Etienne Schneider, ministre de l’Economie et du Commerce extérieur, représentait le Luxembourg à l’occasion du Conseil Compétitivité qui s’est tenu à Bruxelles les 18 et 19 février 2013.
En matière de recherche, les ministres ont débattu du libre accès aux informations scientifiques publiées dans le cadre de projet de recherche cofinancé par l’UE, un sujet qui est un des objectifs du développement d’un Espace européen de la Recherche. Le Conseil a aussi permis de faire le point sur les activités de programmation conjointe en matière de recherche et sur le projet ITER.
Les ministres ont ensuite discuté de l’examen annuel de croissance 2013 en préparation du Conseil européen des 14 et 15 mars, un débat qui s’inscrit dans le cadre du semestre européen. Les ministres ont aussi eu un échange de vues sur le plan d’action esquissé par la Commission pour favoriser l’esprit d’entreprise, et ils ont discuté par ailleurs de la réforme du système REACH pour laquelle la Commission vient tout juste de mettre ses propositions sur la table.
Les ministres ont aussi fait le point sur l’intégration du marché intérieur, et notamment sur l’avancement des différentes réformes prévues dans le cadre des Actes pour le marché unique I et II, considérées comme des mesures prioritaires en termes de stimulation de la croissance et de création d’emploi.
Dans un rapport récent, la Commission européenne a constaté que le marché intérieur ne permet pas toujours aux entreprises de profiter pleinement d’un grand marché sans frontières, rapportent les services du Ministère de l’Economie dans un communiqué de presse. Ainsi, dans le secteur de la distribution, les entreprises luxembourgeoises n’ont souvent pas le choix de s’approvisionner auprès d’un intermédiaire de leur choix dans le pays de leur choix, et ne peuvent ainsi pas acheter au meilleur prix. Ceci a un effet sur le prix final des produits – souvent plus chers au Luxembourg que dans les pays voisins. L’occasion pour Étienne Schneider d’annoncer son souhait de pouvoir bénéficier de l’appui de la Commission européenne pour prendre des actions visant à faire baisser les prix au Luxembourg.
Les ministres ont aussi abordé la question de la sidérurgie européenne, un sujet qui avait été à l’ordre du jour d’une importante réunion convoquée par la Commission européenne le 12 février dernier. Ils ont donc notamment discuté de l’adoption d’un plan d’action pour soutenir l’industrie sidérurgique en Europe. "J’ai appelé la Commission européenne à présenter le plus rapidement possible un plan d’action, car nous devons agir au plus vite" a expliqué Étienne Schneider à l’issue du Conseil, rapportant par voie de communiqué que le vice-président de la Commission européenne, Antonio Tajani, s’était engagé à faire du soutien à la sidérurgie une priorité de son action. La Commission a prévu de présenter ce plan d’action, qui sera nourri des recommandations qu’elle a formulée à l’issue de la table-ronde du 12 février 2013, au mois de juin prochain.
Le jour même, Antonio Tajani rencontrait Lakshmi Mittal, qui n’était pas venu en personne à la réunion du 12 février, malgré la demande qui avait été faite en ce sens par les ministres belge, français et luxembourgeois. La table-ronde avait été l’occasion toutefois de demander à ArcelorMittal de reporter sa décision de fermer des sites en Europe en attendant la présentation d'ici à l'été d'un plan d'action européen pour l'acier, mais le groupe avait répondu par une fin de non-recevoir.
Quelques heures après ce Conseil, ArcelorMittal annonçait par voie de communiqué qu’il attendait "d'examiner le plan européen pour l'acier qui sera lancé en juin 2013" et confirmait qu’il ne procéderait "pas à d'autres restructurations que celles annoncées jusqu'ici". "L'Europe a besoin d'un plan ambitieux en faveur de l'acier avec des mesures et des actions concrètes, qui place l'industrie sidérurgique dans la meilleure position pour s'adapter à la nouvelle réalité en Europe, avec une demande qui est 30 % en-deçà de ses niveaux en 2007", plaide le géant de l’acier.
Mais "dans le cas où la situation se détériore davantage, nous prendrons contact avec la Commission européenne", prévient-il toutefois, tout en demandant aux gouvernements et aux syndicats "de contribuer de manière constructive à l'amélioration de la situation actuelle et de contribuer à l'élaboration du plan d'action pour l'acier".
"ArcelorMittal a pris trois engagements", a résumé Antonio Tajani devant la presse. "Les sites de Florange et Liège ne seront pas fermés, il y aura une réduction de capacité, qui sera toutefois accompagnée d'un plan d'investissement de 180 millions d'euros pour Florange et d'environ 140 millions d'euros pour Liège. Les sites deviendront hautement spécialisés dans des produits haut de gamme pour des secteurs comme l'automobile ou l'emballage". "Les personnels de Florange et Liège affectés par la réduction de capacité auront la possibilité volontaire d'être réaffectés à d'autres sites d'ArcelorMittal", a poursuivi le commissaire européen.
Le commissaire européen a salué ces engagements comme "un pas dans la bonne direction". "Je crois que d'autres acteurs comme les gouvernements et les syndicats doivent aussi donner des pas dans la bonne direction. Surmonter cette crise est une tâche collective", a-t-il conclu.
A l’occasion d’un déjeuner informel auquel participait le commissaire en charge de la concurrence, Joaquin Almunia, les ministres ont discuté de la réforme engagée par la Commission portant sur les aides d’Etat. "Les propositions actuelles de la Commission européenne vont réduire, dans certains domaines, les possibilités des États membres à intervenir financièrement", résume le Ministère de l’Economie dans un communiqué. Étienne Schneider, qui a déjà attiré l’attention sur ce sujet à plusieurs reprises au Conseil, a demandé au commissaire Almunia de ne pas restreindre les possibilités des États membres d’encourager les entreprises à investir. Il a rappelé à quel point il est à ses yeux "tout à fait crucial que les États membres gardent tous les moyens pour stimuler la création de nouveaux emplois, surtout en temps de crise".
La journaliste Marianne Truttmann rapporte à ce sujet dans l’édition du Luxemburger Wort datée du 20 février que le ministre luxembourgeois a notamment annoncé son soutien à la demande franco-allemande de relever le seuil à partir duquel un Etats membre peut fournir une aide d’Etat sans consulter la Commission de 200 000 à 500 000 euros. Elle rapporte aussi que le commissaire s’était montré "plutôt sceptique" à l’égard de cette idée pourtant soutenue, d’après ce qu’a pu lui dire Etienne Schneider, par huit ou neuf Etats membres. La Commission envisage de faire une proposition législative d’ici la fin de l’année.
La journée a enfin été marquée par la signature de l’accord international relatif à une juridiction unifiée du brevet, qui s’est faite en marge du Conseil Compétitivité. Etienne Schneider, qui a signé l’accord au nom du Luxembourg, a salué "un pas historique pour la propriété intellectuelle. "Enregistrer un brevet deviendra plus simple et six fois moins cher", se félicite le ministre convaincu que "cette initiative commune renforcera la compétitivité des entreprises européennes".
Cet accord international fait partie d’un paquet législatif qui clôt les négociations sur le brevet communautaire qui ont commencé dans les années 1960, pour créer une véritable protection uniforme des brevets d’invention en Europe.
Depuis 1978, il existe un "brevet européen" qui permet d’obtenir la protection d’une invention dans 38 Etats du continent européen via une procédure de délivrance centralisée à l’Office européen des brevets à Munich. Dans le système actuel, après la délivrance du brevet, les tribunaux nationaux sont compétents pour trancher les litiges, ce qui implique des coûts judiciaires importants.
Le nouveau régime du brevet à effet unitaire permettra au déposant du brevet d’obtenir un titre de protection uniforme délivré par l’Office européen des brevets, qui sera soumis à un système juridictionnel européen unifié. L’accord, qui relève d’une coopération renforcée, est signé par 24 Etats membres de l’UE mais il reste ouvert à l’adhésion de tout État membre de l'UE qui déciderait ultérieurement d’y participer. A ce stade, seuls la Pologne, la Bulgarie et l’Espagne ne participent pas.
A noter qu’après de longues négociations le Luxembourg a réussi à se voir attribuer la cour d’appel et le greffe de cette nouvelle juridiction du brevet. Le ministre Schneider se félicite tout particulièrement de cette décision, qui renforce la place du Luxembourg comme siège d’institutions internationales. Le ministre estime que quelques 50 à 80 emplois seront ainsi créés au Luxembourg.
Le principal avantage du nouveau système du brevet européen est de baisser considérablement le coût de la protection par brevet en Europe. Avec un régime de traduction allégé et le recours aux traductions par ordinateur, le coût d’obtention d’un brevet au sein de l’Union européenne passera de 32 000 euros actuellement à moins de 5 000 euros.
En fonction des progrès législatifs et opérationnels, le premier brevet européen à effet unitaire pourrait être délivré courant 2014.