Le 30 mars 2015, le commissaire européen en charge de l’Agriculture, Phil Hogan, s’est rendu au Luxembourg pour une visite de travail qui comprenait une réunion au ministère de l’Agriculture, de la Viticulture et de la Protection des consommateurs, une visite auprès de la commission de l’Agriculture, de la Viticulture, du Développement rural et de la Protection des consommateurs de la Chambre des députés, une rencontre avec les représentants du secteur agricole ainsi que la visite de l’exploitation laitière Wirtz-Friederes à Eschweiler, dans la commune de Junglinster.

La fin du système des quotas laitiers de l’UE prévue pour le 1_^er avril 2015 a été un leitmotiv de cette visite à laquelle a participé le ministre luxembourgeois de l’Agriculture, Fernand Etgen.

Quotas laitiers – "Il s’agit maintenant de trouver de nouveaux marchés et, de préférence, ceux aux meilleurs prix", indique Phil Hogan

Pour le commissaire Phil Hogan l’abolition des quotas ne peut surprendre le secteur laitier, car "les producteurs ont eu douze années pour s’y préparer", selon ses propos repris dans une interview publiée en amont de sa visite au Luxembourg par le Lëtzebuerger Bauer. Devant les députés membres de la commission de l’Agriculture, il a signalé qu’en 2014, la production du secteur laitier s’est déjà accrue de 5 %, tandis que le prix du lait est resté stable.

"Il s’agit maintenant de trouver de nouveaux marchés et, de préférence, ceux aux meilleurs prix", a encore souligné Phil Hogan lors de son entrevue avec les députés membres de la Commission de l’Agriculture, selon ses propos repris dans un communiqué de presse diffusé le même jour par la Chambre des députés. Phil Hogan a évoqué les opportunités et les débouchés qui se présentent pour le secteur laitier européen en Extrême-Orient. Ces opportunités doivent selon lui être fructifiées à travers une meilleure politique de promotion. Dans ce contexte, il a cité l’exemple de la Nouvelle-Zélande qui a réussi à devenir un des plus gros exportateurs de lait au monde.

"L'expérience de l’embargo russe sur les produits alimentaires européens illustre l'importance de d’identifier et de développer de nouveaux marchés", avait-il déclaré dans son interview au Lëtzebuerger Bauer. Phil Hogan y soulignait l’importance d’une production alimentaire compétitive pour pouvoir "être concurrentiel sur le marché international" dès lors que les quotas seraient abolis. L'accent doit selon lui être mis sur la recherche et le développement. L’UE ne doit toutefois pas abandonner ses normes élevées dans la production alimentaire, en tentant d’être plus compétitive, avertissait-il.

En ce qui concerne plus précisément le Luxembourg, Phil Hogan s’est dit "optimiste". "Le Luxembourg doit s'adapter, même si tout changement n'est jamais facile", a dit le commissaire dans les locaux de l’exploitation laitière Wirtz-Friederes. "Compte tenu de la force du secteur laitier luxembourgeois et de la qualité de son lait, je reste optimiste quant au fait que l’abolition des quotas constituera à moyen terme une excellente opportunité pour le secteur", avait-il déclaré dans son interview au Lëtzebuerger Bauer.

Le Commissaire a aussi présenté les nouveaux instruments de financement mis à disposition par la Banque européenne d’investissement, notamment dans le domaine de la restructuration du secteur laitier, du soutien à l’investissement des jeunes agriculteurs et de la chaîne d’approvisionnement et de stockage. "J’espère que les jeunes agriculteurs en tireront profit", a-t-il dit.

Pour Fernand Etgen, le secteur laitier du Luxembourg est bien équipé pour la période post-quotas, mais une surveillance du marché reste de mise

"La fin des quotas constitue un moment particulier pour la politique agricole commune", a de son côté déclaré le ministre de l’Agriculture Fernand Etgen, après avoir visité avec Phil Hogan l’exploitation de 230 hectares gérée par la famille Wirtz. Fernand Etgen a aussi vanté les mérites des exploitations familiales pour faire face aux défis qui se posent pour le secteur agricole.

Pour le ministre, le secteur laitier du Luxembourg est bien équipé pour la période post-quotas. Il estime que le Luxembourg dispose de "bonnes infrastructures", aussi bien en ce qui concerne les producteurs que les laiteries, qui ont permis d’avoir déjà accès au marché international. C’est grâce aux investissements importants dans le secteur laitier au cours des dernières années que le Luxembourg se trouve dans une telle situation, a expliqué le ministre. "Nombreux sont les établissements qui ont décidé d’investir encore maintenant", s’est félicité le ministre, en évoquant l’établissement de la famille Wirtz.

Pour Fernand Etgen, une attention particulière doit dans ce contexte être accordée à la production de qualité à forte valeur ajoutée, tournée vers l’exportation. "Les prévisions pour l’avenir indiquent que la demande va augmenter de 2 %", a souligné le ministre. "Il faut en tirer profit", a-t-il dit.

Fernand Etgen a néanmoins souligné la nécessité de bien surveiller l’évolution du marché laitier, sachant que, sans les quotas, celui-ci sera plus volatil, et que par ailleurs, l’embargo russe a mis le marché européen "sous pression".

Enfin, le ministre a salué la possibilité accordée aux agriculteurs de payer le prélèvement sur les excédents de leurs quotas laitiers 2014/2015, par tranches, sans intérêt, au cours d'une période de trois ans. "C’est un mécanisme que nous allons mettre en œuvre au Luxembourg, car plus de la moitié des acteurs sont concernés", a-t-il indiqué. Au Luxembourg, cette année, le prélèvement s’élève à 5 millions d’euros au total, comme l’a indiqué le 31 mars au micro de RTL la directrice de la Centrale paysanne, Josianne Williams.

Autres points évoqués

Fernand Etgen a indiqué sur les lieux de l’exploitation laitière Wirtz-Friederes s’être entretenu avec le commissaire Phil Hogan sur les dossiers agricoles qui se présenteront au cours de la présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE, notamment "la finalisation de la proposition de règlement sur l'agriculture biologique", sur laquelle les ministres européens de l’Agriculture s’étaient déjà penchés le 16 mars 2015, lors d’une réunion du Conseil, mais aussi l’embargo russe sur les produits agricoles européens.

En ce qui concerne l’agriculture biologique, Phil Hogan a indiqué lors de son entrevue avec les députés membres de la Commission de l’Agriculture que l’agriculture biologique est soumise à trop de régimes différents dans l’UE. Face aux 63 standards différents, il faudrait harmoniser les règles afin de mieux faire fonctionner le marché qui, selon Phil Hogan, continue sa croissance. L’agriculture biologique offrirait de bonnes opportunités d’emploi. 

Le commissaire Phil Hogan a en outre souligné que lors des négociations sur le TTIP, la Commission européenne veillerait à garder des standards élevés dans le domaine du secteur alimentaire et à protéger les marques établies dans le secteur viticole. A ses yeux, le TTIP doit être "un accord qui protège les secteurs sensibles, tout en favorisant les possibilités d'exportation".

Phil Hogan et Fernand Etgen ont également évoqué la simplification de la PAC qui constitue l’une des priorités de la Présidence lettonne et de la Commission pour l’année 2015. "Ici, nous attendons encore les conclusions de la présidence lettone [prévues pour mai 2015, ndlr]", a indiqué Fernand Etgen. Phil Hogan a indiqué que la Commission se donne pour but de réduire le nombre de dispositions sur le marché commun de deux cents à moins de cinquante. "Un des soucis majeurs du ministre Fernand Etgen étant la nécessité absolue de simplifier les procédures administratives des producteurs agricoles et viticoles, il a accueilli favorablement que le commissaire Phil Hogan aimerait en faire une de ses priorités", lit-on dans un communiqué de presse du ministère de l’Agriculture datant du 30 mars.

Pour ce qui est du programme de développement rural (PDR) du Luxembourg pour la période 2014-2020, Fernand Etgen indique que le commissaire s’est montré "compréhensif face aux doléances du Luxembourg".  Pour mémoire, la Commission avait adressé 308 observations au Luxembourg dans les “Observations sur le Programme de Développement Rural du Luxembourg” publiées dans sa note journalière datant du 15 janvier 2015.