Dans sa traditionnelle déclaration sur la politique européenne et étrangère du gouvernement luxembourgeois, qu’il a faite devant la Chambre des députés réunie en plénière le 15 novembre 2011, le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères Jean Asselborn a tenu à démontrer que, malgré les défis auxquels elle fait face, l’UE continue envers et contre tout d’incarner un idéal.
Loin de nier l’évidence – "l’Europe traverse une crise difficile, qui a de nombreuses facettes" - Jean Asselborn estime en effet que "ce constat ne doit pas nous décourager". Les Etats membres de l’UE ont déjà connu bien d’autres crises depuis 70 ans, qu’elles soient de nature politique, économique ou sociale. La réponse a toujours été la même, même si elle n’a pas toujours été aisée, rappelle le chef de la diplomatie luxembourgeoise : "il faut aller de l’avant et approfondir, avec courage et ouverture, l’intégration européenne".
Jean Asselborn met en garde contre la tendance en vogue qui consiste à affirmer que nous arrivons à la fin d’un cycle historique et que le processus d’’intégration européenne est désormais condamné à s’arrêter. "De telles théories ne servent que ceux qui défendent plus ou moins ouvertement l’égoïsme national", juge le ministre qui dénonce "une forme de nationalisme et d’égoïsme de salon rampant à travers nombre de pays de l’UE". Jean Asselborn voit dans de telles tendances une mauvaise évolution pour tous les Etats membres, et, pour le Luxembourg, il avance qu’une telle position serait "fatale, car notre sécurité et notre prospérité reposent sur le succès de l’UE".
Aussi, rappelle Jean Asselborn, "le succès de l’UE est le premier des intérêts du Grand-Duché" et "s’engager de façon responsable et solidaire pour le renforcement de l’Union" revient à ses yeux à s’engager pour le pays, ce à quoi il n’y a pour lui pas d’alternative. Et cet engagement pour l’intégration européenne est nourri, selon le ministre des Affaires étrangères, tant des intérêts du Luxembourg que de ses idéaux, que ce soit en matière de droits de l’homme, d’Etat de droit ou de multilatéralisme.
"L’Union européenne détermine en grande partie la vie politique, économique et sociale au Luxembourg", affirme Jean Asselborn qui trouve donc d’autant plus regrettable que des acquis fondamentaux de la construction européenne aient été remis en question à plusieurs reprises ces derniers temps.
"La crise de la dette a ébranlé les fondamentaux de l’union économique et monétaire et mis en danger la stabilité de la zone euro", constate le chef de la diplomatie luxembourgeoise qui reconnaît la spécificité de cette crise. "Nous sommes à la veille de grands chambardements en ce qui concerne la gestion de la zone euro", affirme Jean Asselborn, S’il reconnaît que la gestion de la crise a été trop lente et n’a pas été assez transparente, le ministre souligne aussi la complexité de la situation et des réponses demandées.
Les responsables politiques d’aujourd’hui doivent pallier des lacunes qui remontent au moment de la création de la monnaie unique dans les années 90 et que la crise de la dette a révélées, explique en effet Jean Asselborn. Et l’enjeu est de taille : "la faillite d’un Etat est un danger réel suspendu comme une épée de Damoclès sur des millions de citoyens européens", insiste-t-il. Sans compter que le nombre d’acteurs impliqués est impressionnant aux yeux du ministre qui voit là une explication au fait qu’il ne suffit pas de se rencontrer une fois pour régler tous les problèmes. "Il faut se concerter, délibérer, négocier, se concerter encore", explique le ministre qui souligne que c’est bien ce qui est en cours : "n travaille non-stop pour trouver la meilleure des solutions possibles".
Certes, admet Jean Asselborn, certaines des mesures prises sont des mesures ad-hoc, comme la création de l’EFSF. "Il est compréhensible qu’en temps de crise, il faut pouvoir agir vite", observe-t-il tout en réaffirmant que "l’esprit communautaire doit cependant rester le principe de base du fonctionnement de l’UE, et ce dans tous les domaines". "La nouvelle méthode de l’Union, comme certains l’appellent, doit rester l’exception", précise Jean Asselborn qui réaffirme que le Luxembourg exige toujours et encore le respect de la méthode communautaire, dans laquelle la Commission européenne joue un rôle central.
Dans le cadre des efforts entrepris pour lutter contre la crise de la dette, le Luxembourg a, rappelle Jean Asselborn, guidé sa conduite selon deux principes : la solidarité et la solidité.
La combinaison de déficits et de dettes élevées avec une croissance faiblesse a obligé certains pays à réduire les budgets sociaux et à augmenter les impôts, mesures qui ont conduit à des tensions sociales, admet Jean Asselborn. Mais cette même combinaison a aussi conduit les marchés financiers à évaluer de façon très critique la zone euro, ce qui fait que la Grèce, l’Irlande et le Portugal ne peuvent actuellement plus se refinancer sur les marchés.
Dans ce contexte, rappelle Jean Asselborn, une réponse collective est la seule solution possible, dans le respect des règles communes. Une réponse globale repose sur plusieurs éléments comme le semestre européen, la réforme du pacte de stabilité et de croissance, l’EFSF et le futur ESM, ainsi que les programmes d’aide qui ont été mis en place, sans compter les plans nationaux de réformes. A côté de ces mesures, Jean Asselborn rappelle que, dans le cas exceptionnel de la Grèce, une participation du secteur privé a été envisagée. Parallèlement, il convient, souligne encore le ministre, d’améliorer le fonctionnement de la zone euro.
Le semestre européen a deux objectifs, rappelle Jean Asselborn. Il s’agit de faire en sorte que les politiques en matière de la discipline budgétaire d’une part et celles visant par ailleurs à améliorer la croissance et à faire baisser le chômage concordent mieux. Le deuxième objectif est de renforcer la gouvernance économique par une meilleure surveillance et un meilleur suivi des politiques budgétaires de l’UE. Depuis juillet, "le semestre national" est en cours, indique Jean Asselborn qui entend par là la prise en compte des recommandations faites pour le budget 2012 qui va être discuté en décembre à la Chambre. Le vote du budget national, une des compétences les plus importantes de la Chambre, se fera désormais plus clairement qu’auparavant dans un cadre européen, se félicite le ministre qui estime que cette mesure devrait conduire dans les prochaines années à un renforcement de l’intégration des politiques budgétaires nationales. L’occasion pour le ministre pour souligner que ni les coupes budgétaires en matière de prestations sociales, ni la destruction de la culture du dialogue social propre au Luxembourg ne sauraient être des objectifs.
Quant à la réforme du pacte de stabilité et de croissance, elle a été adoptée en septembre, rappelle le ministre. Elle va conduire à une surveillance plus stricte tout en prévoyant des sanctions plus automatiques lorsque les règles sont enfreintes. Le pacte de stabilité et de croissance est par ailleurs complété par une procédure de surveillance des déséquilibres macroéconomiques excessifs qui prévoit que les Etats membres devront prendre des mesures conduisant à une plus grande convergence des économies.
Revenant sur les décisions des chefs d’Etat et de gouvernement du 26 octobre dernier, Jean Asselborn estime que les 17 Etats membres de la zone euro ont réussi à prendre des mesures de grande ampleur pour sortir de la crise. Le président du Conseil européen a par ailleurs reçu le mandat de définir des mesures visant à renforcer l’union économique, de façon à ce qu’elle parvienne au même niveau que l’union monétaire. « Des modifications du traité ne sont pas à exclure, bien que chacun soit bien conscient du risque que cela implique », explique Jean Asselborn qui rappelle le calendrier fixé, ainsi que l’institutionnalisation du sommet de la zone euro qui est ressortie de ce sommet.
Pour ce qui est de la mise en œuvre des décisions du 26 octobre, "nous devons croire que le nouveau gouvernement de transition grec va adopter aussi vite que possible le plan de sauvetage et les mesures prévues pour préparer la voie à une sortie du tunnel du peuple grec", a déclaré Jean Asselborn.
Quant à l’Italie, cause de soucis ces derniers jours, Jean Asselborn rappelle qu’elle est la troisième plus grande économie de l’UE. "En des temps normaux, la situation de l’Italie n’était certes pas satisfaisante, mais la soutenabilité des finances publiques italiennes n’était pas menacée", note Jean Asselborn, avant d’ajouter que "nous ne sommes maintenant plus en des temps normaux, et l’Italie doit donc mettre en œuvre au plus vite les mesures auxquelles elle s’est engagée et qui vont contribuer à faire baisser sa dette publique qui est extrêmement élevée". La démission de Silvio Berlusconi devrait permettre un retour de la confiance à l’égard de la politique italienne, estime Jean Asselborn qui souligne que Mario Monti est considéré comme capable de redresser la barre.
Abordant la question du rôle négatif qu’ont joué les agences de notation, Jean Asselborn a déclaré qu’à ses yeux, évaluer des pays qui sont en train de mener des programmes de réformes est tout simplement insensé. "Personne n’amène sa voiture au contrôle technique quand elle est au garage pour être réparée", a lancé en effet le chef de la diplomatie luxembourgeoise pour qui la légitimité des agences de notation est amoindrie du fait de leur position d’oligopole, du fait de leur incapacité à assumer les erreurs qu’elles ont commises par le passé, mais aussi en raison de leur manque de transparence et du timing de leurs notations. "Il est inacceptable que les agences de notation évaluent la qualité d’un processus démocratique", s’est insurgé Jean Asselborn en faisant référence à l’abaissement de la note des Etats-Unis. "Il est grand temps que le système actuel, qui donne aux agences de notation un pouvoir surdimensionné en les plaçant au centre du système financier, soit réformé", a lancé Jean Asselborn, saluant au passage les propositions mises sur la table par la Commission le jour même.
"Nous avons besoin d’une politique commune inspirée d’une vision claire de l’avenir", a conclu Jean Asselborn pour qui la recapitalisation des banques de la zone euro et la mise en place d’un barrage assez solide pour éviter la contagion sont primordiales. A ses yeux, il faut trouver l’équilibre entre consolidation budgétaire et croissance économique pour éviter des troubles sociaux. La crise de la dette a conduit des gouvernements à la chute, a rappelé le ministre qui souligne que si on peut remplacer les gouvernements, il faut veiller à ce que l’euro lui ne chute pas, car il ne saurait être remplacé. Dans un dernier appel à la solidarité politique, notamment dans ces moments difficiles, Jean Asselborn a rejeté avec vigueur l’idée d’une zone euro réduite à son noyau dur.
Pour ce qui est des perspectives financières de l’UE pour la période 2014-2020, Jean Asselborn a évoqué la proposition de la Commission comme une base solide pour les négociations qui ont déjà commencé. "Le Luxembourg souhaite que les négociations sur le cadre financier soient marquées par une coopération étroite entre le Conseil, le Parlement et la Commission", a déclaré le ministre pour qui l’UE doit se doter des moyens nécessaires à ses ambitions. Un sujet qui ne manquera pas d’être à l’ordre du jour lors de la déclaration 2012.
Jean Asselborn a rappelé que l’espace Schengen est l’un des principaux acquis de la construction européenne, ainsi qu’un symbole de liberté envié dans le monde entier. Or, déplore-t-il, Schengen a été mis à l’épreuve ces derniers temps. D’une part du fait des désaccords qui existent au sujet de l’entrée de la Bulgarie et de la Roumanie dans l’espace Schengen, et d’autre part en raison d’initiatives unilatérales, comme celle du Danemark, qui ont remis en question le principe de Schengen.
Jean Asselborn déplore les tendances populistes qui ont pour objectif de remettre en question les principes fondamentaux sur lesquels est basé l’espace Schengen, mais a salué le nouveau gouvernement danois pour avoir abrogé les mesures de contrôle aux frontières intérieures avec l’Allemagne et la Suède. Pour les frontaliers de la Grande Région et le Luxembourg, les libertés liées à Schengen sont vitales. Reste que le Luxembourg doit être solidaire avec les Etats de l’Union qui ont des difficultés à gérer les frontières extérieures de l’UE, et c’est pourquoi il a contribué et participé à plusieurs missions de l’agence Frontex.
Le traité de Lisbonne a montré à l’aune de la crise qu’il était incomplet. Des décisions importantes pour gérer la crise, comme celles de la création de l’EFSF et ensuite de l’ESM, le mécanisme de stabilité européen qui succédera à l’EFSF, ont dû être prises en dehors des traités. L’article 136 du traité devra être amendé en conséquence après une décision du Conseil européen.
Mais en même temps, d’autres parties du traité de Lisbonne doivent être mises en œuvre, comme la mise en place du Service européen d’action extérieure (SEAE), qui devrait selon Jean Asselborn "améliorer la visibilité et l’efficacité de l’UE au niveau international" ou l’initiative citoyenne européenne qui devrait permettre aux citoyens de participer à l’élaboration des politiques de l’UE. L’initiative citoyenne européenne devrait entrer en vigueur le 1er avril 2012. La loi d’application luxembourgeoise, déposée en août, devrait être adoptée bientôt par la Chambre, espère le ministre.
Le Luxembourg est un "Etat hôte" de nombreuses institutions européennes. Sa politique est d’offrir une grande qualité de vie et des conditions de travail optimales. De grands projets ont été cités par le Jean Asselborn : la rénovation du Centre de conférences, qui devrait être terminé en avril 2012, la deuxième extension de la Cour des Comptes, la rénovation et l’extension du Parlement européen et les nouveaux bâtiments de la Commission. La vie quotidienne des fonctionnaires européens sera facilitée par l’introduction d’une nouvelle carte de légitimation dont le projet de loi a été déposé à la Chambre. Mais, met en garde Jean Asselborn, les changements de l’agenda du Parlement européen qui tiendra des sessions réduites à Strasbourg montre que "la question du siège n’est jamais définitivement résolue". Le Luxembourg soutient dans ce contexte la France et plaide pour un respect des traités en la matière.
Dans ce contexte, Jean Asselborn pense que les difficultés auxquelles l’UE fait face ne sont en aucun cas des signes d’un déclin qui risque de découpler l’Europe de régions plus dynamiques sur le globe, comme veulent le faire croire certains pessimistes. L’UE continue de représenter un idéal, dès que l’on jette un regard au-delà de ses frontières.
D’autre part, l’UE joue son rôle dans les enceintes multilatérales, où les bonnes réponses aux questions globales sont élaborées. L’UE, “et donc indirectement le Luxembourg” pousse ainsi vers une conclusion du Doha Round au sein de l’OMC, l’Organisation mondiale du Commerce, malgré les blocages. L’UE et le Luxembourg le font, parce qu’ils sont convaincus qu’il faut agir contre le protectionnisme et pour la solidarité, notamment à travers l’intégration des pays en voie de développement dans le système commercial international.
Pour pallier aux blocages, l’UE a recours à des négociations bilatérales sur des accords de libre-échange, comme avec la Corée du Sud, le Pérou ou la Colombie, partenaires avec lesquels elles ont abouti. Ces négociations signalent que “l’UE s’engage pour des relations commerciales ouvertes et équilibrées” qui donnent aussi aux acteurs économiques des accès à de nouveaux marchés.
Par ailleurs, l’UE négocie des accords asymétriques sur un partenariat économique avec les pays ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique) qui devrait continuer à donner à ces pays un accès privilégié aux marchés de l’UE tout en misant sur l’aide solidaire par une intégration de ces pays au commerce international selon leur rythme.
En ce qui concerne le changement climatique, l’UE pousse vers un accord lors de la conférence de Durban à la la fin de l’année 2011 qui rende plus contraignants les engagements climatiques et de réduction des émissions des Etats parties.
Dans cette partie du discours, Jean Asselborn a réitéré l’engagement du Luxembourg en faveur d’une perspective européenne des Etats des Balkans occidentaux, parce que les problèmes de cette région ne pourront être résolus que dans le cadre de l’UE, et parce que la stabilité et la paix en Europe sont liées à celle dans cette région. En 2011, le Luxembourg a nommé des ambassadeurs non-résidents en Bosnie, au Monténégro et en Serbie. Des progrès ont été réalisés dans ces pays, mais ils sont insuffisants, dit Jean Asselborn, "sans illusions" et en constatant que les derniers mois ont été difficiles dans la région.
La Croatie devrait devenir membre de l’UE en juillet 2012. Les négociations d’adhésion avec le Monténégro devraient commencer en 2012. La Macédoine, autre pays candidat doit trouver un accord avec la Grèce sur son nom, contesté par ce pays membre de l’UE. Pour le Luxembourg, et il n’est pas le seul Etat membre de l’UE à penser ainsi, la Serbie "est la clé de la stabilité et de la voie vers Bruxelles". Mais pour cela, une normalisation des ses relations avec le Kosovo et les autorités de Pristina doit avoir lieu. Sinon la Serbie ne saurait obtenir le statut de candidat. Il faut un vrai dialogue pour cosntruire un bon voisinage qui est une condition formelle pour un rapprochement avec l’UE. Avec sa participation aux missions de la KFOR et de l’EULEX, le Luxembourg livre sa contribution à ce processus. Il restara au Kosovo "le temps qu’il faudra". Quant à l’Albanie, le gouvernement doit mener un dialogue constructif avcec l’opposition, et en Bosnie-Herzégovine, Jean Asselborn pense que beaucoup de temps a été perdu depuis les élections de 2010 pour mener des réformes et doter le pays d’un gouvernement central effectif.
La levée de l’obligation de visas pour les citoyens de certains de ces pays qui avait été conçue pour rendre possible des contacts directs entre les citoyens de l’UE et des Balkans occidentaux a aussi été entendue comme un privilège qui entraîne des obligations de la part de ceux qui en profitent. Or, constate Jean Asselborn, "il y a beaucoup d’abus" et "cet abus ainsi que l’afflux de faux demandeurs d’asile doivent cesser, afin que la libéralisation de la politique des visas puisse continuer".
Jean Asselborn s’est félicité dans son discours du fait que les élections parlementaires se soient déroulées en Turquie selon les règles d’une démocratie moderne. Il est convaincu que certains dossiers bloqués devraient bientôt trouver une solution. La Turquie a selon lui fait de grands progrès depuis 20 ans et change constamment. Il constate qu’il a plusieurs écoles dans l’UE sur le sujet UE-Turquie. Il y a les réticents, comme la France, l’Allemagne, la Grèce et Chypre, il y a les enthousiastes, et ce pour des raisons purement géopolitiques, comme le Royaume Uni, et la majorité, dont le Luxembourg, qui disent que les négociations doivent être menées jusqu’au bout, que l’UE est un formidable moteur de réformes en Turquie et que la Turquie ne représente pas seulement un grand marché potentiel, mais lie aussi l’UE à une région cruciale pour la paix mondiale. Il s’agit de savoir si l’UE veut être passive et subir dans la région ou y faire valoir son influence. Aucune option ne doit être écartée pour une décision qui concernera toutes les générations à travers le 21e siècle.
Reste l’Islande, bien intégrée dans l’Espace économique européen, avec laquelle les sujets qui fâchent – la pêche, l’agriculture et les services financiers – n’ont pas encore été abordés, et où une campagne d’informations sur les avantages et désavantages d’une adhésion à l’UE sera lancée.
Il y a d’autres régions qui misent sur l’UE. L’UE offre ainsi à l’Arménie, à l’Azerbaïdjan, à la Géorgie, à la Moldavie, à l’Ukraine et même au Belarus un partenariat qui les rapprocherait, mais pas seulement sur une base économique, mais aussi autour de thèmes comme la démocratie, la liberté d’expression, l’Etat de droit et la sécurité. Jean Asselborn a insisté sur le fait que les critères d’un tel partenariat doivent être respectés.
Après avoir fait l’éloge du printemps arabe, Jean Asselborn a mis en évidence les obligations qui découlent pour l’UE et ses Etats membres de ces événements, dont leur expérience pour mettre en place des Etats de droit avec tout ce que cela implique. Le ministre ne pense pas que "le but des citoyens de ces Etats ne peut pas être de remplacer une dictature par une autre". Et bien sûr, l’UE devra aider économiquement ces pays, car une situation sociale difficile "peut produire toute sorte de populisme antidémocratique". Il faut des accords de libre-échange entre l’UE et entre les pays de la région. Il faut aussi une intégration progressive de ces pays sur le marché européen. Stabilisation économique et politique devraient aller de pair.
Entretemps, la Tunisie a vécu des élections législatives reconnues par la communauté internationale comme premier pas vers une transition.
En Egypte, la situation est incertaine. Les droits des minorités, la violence politique jouent encore un trop grand rôle. La pauvreté dans un pays qui dispose de peu de ressources est une menace réelle qui exige un soutien économique.
La Libye sort d’un "conflit sanglant mais nécessaire", où selon Jean Asselborn, l’UE a tenu son rôle avec ses sanctions et son soutien humanitaire. Le Conseil national de transition (CNT) a été reconnu par le Benelux et devra veiller à l’instauration d’une gouvernance démocratique, une première dans ce pays.
Dans d’autres pays, des régimes chancelants résistent encore à leurs populations, comme au Yémen et en Syrie, où l’UE a appelé à une fin des violences et décrété des sanctions contre les suppôts du régime d’Assad tout en misant sur les pressions de la, Ligue arabe.
Il est clair pour Jean Asselborn, après le dernier rapport de l’AIEA, que l’Iran développe des programmes nucléaires qui ont pour but de le doter de l’arme nucléaire. De cette manière, Téhéran s’est mis au ban de la loi internationale. Si l’Iran ne veut plus négocier avec le groupe UE3+3 (le Royaume Uni, la France et l‘Allemagne ainsi que les USA, la Russie et la Chine, il faudra que l’UE renforce ses sanctions. Jean Asselborn a aussi exprimé sa compréhension pour les craintes en Israël, qui se sent directement visé, et les Etats du Golfe, devenus très nerveux. Mais comme les USA, Jean Asselborn pense qu’il faut exclure l’option militaire qui "aurait des conséquences incontrôlables et empêcherait que soient atteints les objectifs fixés".
Pour Jean Asselborn, "le printemps arabe a certainement changé l’attitude d’un certain nombre de pays à l’égard d’Israël. Israël ne peut plus miser sur de vieilles certitudes. Une nouvelle situation stratégique se dessine." C’est pourquoi le ministre pense qu’Israël devrait mettre fin à sa politique de colonisation et négocier avec les Palestiniens une solution basée sur celle des deux Etats. L’attitude actuelle du gouvernement israélien par contre risque d’entamer la sécurité du peuple israélien. "Dire cela n’a rien d’anti-israélien", estime Jean Asselborn, pour qui au contraire, dire cela est "un devoir de tous ceux qui veulent que la sécurité du peuple israélien soit garantie". La démarche des Palestiniens, qui veulent cette négociation, d’être admis à l’ONU, est légitime dans ce contexte. Et c’est le souhait de Jean Asselborn que l’UE trouve une position commune sur cette question. Le Luxembourg en tout cas plaide en cas de bloacage de ce processus d’adhésion à l’ONU par le Conseil de sécurité pour une résolution des 27 de l’UE que l’Assemblée générale des Nations Unies accorde aux Palestiniens le statut d’un Etat observateur.
Le ministre des Affaires étrangères a encore évoqué la politique et le déploiement diplomatique du Luxembourg dans les Emirats arabes et l’Afrique, où une ambassade auprès de l’Union africaine et de l’Ethiopie sera ouverte à Addis Abeba. Il a aussi fait mention de l’engagement luxembourgeois dans la Corne d’Afrique, au niveau humnaitaire, et avec l’UE, dans le cadre de la mission militaire de formation des forces de sécurité somaliennes EUTM et de la mission de lutte contre la piraterie dans l’Océan indien, EU NAVFOR ATALANTA.
Jean Asselborn a parlé ensuite des "dialogues stratégiques que l’UE mène avec ses grands partenaires dans le monde, dans le cadre desquels elle défend ses intérêts et ses valeurs", une démarche "de laquelle le Luxembourg et ses relations avec ces pays profite naturellement". La relation transtalantique avec les USA est "irremplaçable", les relations avec la Russie font "des progrès", et "le rapide développement économique de la Chine et son implication dans les économies européenne et américaine continuent". L’OTAN fut le dernier sujet abordé.