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Too big to fail ? Académie d’été du LSAP (II) : La dimension budgétaire, économique et sociale
22-09-2012


lsap-academie-ete-dimension-economiqueLa deuxième partie du débat était consacré à "l’Europe face à la triple nécessité de rétablir les équilibres budgétaires, à favoriser la croissance économique et à promouvoir la justice sociale". L’animateur, le journaliste Serge Kennerknecht l’a ouvert en mettant en avant à quel point chômage, situation économique et inflation figuraient en tête des préoccupations des citoyens européens dans le dernier sondage Eurobaromètre.

Après un rappel par l’assistante sociale Ginette Jones du fait que l’emploi est un objectif de l’UE, mais que c’est une stricte subsidiarité qui préside à la dimension sociale de l’Union, après le rappel par Martine Reicherts, qui occupe depuis une quinzaine d’années de très hautes fonctions dans la fonction publique européenne, de l’opt-out britannique pour tout ce qui touche au social dans l’UE, mais aussi de l’éclaircie que signifie la décision du Conseil européen de juin 2012 (LIEN) de se lancer sur un pacte de croissance et de l’emploi, une décision démontrant que "le libéralisme à tout crin ne fonctionne pas", ce fut au tour du directeur du Statec, Serge Allegrezza de s’exprimer "en son nom personnel". Son point de vue fut un détonnant rappel à la réalité.

Serge Allegrezza estime que le pacte budgétaire équivaut à "une strangulation des pays en difficulté" et que  "nous, à Luxembourg, nous aurons des difficultés à respecter cela"

Académie d'été 2012 du LSAP: Serge Allegrezza et Alex BodryL’euro, a expliqué Serge Allegrezza, a eu tellement de succès qu’il a généré dans les pays à économie forte des excédents. Ces excédents ont été investis dans les pays de l’Europe du Sud, prêtés à bas taux, ce qui a priori constituait une grande chance. La crise mondiale n’est cependant pas seulement une crise des banques. D’autres forces ont été à l’œuvre. Ainsi, les pays émergents sont devenus "les usines du monde". Ces pays ont investi de leur côté leurs excédents aux Etats-Unis. Leurs capitaux à bas taux sont tombés à pic dans une société états-unienne marquée par des inégalités croissantes, avec une classe moyenne sous pression qui a emprunté de plus en plus "pour rester dans le coup".

C’est ainsi qu’est venue la crise des subprimes et la contamination bancaire à travers les papiers toxiques. Les dettes privées sont devenues des dettes publiques, et les Etats ne disposaient pas d’institutions pour contrer une telle situation. La panique d’abord, puis l’austérité, et finalement la loi du plus fort ont primé. En Europe, cela se traduit par l’asymétrie entre l’Allemagne et les pays de l’Europe du Sud.

Des contre-feux ont été allumés entretemps, comme l’ESM. Une autre tentative est le traité ou pacte budgétaire, "ce qui est fou", dit crûment Serge Allegrezza, car il équivaut à "une strangulation des pays en difficulté". Loin de lui de vouloir rejeter une politique budgétaire et économique durable, "mais pas comme ça". Et il met en garde : "Nous à Luxembourg, nous aurons des difficultés à respecter cela."

L’économiste de renom pense à la recommandation de la Commission enjoignant le Luxembourg à dégager pour parer à la crise, voire au crash prévisible de son système de pensions, un surplus budgétaire structurel de 0,5 % du PIB. Et cela en sachant depuis juillet 2012 que les recettes venant de la TVA sur le commerce électronique vont chuter, que 2012 sera une année de stagnation économique, qu’en 2013, la croissance sera faible au regard des moyennes historiques d’avant la crise, et que cette "petite croissance" aura un double effet sur l’emploi qui diminuera et le chômage qui augmentera.

Pour Alex Bodry, il faut revoir les accents posés dans les budgets tant du côté des dépenses que des recettes

Alex Bodry, le président du LSAP, a lui aussi souligné son peu d’enthousiasme pour le pacte budgétaire, que le Luxembourg n’a pas encore ratifié. Mais comme il est la condition pour que d’autres décisions puissent être prises, il l’accepte, sachant qu’il n’a pas de valeur ajoutée en tant que telle. Alex Bodry pense également que le Luxembourg aura « encore des surprises quand nous transposerons ». Pour lui, le temps est venu de revoir les accents posés par les budgets, tant ceux de l’UE, dans les Etats membres de l’UE et donc au Luxembourg. Lui-même plaide pour des investissements, un soutien au R&D, à l’innovation, tout en regrettant que la stratégie Europe 2020 trouve de moins en moins d’entrées dans les budgets.

Plus tard dans la discussion, il dira encore son opposition aux automatismes qui pourraient interdire à un Etat membre de réagir à la crise par des mesures anticycliques. Cela ne l’empêche pas d’accepter la notion de solde structurel, mais à condition qu’elle tienne compte de la conjoncture et des effets des investissements publics. De même, il est d’accord à ce que de l’ordre soit mis dans les finances publiques. Mais cela implique une révision par exemple du système fiscal luxembourgeois qui rechigne à imposer le patrimoine. Sauf que, termine-t-il, le CSV fait obstacle à toute réévaluation de la politique budgétaire.

Relance du dialogue social à travers la tripartite et crise économique

Enchaînant, Jean Asselborn dit : "Il faut au Luxembourg une nouvelle tripartite. Sinon le message du sérieux de la situation ne parviendra pas à toutes les oreilles et à toutes les instances." Un point sur lequel il aura un soutien appuyé assorti d’une mise en garde stratégique sans ambages de Serge Allegrezza qui dira : "Il faut relancer la tripartite et soutenir la reprise du dialogue social au Conseil économique et social. Il faudra réinventer ces institutions. Sinon nous ne survivrons pas."

Jean Asselborn résume : les réserves de la sécurité sociale seront bientôt entamées ; le Luxembourg vit au-dessus de ses moyens ; il faut restructurer les impôts. Au niveau européen, l’économie est affaiblie, avec une seule économie nationale qui est encore une locomotive, l’Allemagne, mais avec les dettes publiques française et britannique qui s’envolent. Le Luxembourg, dans ce concert, ne fait pas bonne figure avec sa politique de la fiscalité de l’épargne, explique le chef de la diplomatie en toute franchise, et il loue le 13 février 2009, lorsque le Luxembourg s’est mis au diapason des normes de l’OCDE tout en annonçant que le Luxembourg ne pourra pas ni ne voudra s’opposer à l’union bancaire.