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Parlement européen
Les six eurodéputés luxembourgeois ont dressé un premier bilan de leur législature
Grandes victoires et déceptions ont ponctué une année au cours de laquelle le Parlement européen s’est affirmé
02-07-2010


Logo du Parlement européenLes six eurodéputés luxembourgeois ont dressé le 2 juillet 2010 un bilan contrasté de la première année de leur législature à l’occasion de la conférence de presse qui se tient traditionnellement à l’approche des vacances d’été.

Déceptions liées notamment à la gouvernance économique sont ainsi allées de pair avec grandes et petites victoires sur des dossiers allant des droits fondamentaux à la supervision financière, en passant par les droits sociaux. Mais tous sont d’accord pour affirmer que pendant cette année marquée par l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le Parlement européen a su s’affirmer sur le plan institutionnel.

La grogne de Robert Goebbels contre une UE "irremplaçable" mais manquant d’élan

Le premier à ouvrir le tour de table fut l’eurodéputé socialiste Robert Goebbels avec une volée de bois vert dont il est coutumier. Le traité de Lisbonne n’est pas encore entièrement entré dans les mœurs politiques de l’UE. Il a créé plus de confusion institutionnelle que de clarification. La nomination de Herman Van Rompuy au poste de président du Conseil européen n’empêche pas les présidences tournantes de fonctionner comme si de rien n’était. L’UE n’aRobert Goebbels pas de stratégie, sauf cette stratégie Europe 2020, "encore plus imprécise que la stratégie de Lisbonne dont tout le monde sait qu’elle a été un échec". L’UE, "qui est irremplaçable", manque d’élan, d’homme d’Etats qui savent prendre d’autres décisions que celles qui sont des évidences et qui sont prises trop tard. La crise de l’euro aurait pu être évitée selon Robert Goebbels, si l’on avait pris des décisions quatre mois plus tôt.

Robert Goebbels aime néanmoins son travail au Parlement européen. Des dossiers comme l’accord SWIFT ou le temps de travail dans le secteur des transports, où le Parlement européen a imposé sa griffe par ses votes, ont retenu son attention, car c’est comme ça que le Parlement est devenu "une force incontournable". C’est aussi un parlement avec des "majorités changeantes" selon les dossiers. Ainsi, dans le dossier des hedge funds, pour lequel il rapporteur fictif, une coalition de députés PPE, socialistes, verts et communistes a pu être constituée contre les libéraux et les conservateurs de plusieurs camps. "Ce qui est possible dans un parlement où il n’y a ni majorité ni opposition structurées" rend finalement aux yeux de Robert Goebbels le travail de député européen intéressant et "créatif".

Georges Bach, un syndicaliste qui cherche ses marques dans ses commissions de travail

Georges Bach, eurodéputé PPE, mais aussi ancien président du syndicat des transports SYPROLUX, n’avait pas d’expérience parlementaire avant d’être élu sur la liste CSV en juin 2009. Pour lui, les initiatives de la nouvelle Georges BachCommission européenne commencent seulement à arriver maintenant au Parlement européen. Il lui était au début difficile de faire la part des dossiers importants et moins importants pour son travail au PE. Maintenant, il se concentre sur les dossiers des commissions de travail Transports, Tourisme et Emploi auxquelles il participe. Le trafic, la sécurité routière, la mobilité, le fret, le passage vers la co-modalité entre chemin de fer et transports routiers, les prescriptions sociales dans le secteur des transports, les nouvelles attributions de l’UE dans le secteur du tourisme, la mise en valeur des itinéraires culturels, les contrats atypiques, le revenu minimum et l’impact de l’évolution démographique sur des systèmes de protection sociale et de pension dont la durabilité doit être assurée, finalement les nouvelles initiatives de la Commission pour de nouveaux projets de directive sur le temps de travail et le détachement des travailleurs comptent parmi les préoccupations de Georges Bach.             

Claude Turmes, conscient des défis auquel le Parlement européen va devoir faire face dans les mois à venir, salue la force dont il a fait preuve en matière de droits fondamentaux et d’Europe sociale

Claude Turmes (Verts-ALE) a déploré le manque de vision pour l’avenir qui caractérise l’UE ces derniers temps. Sur le plan institutionnel, il regrette encore la nomination au poste de président de la Commission européenne de José Manuel Barroso qu’il estime ne pas être à la mesure du rôle qui lui incombe. Quant au Parlement européen, il a su, selon l’eurodéputé, montrer sa force en termes législatifs tout au long de cette année.Claude Turmes

Ce fut le cas en matière de droits fondamentaux avec le rejet de l’accord SWIFT, en matière d’Europe sociale, avec le rejet de la proposition de la Commission qui visait à exclure les chauffeurs routiers indépendants de la directive réglementant leur temps de travail, mais aussi dans le cadre de la mise en œuvre du traité de Lisbonne. Dans le cadre des négociations interinstitutionnelles qui ont lieu au sujet de la mise en place du futur Service européen d’Action extérieure, le Parlement européen a en effet réussi à obtenir un droit de contrôle sur la nomination aux postes clefs du SEAE, ce dont se félicite Claude Turmes. Ce succès, le Parlement européen le doit selon l’eurodéputé au travail mené en commissions par des députés engagés qui connaissent leurs dossiers et qui prennent le temps de constituer des alliances.

Mais le Parlement européen va faire face à de nouveaux défis dans les mois à venir. En termes de politique sociale, la Présidence belge entend en effet avancer sur le dossier des services publics tandis que l’idée de fixer un cadre pour un revenu minimum en Europe va aussi devoir être promue et le Parlement européen aura sur ces dossiers un rôle important à jouer. En matière de régulation financière, Claude Turmes constate une résistance forte des lobbies des banques et des hedge funds, et il juge nécessaire de renforcer pour leur faire face les activités de la société civile. Quant à la crise économique, Claude Turmes craint que la gouvernance économique ne se réduise à une stricte politique d’austérité et il appelle donc à trouver un équilibre entre la nécessité de donner un signal clair aux marchés en contrôlant les déficits et celle de penser à la relance économique. Et dans ce contexte, le Parlement européen sera force de proposition.

Claude Turmes a par ailleurs appelé à une meilleure coordination dans la représentation des intérêts du Luxembourg au niveau européen. L’eurodéputé vert regrette en effet que, depuis près de dix mois, personne n’ait été nommé pour prendre en charge les relations avec le Parlement européen au sein de la Représentation permanente du Luxembourg à Bruxelles. Pour rappel, le député Félix Braz avait interpellé le gouvernement sur ce point dans une question parlementaire du mois de février 2010. Claude Turmes, qui note aussi au passage que le déficit de transposition s’est creusé au Luxembourg, se demande en fin de compte si le gouvernement prend vraiment au sérieux la mise en œuvre du traité de Lisbonne.

Les batailles gagnées par Astrid Lulling en 2009

Astrid Lulling (PPE) s’est montrée satisfaite dans le bilan qu’elle a tiré de la première année de cette législature.

En tant que questeur, poste auquel elle a été réélue en juillet 2009, Astrid Lulling a été confrontée aux problèmes Astrid Lullingquotidiens liés à l’application du nouveau statut des députés qui prévoit notamment qu’ils soient désormais rétribués par le Parlement européen lui-même et non plus par les parlements nationaux de leur Etat d’origine. Mais l’eurodéputée, qui est la seule Luxembourgeoise membre du bureau, suit aussi de très près les travaux d’extension du KAD au Kirchberg et elle a d’ailleurs eu à intervenir dans un différend apparu entre le Parlement européen et le gouvernement luxembourgeois à ce sujet. Vu le budget en jeu, qui atteint 450 millions d’euros, elle se félicite de pouvoir veiller au grain.

En tant que membre de la commission des Affaires économiques et monétaires, Astrid Lulling est rapporteur fictif pour le groupe PPE sur l’institution du comité de risque systémique. En matière de supervision financière, Astrid Lulling estime que le Parlement européen a fait son travail, mais que ce sont finalement les gouvernements qui ne bougent pas et semblent ne pas vouloir de supervision financière. Le sujet sera débattu en plénière le 6 juillet prochain. Astrid Lulling a veillé à défendre par ailleurs les intérêts de la place financière luxembourgeoise dans le dossier des hedge funds.

Astrid Lulling est aussi membre de la commission des droits de la femme et de l’égalité des genres et elle s’est félicitée à ce titre du succès qu’elle a remporté en tant que rapporteur sur la directive concernant l’application du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes exerçant une activité indépendante. Sa résolution a en effet été adoptée le 18 mai dernier. Astrid Lulling a déploré cependant que cette commission ne cesse de produire des rapports qu’elle juge "insensés" et peu constructifs.

Au sein de la commission de l’agriculture et du développement durable, Astrid Lulling a veillé à défendre pour après 2013 une politique agricole commune qu’elle juge nécessaire pour l’agriculture luxembourgeoise et qui doit aller de pair avec des instruments de régulation des marchés. Astrid Lulling a par ailleurs aussi réussi à se faire entendre au sujet d’un projet de règlement concernant l’information du consommateur et elle a ainsi pu exclure du champ d’application les boissons alcooliques et les produits non-préemballés. Enfin, Astrid Lulling s’est félicitée de la bataille gagnée en matière de réglementation des appellations de vin biologique. La proposition que la Commission a finalement retirée risquait en effet d’être discriminatoire pour les pays producteurs de vins situés les plus au Nord.

Pour Frank Engel, une augmentation du budget communautaire apporterait à long terme un progrès institutionnel à l’Union européenne

Frank Engel (PPE) a regretté le rejet par le Parlement européen de l’exclusion des conducteurs indépendants du champ de la directive qui régit le temps de travail dans le secteur du transport routier. Pour lui, ce vote ne peut pas être considéré comme un progrès social. Il pense notamment que les chauffeurs indépendants doivent pouvoirFrank Engel organiser leur temps de travail à leur guise, ainsi que le font les avocats ou les médecins. Il pense par ailleurs qu’il ne faut pas interdire aux chauffeurs indépendants d’organiser leur bureau et leur route avant de prendre le volant.

L’eurodéputé a par ailleurs regretté que le Parlement européen n'ait pas trouvé d’accord sur l'introduction d’un revenu minimum dans l'UE. Selon lui, beaucoup de choses contradictoires se passent au sein du Parlement européen. Afin de "discipliner ces excès", il pense donc qu’il ne serait pas mal que les eurodéputés aient à rendre compte de leurs actes, comme c’est le cas pour les parlementaires nationaux qui dépendent en quelque sorte de leur gouvernement majoritaire.

Concernant la gestion de crise, Frank Engel a déclaré que le Parlement européen n’est pas conçu pour prendre des mesures d’urgence. Il regrette que les eurodéputés n’aient pas avancé dans ces dossiers, ce qu’il attribue notamment aux procédures parlementaires trop longues, ainsi qu’à l’absence de gouvernance en Europe. Dans ce cadre, le Parlement européen devra se consacrer aux choses essentielles après l’été, ainsi qu’il a tenu à le souligner.

Pour Frank Engel, on peut s’attendre à un clash idéologique lors des discussions sur le futur budget de l’Union européenne, notamment au sujet de la part réservée à la politique agricole commune ou à la recherche et à l’innovation. En guise de conclusion, il a déclaré que le budget de l’UE devrait être augmenté et il espère que cela apportera à long terme le progrès institutionnel que le traité de Lisbonne était censé apporter.

Pour Charles Goerens, le nouveau Parlement européen a fait preuve de courage, de responsabilité et d’efficacité pendant sa première année

L’eurodéputé libéral Charles Goerens a salué le rejet de l’accord SWIFT par le Parlement européen, un vote par lequel les eurodéputés ont fait preuve de courage tout en conservant l’équilibre entre sécurité et liberté. Et il se réjouit que le Parlement européen ait son mot à dire dans les négociations futures concernant la protection des données.

Charles GoerensUne lecture commune des dossiers n’est pas toujours chose facile dans une assemblée qui compte entre 700 et 750 membres, mais Charles Goerens pense que la Parlement européen a réagi de façon cohérente pendant les mois de crise. Les autres institutions quant à elles se sont distingués la cacophonie qui régnait dans leur discours, à l’instar de la chancelière allemande Angela Merkel qui a "déçu le Parlement européen".

En général, l’eurodéputé a dressé un bilan positif de la première année du nouveau Parlement européen qui a "assumé ses responsabilités". Il a par ailleurs tenu à insister sur la bonne coopération entre les six eurodéputés luxembourgeois, même s’il pense que la communication pourrait encore s’améliorer.

Le monitoring ex ante des budgets nationaux par la Commission européenne est une bonne chose aux yeux de Charles Goerens. Il pense qu’il ne s’agira pas d’une "perte de souveraineté" des parlements nationaux mais plutôt d’une opportunité de voir ce qui se passe dans les pays voisins.

Au niveau institutionnel, le Parlement européen obtient des bonnes notes de la part de Charles Goerens, contrairement à la Commission, dont le président est en train de devenir "le secrétaire général de Herman Van Rompuy". Les compétences du Président du Conseil européen, Charles Goerens ne les juge pas non plus bien définies, et il s’attend donc à quelques surprises institutionnelles à l’avenir. Et l’eurodéputé de regretter que la méthode communautaire, telle qu’elle avait été privilégiée jusqu’il y a peu, ait été "perdue" au cours de la crise grecque.

En guise de conclusion, Charles Goerens a abordé quelques sujets qui lui tiennent à cœur et pour lesquels il s’engage. Il veut notamment que le Parlement européen dégage des vues claires de la politique de développement et climatique. Par ailleurs, il pense que l’UE, après avoir adhéré à la Convention européenne des Droits de l’homme, devrait montrer l’exemple et obliger ses 27 Etats membres à respecter les arrêts de la Cour européenne des Droits de l’homme.