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Transports
Libéralisation des services d’assistance au sol : le Parlement européen adopte le projet de règlement de la Commission européenne, en y ajoutant des garanties sur la qualité des services et le transfert de personnel
16-04-2013


Parlement européenLe 16 avril 2013, par 455 voix pour, 239 contre et 18 abstentions, le Parlement européen a adopté une résolution législative sur la proposition de règlement sur les services d'assistance en escale dans les aéroports. Ce texte est l’un des trois projets de règlement qui composent le Paquet Aéroports, présenté par la Commission européenne en décembre 2011. A la différence du projet de règlement sur les créneaux horaires et de celui sur les nuisances sonores, il avait été rejeté par le Parlement européen le 12 décembre 2012..

Le Parlement européen avait ainsi suivi la commission Transports qui, le 6 novembre 2012, s’était exprimée contre cette proposition qui vise à porter de deux à trois le nombre minimal de prestataires de services d’assistance au sol (assistance bagages, opérations en piste, assistance "carburants et huile" et traitement du fret et du tri postal) afin d’améliorer la compétitivité du secteur aérien. Les eurodéputés avaient notamment douté de l’argument de la Commission européenne, selon lequel ces services seraient responsables de 70 % de retard mais aussi craint que cette nouvelle libéralisation n’entraîne du dumping social.

Après le vote au Parlement européen, la Commission Transports avait été chargée de prendre une nouvelle position sur le projet de règlement. Le 19 mars 2013, il s’en était fallu de peu que le nouveau texte soit de nouveau rejeté par les membres de cette dernière. Ce n’est que d’une courte tête (19 voix pour, 17 contre et 8 abstentions) qu’elle avait adopté une proposition qui amendait le texte de la Commission européenne en lui ajoutant des standards minimaux de qualité des services ainsi que des clauses de sauvegarde pour la reprise du personnel et le respect des conventions collectives en cas de changement de prestataire de services. De même, la Commission Transports avait restreint le nombre d’aéroports dans lesquels le règlement s’appliquerait, en portant de 5 à 15 millions, le nombre minimal de passagers, et de 100 000 à 200 000 tonnes, le volume minimal de fret, qui doivent transiter chaque année par un aéroport pour que celui-ci soit concerné par le règlement.

"On ne peut pas vraiment prétendre que cette nouvelle proposition ait su convaincre les députés", avait alors déclaré l’eurodéputé CSV, Georges Bach, soulignant que le nouveau texte ne différait que très peu du premier. Georges Bach se rassurait en imaginant probable que le Parlement européen, durant son vote du mois d’avril, ne rejette de nouveau un texte qui serait ensuite jeté aux oubliettes par le commissaire chargé du transport, Siim Kallas.

Les eurodéputés luxembourgeois, Georges Bach (CSV) et Robert Goebbels (LSAP) sont déçus par le vote du Parlement européen

A l’issue du vote du Parlement européen du 16 avril 2013, qui s’est révélé bien moins bien serré que celui survenu un mois plus tôt au sein de la commission Transports, Georges Bach a rappelé, par un communiqué de presse, à quel point il ne croyait pas aux vertus d’une nouvelle libéralisation. "Au contraire", a-t-il dit, "la pression sur les travailleurs de ce secteur augmentera davantage et une ouverture supplémentaire du marché aura inévitablement pour conséquence le dumping salarial". Les modifications entreprises par la commission Transports ne l’ont pas plus rassuré sur les menaces que le texte ferait peser sur la sécurité des passagers. Cette dernière serait remise en cause par l’engagement futur "d’intérimaires non qualifiés et à bon marché". "Dans un secteur hautement sensible, où des travaux sur la sécurité sont menés, il s’impose d’embaucher exclusivement du personnel bien formé et digne de confiance", estime Georges Bach.

D’ailleurs, la rigueur en matière d’embauche ne serait que la contrepartie d’autres exigences en termes de sécurité: "Nous ne pouvons pas constamment introduire des mesures de sécurité renforcés auprès du personnel navigant et des passagers d’une part, et aller, d’autre part, pour le personnel au sol, dans la direction opposée. Une valeur ajoutée durable pour les entreprises, les employés et les clients, ne sera atteinte qu’à travers une haute qualité de services, à travers l’efficacité et des conditions de salaire et de travail stables. Elle ne naît pas automatiquement d’une compétition renforcée ", pense-t-il.

Dans un communiqué de presse diffusé par le Parlement européen à l’issue du vote, le rapporteur Artur Zasada (PPE, PL), cite parmi les normes minimales de qualité introduites dans la proposition de  règlement amendée, "un temps d'attente maximal pour l'enregistrement des bagages, un temps maximal entre l'arrivée du premier et du dernier bagage ainsi qu'un stock minimal obligatoire de produits de dégivrage ". Par ailleurs, le communiqué de presse souligne qu’ "en cas de changement de fournisseur de services, les États membres devront garantir le transfert du personnel d'assistance vers le nouveau fournisseur ainsi que le respect des accords collectifs ".

Ces modifications ne persuadent pas non plus l’eurodéputé socialiste, Robert Goebbels : "Sur de petits aéroports cela ne mènera pas à plus de concurrence, mais à plus de pression sur le personnel des trois compagnies qui ne pourront survivre que s'ils rognent en permanence leurs coûts", dit-il dans son "explication de vote". Il en profite par ailleurs pour déclarer que "la politique d'aviation de la Commission est une faillite totale". "Tous les aéroports européens et toutes les compagnies aériennes sont en perte de vitesse. L'aviation civile internationale se développe en dehors de l'Europe."

La Commission européenne espère un accord entre le Conseil et le Parlement européen d’ici la fin de l’année 2013

La Commission est néanmoins très satisfaite du vote positif du Parlement européen. Son vice-président, en charge des Transports, Siim Kallas a remercié le Parlement pour "le dur travail réalisé". "Les services au sol comportent une fonction-clé dans la chaîne de l’aviation", a-t-il déclaré le 16 avril 2013.

"Si nous voulons que nos aéroports et nos compagnies restent compétitives, la qualité et l’efficacité des services au sol doivent être améliorés dans l’intérêt des passagers." Siim Kallas souhaite l’ouverture rapide de négociations entre le Conseil et le Parlement pour aboutir à la fin de l’année.

Les conséquences pour le Luxembourg

Dans son communiqué de presse, Georges Bach rappelle que la Chambre des députés avait pris position en amont des débats sur le Paquet Aéroports pour s’opposer à cette tentative de libéralisation qui mettrait en danger le principe de subsidiarité. "A travers cette règlementation, il ne reste en effet plus de marge de manœuvre pour une adaptation du texte de loi aux situations respectives des différents aéroports. Luxembourg devrait s’en tenir aux mêmes prescriptions et procédures que les grands aéroports de Londres ou Francfort, sans que ne soit, à travers cela, atteint une amélioration significative", a-t-il déclaré à l’issue du vote du Parlement européen du 16 avril 2013. Alors que le trafic du fret atteint un volume de 600 000 tonnes par an à l’aéroport national luxembourgeois, la proposition de règlement contraindrait le Luxembourg à introduire un troisième prestataire pour les services au sol alors que, "dans la situation actuelle un deuxième prestataire ne peut déjà pas survivre", note Georges Bach.

Le 30 janvier 2013, dans une réponse à une question parlementaire des députés écologistes Camille Gira et François Bausch, le ministre des Transports, Claude Wiseler, avait expliqué que le gouvernement luxembourgeois ne considère pas opportun de passer d'une directive à un règlement communautaire, que le règlement n’était pas pertinent pour l’aéroport national et enfin que la directive existante contient assez d'éléments pour une mise en concurrence correcte.