Principaux portails publics  |     | 

Justice, liberté, sécurité et immigration
Le Parlement européen confirme l’accord trouvé en trilogue sur la gouvernance de Schengen
12-06-2013


Le 12 juin 2013, le Parlement européen réuni en plénière a confirmé à une très large majorité l’accord qui avait été trouvé en trilogue le 29 mai dernier sur la réforme de Schengen.

Cet accord intervenait près d’un an après un moment de grande tension au sujet de ce paquet législatif qui avait été proposé par la Commission européenne en septembre 2011. La proposition de la Commission répondait notamment aux demandes exprimées par plusieurs Etats membres lors du Conseil européen de juin 2011. L’introduction d’une clause de sauvegarde avait en effet été envisagée par les chefs d’Etat et de gouvernement pour autoriser le rétablissement des contrôles aux frontières intérieures de l'espace Schengen.

Ce paquet législatif comprend d’une part une révision du mécanisme d’évaluation de Schengen et d’autre part des modifications au code frontières Schengen portant notamment sur les règles relatives à la réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures dans des circonstances exceptionnelles.

Lors du Conseil JAI de juin 2012, les ministres avaient adopté une orientation générale sur ces deux textes, modifiant notamment la base juridique du mécanisme d’évaluation de Schengen. Cette décision avait vivement heurté le Parlement européen qui se retrouvait privé du pouvoir de codécision que lui accordait la procédure ordinaire prévue par la Commission dans sa proposition. En réaction, le Parlement européen avait décidé de suspendre les négociations avec le Conseil sur plusieurs dossiers qui étaient en cours. Le sujet avait aussi été discuté à la Chambre des députés.

Un an après cette tempête institutionnelle, l’accord trouvé va permettre de mettre en place un mécanisme d’évaluation de Schengen dans lequel la Commission va jouer un rôle déterminant, tandis que la réforme du code Schengen fixe des règles plus claires pour les cas de dernier ressort qui nécessitent la réintroduction de contrôles aux frontières internes de l'espace Schengen. La base juridique du mécanisme d’évaluation reste toutefois celle proposée par le Conseil JAI et dénoncée par le Parlement européen qui, à défaut d’un droit de codécision, aura un droit d’information.

Le Conseil doit maintenant approuver formellement ce compromis que la présidence irlandaise a présenté aux ministres de l’Intérieur lors du Conseil JAI du 7 juin dernier. Les représentants permanents avaient confirmé l’accord dès le 30 mai, et le feu vert du Conseil devrait donc être pure formalité.

Un accord approuvé avec une franche majorité, mais qui n’a pas fait l’unanimité auprès des eurodéputés luxembourgeois

Le rapport portant sur le mécanisme d’évaluation de Schengen, rédigé par l’eurodéputé Carlos Coelho (PPE) a été adopté par 526 voix pour, 101 voix contre et 55 abstentions.

Le rapport concernant la modification du code frontières de Schengen pour la réintroduction temporaire de contrôles aux frontières intérieures dans des cas exceptionnels, préparé par les soins de Renate Weber (ALDE) a été adopté par 506 voix pour, 121 voix contre et 55 abstentions.

Les deux textes ont été approuvés avec le soutien de la majorité des grands groupes politiques que sont le PPE, les S&D et l’ALDE.

Les eurodéputés luxembourgeois du PPE, Georges Bach, Frank Engel et Astrid Lulling ont d’ailleurs voté en faveur de l’accord. Pour Frank Engel, qui était intervenu dans le débat précédant le vote, l’accord soumis au vote est pourtant bien en-deçà des revendications du Parlement européen.

Charles Goerens (ALDE) lui, n’a pas suivi la majorité de son groupe et s’est abstenu pour le rapport Coelho, sur le mécanisme d’évaluation, et a même voté contre le rapport de Renate Weber sur la réforme du code Schengen qui encadre la possibilité de réintroduction de contrôles aux frontières extérieures.

Quant à Claude Turmes, il a voté contre les deux textes, à l’instar du groupe des Verts/ALE dont les porte-paroles jugent que l’UE a raté l’occasion d’établir un espace Schengen plus européen et démocratique.

Lors du débat qui a précédé le vote, l’eurodéputé socialiste Robert Goebbels, signataire historique de l’accord de Schengen en 1985, a appelé à "ne pas céder à cette logique de la peur née du contentieux franco-italien sur les réfugiés tunisiens en 2011". De son point de vue, ce que certains Etats cherchent à imposer à travers cet accord est "une renationalisation de Schengen".

L’eurodéputé reconnaît certes que l’accord trouvé en trilogue "comporte quelques garde-fous appréciables". Il relève notamment le fait que la Commission voit ses pouvoirs un peu améliorés face à des décisions unilatérales d’un Etat membre.

Mais il n’en reste pas moins que le Parlement européen, pourtant colégislateur selon le traité de Lisbonne en matière de contrôle aux frontières et d'asile, reste confiné à un rôle d'observateur qui reçoit uniquement des "informations".

Pour Robert Goebbels, le fait que certains Etats continuent à refuser au Parlement européen la procédure législative ordinaire dans ces matières démontre que les velléités de renationalisation de Schengen sont très fortes.

C’est donc en guise de "protestation contre les Ministres de l'Intérieur qui jouent sur les "peurs" de leurs concitoyens" que Robert Goebbels a voté contre les deux textes découlant du compromis trouvé en trilogue.