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Énergie - Fiscalité
Fiscalité et énergie étaient à l’ordre du jour d’un Conseil européen qui a permis de fixer comme objectif une révision de la directive sur la fiscalité de l’épargne d’ici décembre 2013
22-05-2013


Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE se sont réunis le 22 mai 2013 pour un Conseil européen qui fut bref et consacré principalement à deux grands dossiers : l’énergie et la lutte contre la fraude fiscale.Herman Van Rompuy, Werner Faymann et Jean-Claude Juncker au Conseil européen du 22 mai 2013 (c) Conseil de l'UE

Le premier avait été identifié comme un des domaines "essentiels pour la croissance et la compétitivité européenne" lors du Conseil européen de mars dernier.

Le deuxième a été inscrit à l’ordre du jour au vu des demandes pressantes de certains chefs d’Etat et de gouvernement désireux d’avancer dans ce dossier, de l’ambition de la Commission d’aller dans leur sens, mais aussi de l’évolution de la position d’autres pays, et notamment du Luxembourg, en matière fiscale.

Le Conseil européen est l’occasion d’acter comme une vraie "percée" les avancées en matière fiscale liées au tournant amorcé par le Luxembourg dans sa position par rapport à l’échange automatique d’informations

Il faut dire que l’enjeu de la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales, ce sont des centaines de millions d’euros qui échappent à la main publique chaque année en Europe, comme n’a pas manqué de le rappeler le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, qui a insisté sur la nécessité de lutter contre ce fléau en ces temps de pressions budgétaires et de tensions sociales. Or, dans la lutte contre la fraude fiscale, aucun pays ne peut agir seul, quand bien même la fiscalité, sujet sensible, requiert l’unanimité, a pointé le président du Conseil européen. Mais il a aussi précisé qu’il n’était en rien question d’harmonisation fiscale. Il s’est donc réjoui de pouvoir annoncer que le Conseil européen avait permis de "débloquer un certain nombre de dossiers gelés", saluant une "réelle accélération" en la matière.

Première "avancée" mise en exergue par Herman Van Rompuy, la lutte contre la fraude à la TVA, les chefs d’Etat et de gouvernement attendant de leurs ministres qu’ils adoptent d’ici la fin du mois de juin 2013 la directive sur le mécanisme de réaction rapide et la directive sur le mécanisme  d'autoliquidation.

Seconde "percée" de ce Conseil européen, le mandat accordé le 14 mai dernier par les ministres des Finances à la Commission pour négocier, après deux ans de blocage, avec la Suisse, le Liechtenstein, Monaco, l’Andorre et Saint-Marin dans l’objectif qu’ils appliquent des mesures équivalentes à celles qui sont en vigueur dans l’UE. Les négociations vont se faire sur la base de la directive sur la fiscalité de l’épargne révisée, laquelle devrait être adoptée d’ici la fin de l’année 2013, ainsi que l’ont annoncé les chefs d’Etat et de gouvernement. Cette deadline est pour Herman Van Rompuy "un signal important" après cinq ans de négociations sur l’élargissement du champ d’application de ce texte.

Troisième point mis en avant par le président du Conseil européen, le fait que l’UE fasse désormais des efforts visant à étendre l’échange automatique d’informations au niveau de l’UE et au niveau mondial une priorité, ainsi que l’ont inscrit les chefs d’Etat et de gouvernement dans les conclusions. Au niveau de l'UE, la Commission compte proposer en juin des modifications de la directive relative à la coopération administrative afin que l'échange automatique d'informations couvre une gamme complète de revenus. Au niveau international, l'UE jouera un rôle déterminant dans la promotion de l'échange automatique d'informations afin que celui-ci devienne la nouvelle norme internationale, en tenant compte des dispositifs existants au niveau de l'UE, ont-ils encore déclaré, se félicitant des efforts menés actuellement dans le cadre du G8, du G20 et de l'OCDE afin  de mettre au point une norme mondiale. Herman Van Rompuy a tout particulièrement salué le fait que l’UE affiche désormais une approche commune sur ce point.

 Ces deux avancées sont profondément liées à l’évolution de la position du Grand-Duché de Luxembourg, un tournant amorcé le 10 avril dernier avec l’annonce du passage à l’échange automatique d’informations dans le cadre de la directive sur la fiscalité de l’épargne à compter du 1er janvier 2015. Le déblocage du mandat donné à la Commission pour négocier avec les pays tiers a suivi le 14 mai, ces deux grands moments étant marqué par le fait que le Luxembourg, qui reconnaît que la tendance va dans ce sens, s’engage désormais pour faire de l’échange automatique d’informations la norme internationale.

Les réserves émises par l’Autriche et le Luxembourg lors de cet Ecofin restent toutefois d’actualité, puisque l’accord sur un élargissement du champ d’application de la directive sur la fiscalité de l’épargne dépendra des négociations qui vont pouvoir commencer avec les pays tiers.

Jean-Claude Juncker à son arrivée au Conseil européen du 22 mai 2013 (c) Conseil de l'UE"Nous ne faisons pas dépendre notre attitude finale de l'issue des négociations mais nous exigeons que négociations il y ait pour que nous puissions voir dans quelle mesure l'extension du champ d'application compartiment par compartiment pourra se mettre en place", a expliqué le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker. "Nous n'exigeons pas que la Suisse applique les mêmes règles que celles qui sont retenues au niveau de l'Union européenne, mais des règles équivalentes et nous allons voir à l'autopsie", a-t-il précisé, le message retenu par la plupart des grands médias étant que, selon lui, le Luxembourg ne bloquait pas l’avancée du dossier.

Enfin, pour ce qui est de la fiscalité des entreprises, les chefs d’Etat et de gouvernement se sont entendus pour “une approche coordonnée” en la matière. Les conclusions appellent à poursuivre les travaux en matière de planification fiscale agressive et de transfert des bénéfices, la Commission s’apprêtant à présenter d’ici la fin de l’année une proposition de révision de la directive "sociétés-mères et filiales" et procédant en attendant à un réexamen des  dispositions anti-abus dans la législation concernée de l'UE. De même les chefs d’Etat et de gouvernement jugent nécessaire de poursuivre les travaux visant à éliminer les mesures fiscales dommageables. Par ailleurs, pour remédier à la fraude et à l'évasion fiscales et combattre le  blanchiment de capitaux de façon globale, dans le marché intérieur et en ce qui concerne les territoires et les pays tiers non coopératifs, les chefs d’Etat et de gouvernement estiment essentiel d'identifier les bénéficiaires effectifs, y compris pour ce qui est des sociétés, des trusts et des fondations. Les conclusions indiquent ainsi que la version révisée de la troisième directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux devrait être adoptée d'ici la fin de l'année. Quant à la proposition visant à modifier des directives en ce qui concerne la publication d'informations non financières et d'informations relatives à la diversité par les grandes sociétés et groupes, elle sera examinée, notamment dans le but d'assurer un reporting pays par pays de la part des grandes sociétés et groupes, indiquent les conclusions. Les chefs d’Etat et de gouvernement sont aussi d’accord pour affirmer que "des efforts doivent être consentis pour relever les défis de la fiscalité dans l'économie numérique", un sujet sur lequel ils reviendront lors du Conseil européen d’octobre 2013, lorsqu’ils discuteront de la stratégie numérique.

Energie : un débat axé sur la question de la compétitivité et des prix

Le débat que les chefs d’Etat et de gouvernement ont eu sur l’énergie s’est beaucoup concentré sur la question de la compétitivité des prix de l’énergie, la dépendance énergétique du continent se faisant sentir tant sur les dépenses des ménages que sur les entreprises dont Herman Van Rompuy a retenu les difficultés à rester compétitives et à maintenir emplois et usines sur le territoire européen au vu des prix pratiqués.

Aussi, si l’efficacité énergétique apparaît en premier lieu dans le compte-rendu que le président du Conseil européen a fait à la presse, c’est pour réaffirmer l’importance de la mise en œuvre des directives sur l’efficacité énergétique et la performance énergétique des bâtiments.

De même, la mise en place d’un marché européen de l’énergie reste un objectif réaffirmé par les chefs d’Etat et de gouvernement qui font référence au calendrier qu’ils s’étaient fixé en février 2011 : à savoir achever le marché intérieur de l’énergie d’ici 2014 et développer les interconnexions de manière à mettre fin d'ici 2015 à toute situation d'isolement d'un État membre par rapport aux réseaux européens de gaz et d'électricité. S’il n’y a "pas de temps à perdre" aux yeux d’Herman Van Rompuy, c’est essentiellement en raison des économies que pourraient faire les Etats membres de la sorte, qu’il évalue en tout à 30 milliards d’euros par an.

L’accent a par conséquent aussi été mis sur la nécessité d’investissements dans les infrastructures et la R&D, les besoins étant évalués à 1000 milliards d’euros d'ici 2020. Les conclusions indiquent que ces investissements devraient être "financés principalement par le recours au marché", Herman Van Rompuy ayant assuré que les investisseurs étaient prêts à investir, à condition que la politique énergétique et climatique soit plus prévisible à long terme.

Enfin, les chefs d’Etat et de gouvernement ont acté la diversification des sources d’énergie comme priorité, que ce soit en termes d’importations, pour limiter la dépendance à un fournisseur ou à une voie d’approvisionnement, ou en termes de production d’énergie en Europe. Il s’agit là d’exploiter pleinement le potentiel européen. Certes, il est bien question de poursuivre le déploiement de sources d’énergie renouvelables, mais aussi d’examiner la question d’un recours plus systématique aux sources d’énergie autochtones sur terre et en mer, et Herman Van Rompuy a bien précisé qu’il avait été question sur ce point des énergies non-conventionnelles, comme le gaz de schiste, qui, a-t-il indiqué à la presse "pourrait rentrer dans le bouquet énergétique de certains Etats membres". La compétence du bouquet énergétique relève des Etats membres, n’a-t-il pas manqué de rappeler en effet.