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Union bancaire – Un accord provisoire a pu être trouvé sur le mécanisme de résolution unique à l’issue d’une longue nuit de négociations en trilogue
20-03-2014


Le Parlement européen et le Conseil sont parvenus le 20 mars 2014, au terme de seize heures d’intenses négociations, à un accord provisoire sur le mécanisme de résolution unique (MRU ou SRM) de l’Union bancaire qui doit compléter le mécanisme de surveillance unique (MSU) qui sera opérationnel d’ici la fin de l’année.Union bancaire

Les négociations en trilogue avaient pu démarrer début 2014 après que le Conseil avait réussi à s’entendre sur sa position, non sans mal, en décembre dernier.

Cet accord doit maintenant être adopté par le Parlement européen et par les États membres de l’UE au sein du Conseil, qui vote à la majorité qualifiée. Le Parlement européen devrait adopter le texte en séance plénière en avril, puis le Conseil devrait l'adopter formellement à son tour.

Les principaux éléments de l’accord trouvé en trilogue

Dans le cas où une banque serait confrontée à de graves difficultés, le mécanisme de résolution unique permettrait, sans préjudice d’une supervision plus stricte, de procéder efficacement à sa résolution de manière à en minimiser le coût pour le contribuable et pour l’économie réelle.

Le Mécanisme de Résolution Unique s'appuiera sur deux textes : le règlement sur le mécanisme de résolution unique, qui régira l'essentiel du fonctionnement du mécanisme, et un accord intergouvernemental couvrant certains aspects spécifiques du Fonds de résolution unique.

Le règlement sur le mécanisme de résolution unique découle des règles uniformes en matière de résolution de défaillances bancaires énoncées dans la directive sur le redressement et la résolution des défaillances bancaires que la Commission avait mise sur la table en juin 2012 et sur laquelle un accord avait été trouvé en trilogue en décembre 2013, après que le Conseil avait adopté sa position en juin 2013.

Le mécanisme de résolution unique entrerait en vigueur le 1er janvier 2015 et les fonctions de renflouement interne (bail-in) et de résolution s’appliqueraient à compter du 1er janvier 2016, conformément aux dispositions de la directive sur le redressement et la résolution des défaillances bancaires.

Champ d’application

Le mécanisme de résolution unique s’appliquera à toutes les banques relevant du mécanisme de surveillance unique. Le conseil de résolution unique élaborera des plans de redressement et assurera directement la résolution de toutes les banques qui relèvent de la surveillance directe de la BCE ainsi que des groupes bancaires transnationaux.

Les autorités nationales de résolution seront quant à elles chargées des plans de redressement et de la résolution des banques qui opèrent uniquement au niveau national, et à condition qu'il ne soit pas fait appel au Fonds de résolution. Les États membres peuvent par ailleurs choisir de faire relever directement toutes leurs banques de ce conseil. La décision de faire appel au Fonds reviendra dans tous les cas au conseil de résolution unique.

Prise de décision

Les décisions seront centralisées et prises par un conseil de résolution unique fort, qui inclura des membres permanents comme la Commission européenne, le Conseil, la BCE et les autorités nationales de résolution.

Dans la plupart des cas, la BCE notifiera la défaillance d’une banque au conseil de résolution et à la Commission ainsi qu'aux autorités de résolution nationales. Le conseil de résolution déterminera ensuite s'il existe une menace d'ordre systémique et si une solution alternative venant du secteur privé de type "bail-in" est envisageable. Si ce n'est pas le cas, il adoptera un plan de résolution mettant en œuvre, en fonction des besoins, des outils de résolution et les ressources du Fonds.

Le Parlement européen, qui s’était montré très attaché à une prise de décision efficace, se félicite du fait que la BCE constituera donc le principal organisme "déclencheur" et que le Conseil pourra prendre cette responsabilité si la BCE hésite à agir.

En vertu de cet accord, la Commission est responsable de l'appréciation des aspects discrétionnaires de la décision du conseil de résolution, et d'approuver ou de faire des objections au plan de résolution. La décision de la Commission est sujette à l'approbation ou aux objections du conseil seulement si on modifie le montant des ressources tirées du fonds de résolution ou si la résolution de la banque ne porte pas atteinte à l'intérêt général. Le plan sera ensuite mis en œuvre par les autorités nationales de résolution. Si la résolution comporte une aide d’État, la Commission devra autoriser cette aide avant que le conseil de résolution n'adopte le plan de résolution.

Sur ce point, le Parlement européen souligne que le Conseil  ne sera impliqué que sur demande expresse de la Commission, de façon à "éviter des interférences politiques", une préoccupation majeure pour les députés.

Gouvernance du conseil de résolution et modalités de vote

En plénière, le conseil de résolution prendra toutes les décisions de nature générale ainsi que les décisions de résolution individuelles qui impliquent le recours, au-delà d'un seuil de 5 milliards, aux ressources du fonds de résolution unique.

Il prendra en session exécutive les décisions concernant des entités ou groupes bancaires particuliers et pour lesquelles le recours au fonds de résolution reste en-deçà de ce seuil. En session exécutive, le conseil de résolution comprendra un président, un directeur exécutif et trois autres membres permanents, la Commission et la BCE étant des observateurs permanents.

En outre, pour que les intérêts de tous les États membres concernés par la résolution soient représentés, cette session comprendra d'autres membres en fonction de l’établissement faisant l'objet d'une résolution. Aucun participant aux délibérations n'aura le droit de veto.

Pour le Parlement européen, il importait de réduire le délai de prise de décision pour la mise en place du mécanisme de résolution, tout comme il était essentiel de simplifier le processus. "Le dispositif de résolution pourrait, par conséquent, être approuvé en un week-end, entre la fermeture des marchés américains et l’ouverture des marchés asiatiques", se félicite le Parlement européen après cet accord.

Fonds de résolution

Le règlement sur le mécanisme de résolution unique prévoit la constitution d'un Fonds de résolution auquel contribueront toutes les banques des pays participants. Le niveau du Fonds doit s'établir à 55 milliards, et il peut emprunter sur les marchés sur décision du Conseil de résolution dans sa configuration de plénière.

Le Parlement européen se félicite d’avoir pu obtenir qu'"un système permettant au fonds de résolution unique d’emprunter sera mis en place avant l’entrée en vigueur du règlement". Un tel mécanisme devrait renforcer la capacité d’intervention du fonds, particulièrement essentielle lors des premières années de sa création, soulignent les députés, lorsque le fonds disposera d’une faible capitalisation.

Ce Fonds sera détenu et géré par le conseil de résolution. Son montant cible, à l'issue d'une période de 8 ans, sera d'au moins 1 % de tous les dépôts couverts. Au cours de la période de transition, le Fonds comprendra des compartiments nationaux correspondant à chaque pays participant.

Les ressources accumulées dans ces compartiments seront progressivement mutualisées sur une période de 8 ans, mais 40 % seront mutualisées la première année, 20 % la deuxième année et le reste pendant les six années suivantes. Cette mutualisation rapide des "compartiments nationaux" était une question essentielle que les eurodéputés voulaient résoudre.

C'est le règlement européen qui régira la création du Fonds et de ses compartiments ainsi que les modalités de la prise de décision concernant son utilisation.

Le transfert des fonds nationaux vers le Fonds unique et l'activation de la mutualisation des compartiments résulteront quant à eux d'un accord intergouvernemental à conclure entre les États membres participant au mécanisme de résolution unique.

Réactions

Soulagement du côté de la Commission européenne et du Conseil

Du côté de la Commission européenne, le président, José Manuel Barroso s’est montré soulagé qu’un accord ait pu être trouvé avant les élections européennes, ce qui était son objectif. Michel Barnier, qui suivait le dossier, a pour sa part salué "le travail assidu et l’esprit de compromis des deux colégislateurs" qui a permis d’aboutir à un accord qu’il voit comme "un pas important vers l’harmonisation, au niveau central, à la fois de la surveillance et de la résolution bancaires, mais à laquelle participent tous les acteurs nationaux concernés".

"S'appuyant sur un dispositif approprié de financement des résolutions bancaires et sur un processus de prise de décision acceptable, ce second pilier de l'union bancaire permettra de mieux gérer les crises bancaires", estime le commissaire en charge du Marché intérieur qui précise qu’en cas de défaillance d'un groupe bancaire transnational, un tel mécanisme sera beaucoup plus efficace qu’un réseau d'autorités nationales de résolution bancaire et permettra de prévenir la contagion. "Quoiqu'il puisse être amélioré à certains égards, le Mécanisme de Résolution Unique permettra la résolution rapide et efficace des groupes bancaires transnationaux dans la zone euro, ce qui était l'objectif principal recherché", a-t-il souligné.

Iannis Stournaras, qui conduisait les négociations au nom de la présidence grecque du Conseil, a salué le travail mené par Jeroen Dijsselbloem, sous la férule duquel sont menées les négociations intergouvernementales sur le fonds de résolution unique. Les deux textes étant intrinsèquement liés, comme il l’a souligné, les contributions du président de l’Eurogroupe étaient nécessaires pour parvenir à cet accord, tout comme cet accord va permettre aux ministres des Finances de conclure un accord intergouvernemental sur le fonctionnement du fonds.

Satisfaction du côté du Parlement européen

Du côté du Parlement européen, Elisa Ferreira (S&D) qui a mené l’équipe de négociation du Parlement, s’est félicitée d’un accord qu’elle dit pouvoir “présenter en plénière avec une certaine satisfaction". "L’accord a comblé plusieurs défauts importants de la position initiale du Conseil et je pense qu’il constitue une amélioration non seulement aux yeux d’une majorité de députés mais également de plusieurs États membres", estime la parlementaire qui appelle toutefois à la vigilance "pour s’assurer que les règles de mise en œuvre soient définies et que la capacité d’emprunt du fonds soit traduite en pratique aussi rapidement et efficacement que possible”.

Corien Wortmann-Kool, qui participait aux négociations pour le PPE, a salué notamment le fait que la procédure a été raccourcie pour pouvoir agir vite en cas de faillite bancaire. De même, il importait à ses yeux de réduire toute interférence politique dans la procédure afin d’assurer "que toutes les banques seront traitées de la même manière, quel que soit le pays dans lequel elles sont établies".

Sven Giegold et Phlippe Lamberts, qui représentaient les Verts dans ces négociations, ont tous deux salué une avancée dans cet accord qui va permettre un mécanisme plus rapide et plus efficace, limiter les risques d’interférence politique et va aboutir à une mutualisation assez rapide des compartiments nationaux du fonds de résolution, lequel aura la possibilité d’emprunter. Ils ont toutefois fait part de quelques regrets.

Ainsi Philippe Lamberts note-t-il que "le rôle des États-membres, et donc la possibilité de transformer la décision de résolution d'une banque en discussion de marchands de tapis a été limité essentiellement aux cas des grandes banques systémiques (via le seuil de 5 milliards)". "Concrètement, si Deutsche Bank ou BNP-Paribas devaient être déclarées en résolution, les États seraient impliqués dans le processus de décision", explique-t-il, trouvant cela "regrettable" dans la mesure où "les banques systémiques sont transnationales dans leurs activités, elles devraient le rester lorsqu'il faut les restructurer ou les liquider".

Philippe Lamberts, qui raconte comment se sont déroulées les négociations, dénonce une "hégémonie allemande" qu’il explique par "l'assertivité grandissante de l'Allemagne" et par " l'incapacité et/ou au manque de volonté politique des 27 autres États-Membres de lui tenir tête".

Sur le plan du processus législatif, les Verts dénoncent le "coup d'État rampant contre les institutions européennes" qu’a effectué le Conseil en soustrayant à la codécision une partie du texte via un accord inter-gouvernemental.  "Nous avons été finalement les seuls à véritablement nous opposer à cela dans le cadre de la négociation", déplorent-ils. Les Verts vont donc "examiner de manière approfondie à la fois les textes de l'accord et la solidité (ou non) de la construction législative" avant de prendre position.