Le 6 janvier 2013, le Comité de Bâle, comité international de supervision bancaire qui définit les règles applicables aux banques dans le cadre de la réforme du secteur dite Bâle III, a annoncé avoir assoupli les règles de liquidités auxquelles les banques internationales seront soumises à compter de 2015 afin de faire face aux éventuelles grandes crises.
Ainsi, la définition du ratio de liquidité à court terme (LCR, Liquidity Coverage Ratio) a-t-elle été élargie. Ce ratio est destiné à s'assurer que les banques détiendront suffisamment d'actifs très liquides pour faire face à d'importantes sorties de fonds durant une période de crise aiguë de trente jours. Ce ratio est le résultat d'une division entre la valeur des actifs liquides de haute qualité et le montant net des sorties de liquidités sur une période calendaire de trente jours. Ce ratio doit être supérieur à 100 %. Dans sa définition initiale, publiée en décembre 2010, les actifs liquides de haute qualité étaient plus limités et ne comprenaient essentiellement que les liquidités ou les réserves auprès de la banque centrale. Dans cette version révisée, ces actifs liquides pourront inclure des obligations d'entreprises notées A+ à BBB-, certaines actions ainsi que des emprunts hypothécaires résidentiels titrisés bénéficiant d'une note AA ou supérieure. Une décote sera cependant appliquée à ces actifs moins liquides. Une limite de 15 %, après décote, sera par ailleurs imposée à ces actifs dans le décompte des actifs liquides de haute qualité. La base des actifs qui pourront entrer en compte inclut désormais des obligations, des actions et certains types d'emprunts hypothécaires. Dans sa mouture initiale, le projet s'appuyait sur des actifs beaucoup plus stricts, tels que les liquidités ou les emprunts d'Etat.
Le calendrier d'application de ce ratio a par ailleurs été rééchelonné. Comme prévu, ce ratio entrera en vigueur le 1er janvier 2015. Mais à cette date, les banques ne devront néanmoins réunir que 60 % des montants initialement requis. Le matelas de liquidités pourra alors être graduellement augmenté à hauteur de 10 % par an pour atteindre 100 % à l'horizon 2019.
"Cette décision a été adoptée de manière unanime aujourd'hui", s'est félicité Mervyn King, le gouverneur de la banque d'Angleterre, qui préside le comité des gouverneurs et des régulateurs.
Le secteur bancaire a accueilli la nouvelle avec satisfaction, ce qui s’est d’ailleurs ressenti sur les marchés le 7 janvier 2013. Le Luxemburger Wort s’en est fait l’écho en citant dans son édition du 8 janvier 2013 les réactions de Serge de Cillia (ABBL) et de Marco Lichtfous (Deloitte). Tous deux considèrent la révision de ces critères comme une bonne nouvelle.
Serge de Cillia se réjouit notamment de changements qui prennent en compte les attentes des banques et réduisent la pression sur la mise en œuvre de ces futures règles. "La diversification des actifs utilisables comme couverture réduira notamment les risques pour les banques", salue l’expert de l’ABBL qui explique qu’à côté de cash et d’obligations d'Etat, seront acceptées en tant que contreparties certaines actions et certaines lettres de gages.
Pour Marco Lichtfous et Serge de Cillia, un changement est particulièrement important pour le Luxembourg, c’est le fait que les crédits aux maisons mères ne devront plus être couverts qu'à 40 % au lieu de 100 % : la proposition initiale aurait en effet pu fortement réduire l’attractivité du Luxembourg pour les banques internationales et aurait même pu aboutir à une fermeture de nombreuses banques ou à une transformation de filiales en succursales.
Toutefois, précise le Luxemburger Wort, "les banques européennes ne seront pas directement soumises aux règles de Bâle mais à la régulation européenne CRD y afférente, qui est sur certains points plus stricte". Pour Marco Lichtfous et Serge de Cillia, la réglementation CRD 4 "devrait normalement donc aussi être revue".
Or le dossier est sur le métier de la présidence irlandaise et un accord, qui était espéré pour la fin de l’année 2012, parallèlement au dossier du mécanisme de surveillance unique qui lui y est lié et sur lequel les ministres ont réussi à trouver un accord, est désormais escompté dans les premiers mois de 2013.
Et les premières déclarations du commissaire Michel Barnier ne semblent pas répondre aux attentes des deux représentants du secteur bancaire luxembourgeois cités par le Wort. Certes, Michel Barnier a salué l’accord trouvé à l’unanimité par le Comité de Bâle. Il cite notamment l’approche graduelle qui a été choisie et qui fixe des dates claires de mise en œuvre, voyant là une importante avancée.
Les services de la Commission ont bien insisté toutefois dans la documentation qui accompagne cette prise de position sur le fait que l’approche de la Commission dans le cadre des négociations sur le CRD IV restait bien valide après la publication de ces modifications par le Comité de Bâle.
Aux yeux de Michel Barnier, il s’agit désormais de faire plein usage de la période d’observation qui est prévue et de tirer des leçons des rapports que l’Autorité bancaire européenne (EBA) va préparer avant la mise en œuvre des ratios de liquidité à court terme pour 2015 au niveau européen. L’EBA devrait livrer des rapports sur les résultats de cette période d’observation sur les banques de l’UE d’ici fin 2013, et sur cette base que la Commission entend proposer de définir dans le détail le ratio de liquidité par le biais d’un acte délégué.
Pour autant, il reste beaucoup à faire tant au niveau mondial qu’européen, soulignent les services de la Commission : reste en effet à déterminer les indicateurs alternatifs basés sur le marché qui vont servir à définir les actifs liquides de grande qualité (en anglais HQLA), mais aussi le traitement des facilités des Banques centrales qui pourrait impacter cette définition et les flux y liés, ainsi que le traitement des variations des valeurs de marché sur les flux de trésorerie des dérivés.
"Le traitement de la liquidité est fondamental tant pour la stabilité des banques que pour leur rôle de soutien à la reprise de l’économie", a rappelé le commissaire en appelant le Parlement et le Conseil à conclure dans les prochaines semaines un accord sur le CRD 4. Car l’adoption rapide du CRD 4 reste selon lui la meilleure solution pour avoir la flexibilité nécessaire pour mettre en œuvre les standards LCR tels qu’ils seront détaillés par un acte délégué qui tiendra compte à la fois des travaux en cours à Bâle et des rapports de l’EBA.