisé ou discriminé à travers l’outil fiscal. En outre, des efforts particuliers doivent être déployés afin de libéraliser le marché du fret ferroviaire à l’échelle européenne.
L’UEL soutient la proposition de la Commission de vouloir adopter en 2011 un plan d’action pour améliorer l’accès des PME aux marchés des capitaux.
Pour que le marché unique fonctionne correctement, l'intégration électronique et la création d'un marché unique numérique véritable sont pour l’UEL primordiales. L'interopérabilité et la reconnaissance mutuelle des dispositifs nationaux d’identification et d’authentification électroniques sont nécessaires pour une utilisation efficace des services publics en ligne au-delà des frontières.
L’UEL soutient aussi la proposition de la Commission qui consiste à adopter une stratégie sur l'infrastructure énergétique pour contribuer au développement d'un marché unique complètement intégré et opérationnel de l'énergie.
En ce qui concerne les retraites du deuxième pilier, l’UEL considère l’adoption de la directive sur les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle comme un progrès notable. Des barrières continuent cependant d’exister au niveau des activités transfrontalières. Pour l’UEL, il n’existe pas non plus de définition commune de ce concept au niveau des Etats membres que la Commission devrait introduire.
En ce qui concerne la volonté de la Commission de réduire la durée moyenne de traitement des dossiers d’infraction, l’UEL souligne le rôle important des réseaux de résolution de problèmes, tels que SOLVIT, qui peuvent aider les entreprises et les citoyens à surmonter des problèmes rattachés à la législation du marché intérieur.
L’UEL soutient la proposition de la Commission pour lutter contre la contrefaçon et le piratage des produits et des moyens de paiement qui pénalisent le commerce et l’industrie et freinent l’innovation.
La simplification et la modernisation des règles européennes ont rendu l'attribution des marchés publics plus fluide. Néanmoins, l’UEL trouve que, dans certains Etats membres, les conditions de participation aux marchés publics restent assez lourdes, constituent des entraves administratives non négligeables pour les entreprises étrangères et compliquent l’accès à ces marchés. La directive européenne actuelle n’offre pour l’UEL pas assez de garanties pour que les entreprises étrangères ne soient pas écartées des marchés.
L’UEL scrute le projet de la Commission d’adopter en 2011 une initiative législative sur les concessions de services sous l’angle des transports de services publics où le Luxembourg ne dispose pas d’une législation-cadre.
L’UEL accueille favorablement une réflexion sur l'avenir de TVA et se positionnera par rapport au livre vert sur l’avenir de la TVA publié le 1er décembre 2010. Elle soutiendrait des mesures qui diminueraient les charges administratives des entreprises et réduiraient la fraude à la TVA au sein de l’Union. L’UEL plaide aussi pour le maintien des taux de TVA réduits en général et les services à forte intensité de main d’œuvre en particulier.
L’UEL accueille favorablement la proposition de la Commission de mettre en place un réseau interconnectant les registres des sociétés des différents Etats membres. Cette mesure pourrait faciliter l'accès aux renseignements pour les entreprises, les consommateurs et les pouvoirs publics, réduire les coûts pour les entreprises et améliorer les activités transfrontières des entreprises dans l'ensemble.
En matière d’importations, l’UEL trouve que la politique actuelle de l’UE est trop contraignante, non transparente et parfois imprévisible pour les opérateurs économiques. L’UEL pense que les mesures antidumping, antisubventions et de sauvegarde au niveau européen sont trop nombreuses et coûteuses et ont un impact négatif sur le commerce et les intérêts des consommateurs.
L’UEL ne soutient pas le projet de la Commission d’adopter une proposition législative en 2011 qui veut améliorer la mise en œuvre de la directive sur le détachement des travailleurs, et qui pourrait inclure une clarification de l'exercice des droits sociaux fondamentaux dans le contexte des libertés économiques du marché unique, une façon d'aborder la question des jugements de la Cour de Justice de l'UE en la matière dans la logique patronale. Pour l’organisation patronale, la Commission devrait se limiter à donner des clarifications sur cette directive et à veiller à l’exécution efficace de celle-ci dans les Etats membres.
L'UEL ne veut pas non plus d'une révision des systèmes de reconnaissance des qualifications. Elle invite en revanche la Commission à analyser les domaines d'intérêt dans lesquels l'application cohérente des règles communes existantes fait défaut et donne lieu à des véritables obstacles au développement économique et entrepreneurial.
La Commission veut développer une "carte Jeunesse en mouvement" qui facilitera la mobilité de tous les jeunes pour étudier dans un autre Etat membre. Elle veut aussi assurer la mise en œuvre du cadre européen de qualifications en partenariat avec les Etats membres. Elle essaiera de promouvoir et de valider la formation en dehors de l'école ("non formal and informal learning") et proposera également la création d'un "passeport européen des compétences" qui permettra à chacun de détailler ses savoirs et ses compétences acquises tout au long de la vie. Finalement, elle veut établir une passerelle entre le cadre européen des certifications et la nomenclature des métiers ("occupations") en Europe. L’UEL soutient en principe les initiatives prises dans ce domaine, mais les trouve "assez floues au stade actuel". Elle veut que soit veillé à la "cohabitation" avec les systèmes et instruments existants, à la transparence pour l’utilisateur (le particulier et l’entreprise), et à la situation particulière du Luxembourg dans la Grande Région ("régionalisation du marché de l’emploi et du monde de la formation").
Concernant les obstacles fiscaux auxquels sont encore confrontés les citoyens européens, l’UEL souligne que le Luxembourg accueille un nombre important de travailleurs frontaliers et qu’elle veillera à ce que ces frontaliers ne fassent pas l’objet d’une discrimination fiscale, voire d’une double imposition pour certaines catégories de revenus.
A la Commission qui veut présenter début 2011 une stratégie sur l'élargissement du système d'information du marché intérieur (IMI) à d'autres domaines législatifs, l’UEL répond qu’il y a lieu, avant de procéder à un élargissement du système d’information du marché intérieur, de veiller à ce que ce dernier fonctionne vraiment. En effet, malgré les efforts entrepris par certains Etats-membres, l’IMI, censé permettre la coopération entre les administrations des Etats membres dans le cadre de la directive service, fonctionne actuellement et selon l’UEL de manière insuffisante, avec des délais de réponse sont trop longs ou pas de réaction de la part des administrations nationales
La Commission soumettra en 2011 une initiative sur l'usage de modes alternatifs de règlement des différends dans l'UE et adoptera une recommandation sur le réseau de systèmes de règlements alternatifs des différends pour les services financiers. D'ici 2012, la Commission proposera un système européen de résolution des conflits en ligne pour les transactions numériques. La Commission conduira par ailleurs en 2010-2011 une consultation publique sur une approche européenne des recours collectifs, afin d'identifier les modalités qui pourraient s'inscrire dans le cadre juridique de l'Union européenne et dans les ordres juridiques des Etats membres. L’UEL soutient cette proposition qui vise à améliorer l'utilisation des modes alternatifs de règlements des différends dans l’UE, mais elle ne veut pas de l’introduction au niveau communautaire d’un système de recours collectifs contraignant ou non. Le recours collectif est une procédure complexe et l’UEL constate que de nombreux Etats membres n’ont aucune culture juridique en la matière. L’UEL considère en outre que les avantages espérés de cette procédure sont sans commune mesure avec les inconvénients que celle-ci pourra engendrer, à savoir des risques d’actions non fondées, des dommages et intérêts punitifs ou des coûts excessifs. En fait, l’UEL craint l’instauration en Europe d’une culture des litiges "à l’américaine".
L’UEL accueille favorablement la volonté de la Commission de renforcer la consultation et le dialogue avec la société civile (consommateurs, ONG, syndicats, entreprises, épargnants, utilisateurs et collectivités territoriales) dans la préparation et l'implémentation de textes législatifs, de préférence à un stade précoce.
L’UEL salue la volonté de la Commission de poursuivre la promotion d’un guichet unique plus transparent et plus accessible aux entreprises et aux citoyens. En effet, la mise en place d’un tel guichet unique fournissant ainsi à un seul endroit toutes les informations relatives au marché intérieur simplifierait les démarches administratives des entreprises qui représentent un coût non négligeable pour ces dernières
L’UEL a participé à la consultation sur le livre vert de juillet 2010 sur les retraites. Elle a été et continue d’être d’avis qu’il n’appartient pas à l’UE d’harmoniser les règles concernant les régimes de retraites. Pour l’UEL, l’ambition de l’UE doit rester au niveau de la coordination des législations nationales. Les Etats membres doivent rester souverains dans ce domaine de compétences en raison des particularités concernant l’organisation de la prévoyance contre la vieillesse dans les Etats membres.
La Commission veut adopter, début 2011, une initiative législative sur l'accès à certains services bancaires de base. L’UEL se dit consciente de la nécessité de combattre l’exclusion financière au XXIe siècle et que chaque citoyen européen devrait avoir accès à un compte en banque pour effectuer les transactions de base. Mais elle s’oppose à ce que l’on impose à toutes les banques européennes l’obligation d’accepter tous les citoyens européens comme clients. Une telle obligation irait fondamentalement à l’encontre de la liberté contractuelle dans la mesure où elle nie le droit d’un institut de crédit d’accepter ou non d’entrer en affaires avec un client donné et qu’elle anéantit des "business models" entiers de plusieurs types de banque (p.ex. banque privée ; banque d’affaires ; …). Il semble à l’UEL que l’accès aux services bancaires de base pour chaque citoyen soit garanti dès lors que, dans chaque Etat membre, il y ait au moins une banque qui offre ce service à chaque citoyen ou qu’en cas de plainte l’autorité compétente au niveau national désigne une banque qui offrira ce service à un citoyen donné.
Quant à l’idée de la Commission d’inviter le secteur bancaire à présenter une initiative d'autoréglementation visant à améliorer la transparence et la comparabilité des frais bancaires d'ici fin 2011, l’UEL n’est pas sûre non plus que l’autoréglementation soit le moyen approprié. Un tel système impliquerait un contrôle par une association privée de ses membres tout en ne disposant pas des moyens nécessaires pour l’exercer.
L’UEL ne partage pas l’idée de la Commission proposera de créer un marché unique intégré pour le crédit hypothécaire avec un niveau élevé de protection des consommateurs. Elle estime que les clients qui s’engagent sur un crédit hypothécaire ont généralement tendance à préférer un partenaire bancaire local avec qui ils ont une relation de confiance. L’UEL doute qu’un marché unique intégré pour le crédit hypothécaire soit une nécessité sur le terrain.
Si l’UE veut mieux légiférer, elle devrait mettre en avant le principe de reconnaissance mutuelle dans le processus législatif comme une solution efficace aux problèmes de fragmentation légale qui existent dans différents domaines au sein du marché intérieur.
Dans le domaine du commerce international, qui est selon l’UEL un des moteurs de la croissance, de l’emploi et de l’investissement dans l’UE, l’organisation patronale soulève les problèmes des contrats d’exclusivité. Ainsi, certaines sociétés multinationales imposent, par le biais des contrats d’exclusivité, un fournisseur déterminé aux entreprises luxembourgeoises. Cela empêche ces dernières de profiter pleinement des bénéfices du marché intérieur et les met dans une situation clairement désavantageuse vis-à-vis de leurs concurrents étrangers. L’UEL pense qu’il est essentiel de rechercher et de résoudre ce type d’obstacles dans le cadre d’une saine concurrence au sein du marché intérieur.
L’UEL est également d’avis que la Commission doit mettre en avant la dimension "commerce de détail" qui est pour les consommateurs l’aspect le plus tangible du marché intérieur.
Autre particularité à la fois luxembourgeoise et européenne : l’importance du commerce régional pour le Luxembourg. C’est là que la disparition des obstacles dans le cadre de l’intégration européenne devient sensible, puisqu’il s’agit d’espaces économiques nationaux et régionaux proches des acteurs concernés (entreprises et consommateurs).
L’UEL est pour la flexicurité comme socle commun du marché du travail européen et "met en garde contre une protection accrue et dès lors excessive de l’emploi". Pour l’organisation patronale, "la sécurité de l’emploi dépend avant tout de la viabilité économique de l’entreprise et non d’une protection de l’emploi des salariés".
Elle veut également que les institutions européennes "continuent à donner des impulsions vers plus de flexibilité dans des matières comme le temps de travail".
Elle s’oppose aussi à d’éventuelles initiatives qui pourraient rendre plus restrictives les dispositions entourant les contrats de travail dits atypiques (exemple : contrat à durée déterminée, contrat de travail intérimaire). Cela reviendrait à enlever une part importante de flexibilité dont l’UEL estime que les entreprises disposent.
Reste que l’UEL est partisane de la subsidiarité, et de ce fait la compétence principale pour moderniser le droit du travail relève pour elle nécessairement des Etats membres en raison des liens étroits avec le droit du travail, les systèmes de protection sociale, les politiques actives du marché du travail, et le dialogue social, qui sont principalement conçus au niveau national.