Le 28 septembre 2012, le groupe d’experts supervisé par le cabinet Oliver Wyman qui était chargé d’évaluer les besoins des banques espagnoles qui bénéficieront, par l’intermédiaire du gouvernement espagnol dans un premier temps, de l’aide sur laquelle se sont entendus les ministres des Finances de la zone euro le 20 juillet dernier, a pu présenter les résultats de son audit. L’analyse portait sur 14 groupes bancaires espagnols qui représentent 90 % des avoirs du système bancaire espagnol.
"Les besoins en capitaux identifiés sont le résultat d'une analyse très large et détaillée de la valeur des portefeuilles de crédits et d'actifs saisis des banques, ainsi que de leur capacité à absorber les pertes dans les trois prochaines années, dans un scénario très pessimiste", ont souligné le ministère et la banque centrale lors de la présentation des résultats de cet audit.
Les experts évaluent à 59,3 milliards d’euros les besoins de banques.
Parmi les 14 banques évaluées, sept, dont les plus importantes du pays comme Santander ou BBVA, n'auront pas besoin de capitaux supplémentaires. Les sept autres ont besoin de 59,3 milliards, une somme qui diminue à 53,7 milliards si l'on tient compte des processus de fusion en cours et de certains effets fiscaux.
Sur les 14 banques testées, celle qui aura le plus besoin d'argent est Bankia, déjà placée sous tutelle publique et dont les besoins sont évalués à 24,7 milliards. Outre Bankia, trois autres banques placées sous tutelle publique ont des besoins importants : Catalunyabank (10,8 milliards), NovacaixaGalicia (7,2 milliards) et Banco de Valencia (3,5 milliards).
Mais "il est important de souligner que les besoins en capitaux identifiés ne représentent pas le chiffre final de l'aide publique aux banques", ont insisté le ministère de l'Economie et la Banque d'Espagne. "Cette aide pourrait être significativement inférieure" à 59,3 milliards, car une partie de l'argent pourra être trouvée via d'autres biais, comme des cessions d'actifs, ont-ils assuré. "Nous parlerions d'un chiffre d'environ 40 milliards d'euros", a précisé le secrétaire d'Etat à l'Economie Fernando Jiménez Latorre en conférence de presse.
Jean-Claude Juncker, président de l’Eurogroupe, a réagi aussitôt par voie de communiqué, se disant "rassuré par le fait que les besoins en capitaux du secteur bancaire espagnol s'avèrent un peu inférieurs à 60 milliards d'euros". "L'évaluation montre que l'aide financière sur laquelle nous sommes tombés d'accord en juillet serait plus que suffisante pour couvrir les besoins en capital, en comptant une marge de sécurité confortable", ce qui "devrait permettre au processus de recapitalisation des banques de se dérouler efficacement", s’est-il réjoui.
L'Autorité bancaire européenne (EBA) a salué "un pas important" pour le secteur, tandis que la directrice du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde s'est elle aussi réjouie du résultat, "qui contribuera à construire un système bancaire plus solide, ce qui aidera à relancer le crédit et stimuler la croissance et l'emploi". La BCE, qui a participé au processus d’évaluation, a elle aussi salué ces résultats.
De son côté, la Commission européenne a "salué une avancée majeure dans l'exécution du programme d'aide financière et dans le renforcement de la viabilité et de la confiance dans le secteur bancaire espagnol".
Le montant de cette aide "sera déterminé dans les prochains mois" et "prendra en compte les mesures qui seront prises par les banques, comme la cession d'actifs, d'autres mesures de restructuration et l'appel au financement par les marchés" notamment, explique dans son communiqué la Commission européenne. Elle précise que les banques concernées devront présenter des plans de recapitalisation à la Banque d'Espagne et à la Commission européenne, voire dans certains cas, présenter des plans de mise en faillite ordonnée.
Après approbation de ces plans de restructuration, qui devront respecter les règles européennes de la concurrence, "la recapitalisation d'un premier groupe de banques est prévue d'ici novembre", rappelle la Commission. Cette date était celle prévue dans le mémorandum signé par l'Espagne avec ses partenaires de la zone euro.
Du côté des marchés, les agences de presse se faisaient l’écho dès vendredi de certains doutes. Ce qui a été confirmé le 1er octobre par une annonce de l’agence de notation Moody’s qui évalue les besoins de financement des banques entre 70 et 105 milliards d’euros. "Les montants de recapitalisation publiés par l'Espagne sont inférieurs à ce que nous estimons comme nécessaire pour les banques espagnoles afin de maintenir la stabilité dans nos scénarios adverses et très adverses", juge Moody's qui met en garde contre le fait que "si les acteurs du marché sont sceptiques sur ce test de résistance, le sentiment négatif pourrait miner les efforts du gouvernement pour rétablir la pleine confiance en la solvabilité des banques espagnoles".
Les résultats de l’audit ont été présentés dans un contexte d’austérité en Espagne.
Le gouvernement de Mariano Rajoy vient en effet de présenter au Parlement un budget de rigueur accompagné d’un plan de réformes qui répond aux recommandations émises dans le cadre du semestre européen.
Un plan de réformes salué par la Commission, dans la mesure où "ces nouvelles réformes structurelles répondent aux recommandations macroéconomiques de Bruxelles et vont parfois au-delà dans certains domaines". "L'ensemble des réformes annoncées ce jeudi par les autorités espagnoles constituent un pas important pour approfondir les réformes structurelles et poursuivre les chantiers en cours. Ce train de réformes comporte des mesures concrètes, ambitieuses et bien ciblées", s'est félicité Olli Rehn, le commissaire en charge des Affaires économiques.
Le ministre espagnol du Budget Cristobal Montoro a annoncé que le déficit public du pays en 2011, initialement évalué à 8,96 % du PIB, serait révisé à 9,44 %, puis atteindrait 7,4 % en 2012, contre 6,3 % promis à ses partenaires européens.
La révision à la hausse de ces deux chiffres est due aux aides publiques apportées aux banques, fragilisées depuis l'éclatement de la bulle immobilière en 2008, a expliqué le ministre. Mais ces aides "ne sont pas prises en considération dans la procédure de déficit excessif" prévue par l'Union européenne, car "ce sont des aides publiques que les banques s'engagent à rembourser", a-t-il assuré.
Concernant l'année 2012, le gouvernement estime que compte tenu de ces aides, il remplira son objectif d'un déficit public à 6,3 %.
Le projet de budget 2013 multiplie les coupes budgétaires pour récupérer 39 milliards d'euros. Selon le texte diffusé par le ministère, les prestations chômage baisseront notamment de 6,3 %. Les budgets des ministères seront réduits en moyenne de 8,9 %, celui de l'Industrie chutant de 21,3 %, celui de l'Agriculture de 25,4 % et celui de l'Education, de la Culture et des Sports de 17,2 %. La maison royale sera elle aussi mise à contribution, avec une diminution de son budget de 4 %.