Alors que la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’Union européenne débutera le 1er juillet 2015, la Chambre des députés a débattu, le 11 juin 2015, des priorités que le Grand-Duché s’est données à l’occasion de l’exercice de sa douzième présidence tournante. Des priorités que le ministre des Affaires étrangères et européennes, Jean Asselborn, a détaillées en ouverture de séance du parlement luxembourgeois.
Devant les députés, le ministre des Affaires étrangères a ainsi rappelé que la Présidence luxembourgeoise n’allait "pas réinventer la roue", mais qu’elle souhaitait contribuer à rendre l'UE plus efficace". "L'UE doit redevenir garante de l'espoir, offrir des perspectives et de la crédibilité", a-t-il poursuivi. Dans ce contexte, la Présidence se focalisera sur sept axes prioritaires, à savoir :
Pour ce qui est de la dimension économique et de l’investissement, Jean Asselborn a indiqué que la Présidence œuvrera pour la mise en place du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS ou EFSI en anglais) dans le contexte du plan Juncker. Elle cherchera par ailleurs à donner une nouvelle dynamique à la politique industrielle européenne, ainsi qu’à favoriser la création d’un marché unique numérique. La Présidence soutient également le développement d’une Union de l’énergie qui favorise l’émergence d’une stratégie énergétique horizontale telle que l’a proposée la Commission européenne, a dit Jean Asselborn.
Le ministre luxembourgeois a évoqué dans ce contexte le dossier de la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales, pour lequel le Luxembourg mise sur la transparence et la mise en place de règles de jeu équitables au niveau mondial. Le Luxembourg attend par ailleurs le rapport sur l’achèvement de l’Union économique et monétaire (UEM), dit "des quatre présidents", qui sera présenté au Conseil européen de juin 2015, pour mener ses travaux liés à la compétitivité.
Enfin, le ministre des Affaires étrangères n’a pas manqué d’évoquer l’importance des accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux (tel le TTIP, le CETA ou le TiSA) pour l’économie de l’UE, tout en reconnaissant le caractère conflictuel de ces accords, en particulier le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement avec les USA et le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etat qu’il prévoit (RDIE ou ISDS en anglais). Alors que le débat se poursuit au Parlement européen, de même qu’au Conseil de l’UE, sur la possibilité de réformer ce mécanisme controversé, le ministre a jugé qu’il était "préférable que l'UE soit assise à la table lorsque les normes et les règles internationales du marché mondial sont négociées".
Dans le contexte de la volonté d’approfondissement de la dimension sociale de l’UE, Jean Asselborn a souligné que la future Présidence luxembourgeoise apporterait son plein soutien à l’objectif de la Commission de mettre en place "une Europe triple A social". A cet égard, l’accent sera mis sur l’éducation, la formation et l’investissement social, et tout particulièrement sur l’investissement dans les ressources humaines, notamment dans les jeunes au travers de la Garantie pour la jeunesse.
Pour ce qui relève de la politique interne de l’UE, la question centrale sera celle de la migration alors que l’Europe est confrontée à une vague migratoire croissante. Selon Jean Asselborn, ce sont ici "les valeurs de l’UE qui sont en jeu" et la Présidence luxembourgeoise poursuivra avec un haut degré de priorité les actions sur le territoire de l’UE et celles en partenariat avec les pays tiers afin de sauver un maximum de vies et mener une politique d’immigration efficace. "Il en va ici de notre crédibilité, quant à la manière dont nous sommes capables de défendre nos valeurs dans le monde, mais aussi comment nous appliquons nous-mêmes à ces valeurs".
Il s’agira par ailleurs d’assurer la solidarité entre Etats membres alors que 40 000 demandeurs d’asile arrivés en Italie et en Grèce devront être relocalisés dans l’UE tel que le propose la Commission européenne dans son agenda en matière de migration. Le Luxembourg devrait en accueillir soit 515 au total, ce que le ministre estime ne pas être trop. Alors que la décision sera prise à la majorité qualifiée au Conseil de l’UE, Jean Asselborn a néanmoins prévenu qu’il s’agissait, pour que la solidarité fonctionne, que tous les Etats membres participent à l’effort.
Jean Asselborn est par ailleurs revenu sur la politique extérieure de l’UE, et notamment le conflit ukrainien. A ce sujet, le ministre a estimé que si l’isolation de la Russie sur la scène internationale devait durer, la situation irait en s’aggravant et non l’inverse et que les sanctions n’étaient pas la solution. Tout en soulignant qu’il s’agissait de rappeler que la Russie avait violé le droit international en annexant la Crimée, le ministre a estimé qu’il faudrait construire une nouvelle relation avec cet Etat, non sur les bases précédentes, mais en tenant compte du fait qu’il est nécessaire de dialoguer avec la Russie avec qui l’UE partage le continent européen. "Lentement, nous devons créer une nouvelle base de coopération avec la Russie pour assurer la paix et une certaine normalité", a dit Jean Asselborn.
Jean Asselborn a également évoqué la politique d’élargissement, "l’une des plus difficiles", et il a appelé dans ce contexte à relancer les négociations notamment avec la Turquie suite aux élections législatives dans ce pays en ouvrant de nouveaux chapitres. Il a par ailleurs noté le travail important pour la Présidence dans le cadre de la 21e Conférence des Parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (ou COP21) pour laquelle il s’agira de coordonner les positions des 28 Etats membres en vue de l’adoption d’un mandat de négociation ambitieux.
Enfin, le ministre a tenu à évoquer deux sujets qui risquent d’occuper la Présidence, à savoir les discussions sur la Grèce et le risque de "Grexit" (sortie de la Grèce de la zone euro) ainsi que la renégociation de la relation de l’UE et du Royaume-Uni voulue par le gouvernement britannique et le potentiel "Brexit" (sortie du Royaume-Uni de l’UE) qui pourrait en découler. Pour ce qui est de la Grèce, Jean Asselborn a souligné que les citoyens de ce pays devaient pouvoir vivre dans la dignité, ce qui n’est plus le cas actuellement, et que "la Grèce ne peut pas devenir un pays du tiers monde au sein de l’UE". Il s’agit néanmoins de respecter les engagements pris auprès de ses partenaires, même si le calendrier peut être débattu. Un Grexit serait en tous les cas "un échec" a-t-il dit.
Pour le Royaume-Uni, le ministre a estimé qu’en cas de Brexit, l’UE serait affaiblie, de même que le Royaume-Uni. Se disant ouvert à des négociations, il s’est néanmoins dit opposé à toute remise en cause de l’essence de l’UE, et en particulier du principe de libre-circulation.
Au nom du groupe CSV, le député Laurent Mosar a déclaré soutenir les priorités de la Présidence formulées par Jean Asselborn. Il a souligné trois objectifs "essentiels" pour son parti : redonner à l’Europe une image d’espoir, établir une croissance économique durable afin de pouvoir offrir des perspectives aux chômeurs, notamment aux jeunes, et mettre une "nouvelle couche de peinture" à l’image du Luxembourg qui a souffert de quelques "égratignures". La Présidence luxembourgeoise sera l’occasion de s’engager pour "l’harmonie européenne" et la "solidarité", mais aussi de montrer comment un petit pays comme le Luxembourg peut faire avancer les choses, a souligné le député.
Il a en revanche estimé que la Présidence risque d’avoir un "problème de légitimité" après le triple "non" au référendum du 7 juin 2015 lors duquel les Luxembourgeois ont entre autres rejeté le droit de vote des étrangers qui représentent 46 % de la population. Pour Laurent Mosar, ce référendum qui "a été observé de près par les partenaires européens", a "affaibli" le gouvernement et risque d’affaiblir la Présidence. Dans ce contexte, il a appelé le gouvernement, notamment le ministre de la justice, à s’engager au niveau européen pour une proposition concrète en faveur de la double nationalité.
Laurent Mosar a par ailleurs souligné l’importance des parlements nationaux pour l’Europe et appelé les ministres à présenter les dossiers importants à la Chambre pendant la Présidence. Il a regretté un "manque de concertation" en matière de politique étrangère de l’UE, notamment sur les questions du changement climatique ou du traité de libre-échange avec les Etats-Unis (TTIP). A ce sujet, il a estimé que le TTIP et l’Accord sur le commerce des services (TiSA) peuvent être une "grande opportunité" pour l’Europe qui ne doit pas s’isoler, tout en appelant à un "bon accord" qui ne sacrifie pas les normes européennes, notamment relative à la protection des données pour laquelle "le niveau est plus élevé au Luxembourg et en Europe" qu’aux Etats-Unis. Il a appelé à ne pas "sacrifier" la protection des consommateurs à la protection des investisseurs et à ne pas créer "un espace vide de droit pour les multinationales".
Quant à l’afflux massif de réfugiés, Laurent Mosar a dit soutenir la proposition de la Commission européenne sur la relocalisation de réfugiés qui a suscité beaucoup de critiques, tout en appelant à la création de "quotas intelligents". Les Etats membres doivent se montrer solidaires et cesser de résister, a-t-il ajouté. Il a encore dénoncé la passivité de la communauté internationale face à l’Etat islamique (IS), jugeant que l’UE n’arrivera pas à gérer la question des réfugiés si elle ne s’attaque pas à l’extrémisme.
Au sujet du plan d’investissement dit plan Juncker, Laurent Mosar appelle le gouvernement à "persuader" les autres Etats membres d’y contribuer, estimant que ce plan doit reposer sur de larges épaules. Quant aux rescrits fiscaux ("rulings") et à l’affaire Luxleaks, le député a jugé que le gouvernement risque de marcher sur un champ de mines, en lui conseillant de jouer la carte de la transparence et de s’engager en faveur du projet de base d’assiette commune (ACCIS).
Dans une brève réponse à Laurent Mosar, le ministre Asselborn a contesté l’idée que la Présidence puisse avoir des problèmes de légitimité après le référendum, expliquant que la Présidence n’était pas celle du gouvernement mais celle du pays. De plus, selon le ministre, "lier les deux serait erroné" et "ce serait tordu" dans le contexte actuel de discréditer le gouvernement par un amalgame.
Marc Angel, député LSAP et président de la commission parlementaire des affaires étrangères et européennes, a fait l’éloge du programme, et notamment de l’emphase mise sur la dimension sociale de l’UE et le triple A social, y compris dans le contexte de la procédure de surveillance des déséquilibres macroéconomiques. Il a souhaité qu’en matière de migration, la dynamique de l’aide aux réfugiés soit maintenue malgré les résistances, estimant que les traités européens prescrivaient l’aide à apporter à des Etats membres devant affronter une situation exceptionnellement grave.
Le TTIP a occupé une part importante dans l’intervention de Marc Angel. Le député a évoqué un accord "très discuté en Europe et qui suscite beaucoup d’oppositions car les citoyens craignent d’en être les perdants". S’y ajoute le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etat (RDIE ou ISDS), qui préoccupe l’opinion publique. Pour le député socialiste, le TTIP a cependant une autre facette : il permettrait à davantage de produits de l’UE d’être placés sur les marchés des USA, notamment ceux provenant des PME, "car les grandes multinationales n’ont pas besoin du TTIP, contrairement aux PME". S’y ajoute selon l’orateur la possibilité pour l’UE d’influencer les normes des produits. Bref, le traité de libre-échange avec les USA n’est pas seulement positif pour les marchés, mais aussi pour les personnes qui vivent dans les pays de ces marchés, dit-il.
Marc Angel a exprimé son désaccord avec le mouvement anti-TTIP qui est par principe opposé à la négociation. Mais il a admis que "son mérite, c’est d’avoir déclenché la vigilance de tout le monde dans ce dossier". Si le TTIP devait s’avérer bon pour les gens, nous voterons pour, mais s’il devait s’avérer mauvais, nous voterons tous contre", a-t-il conclu sur ce chapitre.
Lydie Polfer, prenant la parole au nom des libéraux du DP, a repris les propos de Jean Asselborn indiquant que la Présidence du Conseil sera celle du pays, et non pas celle du gouvernement. Elle a rappelé comment, lors de la dernière Présidence en 2005, l’opposition, dont elle faisait alors partie, avait proposé que les fonctionnaires ne soient pas accaparés par les questions des parlementaires afin qu’ils puissent se concentrer sur la Présidence. Elle a aussi rappelé combien le contexte était différent aujourd’hui de celui de 2005 en termes institutionnels et économiques.
Pour elle, tous les Etats membres ne sont pas sur la voie de la résilience économique. D’où l’appui des libéraux à l’idée du au triple A social, à l’investissement à travers l’EFSI, à l’investissement dans le capital humain, dans la recherche à travers Horizon 2020, etc. Pour la députée libérale, le social et l’économique vont de pair. Quant au TTIP, il offre pour elle des opportunités mais recèle aussi des dangers, et si ces dangers devaient prédominer, les libéraux ne voteront pas en faveur du TTIP. Ainsi, il faudra, selon Lydie Polfer, attendre l’issue des négociations sur le RDIE, pour prendre définitivement position.
Pour le parti déi Gréng, le député Claude Adam, qui se dit convaincu de la nécessité d’une Europe forte, solidaire et unie, a regretté que l’image de l’UE soit perçue de plus en plus négativement, et qu’elle évoque avant tout la bureaucratie ou l’austérité. Et de s’inquiéter du fait que la jeunesse européenne, confrontée notamment à des niveaux de chômage très élevés, perçoive de plus en plus l’UE comme un problème et non une solution. "Le rêve de l'UE risque de se transformer en cauchemar", s’est-il inquiété. Dès lors, pour le député, le fait d’arriver à faire progresser certains dossiers vers une position européenne commune serait déjà une première réussite de la Présidence luxembourgeoise.
Dans ce contexte, Claude Adam a insisté sur le fait que l’UE n’était pas simplement définie par sa dimension économique et des outils de coordination des politiques comme le Semestre européen, mais également par sa dimension sociale, même si celle-ci était "laissée de côté". Saluant la volonté du gouvernement d’assurer un "triple A social", il a cependant dit espérer qu’il ne s’agisse pas que de mots. Pour le député, il s’agit par ailleurs d’assurer la solidarité dans l’UE, alors que les défis s’accumulent. "Il faut une solution européenne commune où tous les Etats membres assument leur responsabilité", a-t-il dit, plaidant pour que l’UE prenne effectivement davantage de responsabilités dans la politique migratoire.
Le député vert a par ailleurs cité plusieurs priorités importantes à ses yeux, à savoir la protection de la nature, celle du climat avec l’organisation de la COP21, ou encore la protection des données, rappelant pour ce dernier sujet le besoin impérieux d’une position commune de l’UE dans le contexte de l’annulation de la directive sur la rétention des données par la CJUE. "J’espère que la Présidence pourra faire avancer ce dossier", a-t-il dit. Pour ce qui est des accords commerciaux, Claude Adam a estimé que le mécanisme ISDS n’était pas acceptable en l’état, de même que le principe de coopération règlementaire. Il a néanmoins souligné, en écho à Jean Asselborn, qu’il valait mieux pour l’UE être autour de la table de négociation plutôt que d’en être écartée.
Enfin, le député a jugé que l’isolation de la Russie n’était pas une solution et qu’il s’agissait de se servir des canaux avec ce pays pour relancer le dialogue. "La Russie a enfreint le droit international, mais d’autres pays avec lesquels nous maintenons des relations aussi", a-t-il souligné, citant Israël en exemple.
Le député ADR Fernand Kartheiser a lui aussi évoqué une Europe différente, avec notamment un Parlement européen où siègent désormais plus d’eurosceptiques et un groupe, l’ECR, qui est depuis devenu le troisième le plus fort. Impossible donc pour le député souverainiste de passer au" business as usual". Il a qualifié les priorités de la Présidence présentées par Jean Asselborn de "programme préparé par la Commission", et le ministre de "facteur de la Commission", alors que pour lui, une Présidence du Conseil doit renforcer le Conseil où siègent les Etats membres dans un contexte où Commission et Parlement européen cherchent à réduire ses pouvoirs.
Fernand Kartheiser a cité en guise de preuve la visite du Parlement européen à Luxembourg le 1er juin 2015, tout comme le passage de la commission spéciale TAXE le 18 mai 2015. "Il ne faut pas se laisser mettre sous tutelle, mais garder les équilibres institutionnels", a-t-il lancé, estimant qu’une Présidence ne peut avoir de marge de manœuvre que s’il y a une volonté. Pour Fernand Kartheiser, c’est une "humiliation" qu’Antoine Deltour, le lanceur d’alerte français ait été honoré au Parlement européen alors qu’au Luxembourg, il est inculpé par la justice. Pour lui, la commission TAXE est ici allée trop loin. Et c’est ici que le Luxembourg aurait dû mettre des limites tout en coopérant selon les règles. Pour lui, si un nouveau traité devait sortir de la crainte d’un Brexit, il ne faudra en tout cas pas concéder de nouvelles compétences à un Parlement européen pour qui seulement 43 % des Européens et 24 % des Polonais ont voté, une légitimité selon lui faible comparée à celle de la Chambre des députés du Luxembourg.
Devant des rangs de plus en plus clairsemés, Fernand Kartheiser a comparé les priorités de la Présidence à une "liste d’achats", demandant où était la vision politique. Face à la question d’un Grexit, il a parlé de cynisme quand la Présidence invoque le triple A social. Reprenant le discours très critique de l’ADR face à l’approche de l’UE pour régler la crise grecque, il a contesté que l’on puisse "remplacer des réforme structurelles par une politique financière et monétaire". D’où pour lui la nécessité d’améliorer les traités sur des points comme les compétences de la BCE et sur ce qu’il faut faire en cas de crise comme la crise grecque. Il a plaidé pour une négociation avec le Royaume Uni, le Luxembourg n’ayant selon lui aucun intérêt à un "Brexit" qui laisserait l’UE sous la seule hégémonie de la France et de l’Allemagne, comme le montrent selon lui les négociations avec la Russie, où ces deux pays négocient à la place de la Haute Représentante, Federica Mogherini, censée être compétente en la matière. Selon Fernand Kartheiser, la Présidence devrait veiller à faire respecter cela. Finalement, le député a déposé une motion demandant à ce que le TTIP soit soumis à ratification auprès des parlements nationaux de l’UE.
Le député Serge Urbany, au nom du groupe déi Lénk, a pour sa part estimé que l’image négative dont est affublée l’UE relevait de la responsabilité principale des gouvernements des Etats membres, "incapables de définir une politique économique commune, et encore moins une politique sociale commune ou un budget européen".
Au contraire, la politique sociale a été largement mise sous pression, donnant une image "désastreuse" aux citoyens européens. Quant au triple A social, Serge Urbany a relevé qu’il ne s’agissait que "de belles paroles qui ne sont pas traduites dans la réalité", la thématique n’étant d’ailleurs détaillée ni par la Commission européenne, ni dans le programme de la Présidence, a-t-il pointé, notant l’absence de tout contenu concret.
Pour le député, la situation de la Grèce, conduite à "une catastrophe sociale" en raison des politiques d’austérité imposées à ce pays, est d’ailleurs emblématique de l’évolution de l’UE. Selon lui, un potentiel Grexit aurait un coût considérable pour l’ensemble de l’UE, "tout le monde ayant intérêt à trouver une solution". "Si on veut une solution à long terme pour l’euro, alors cela passera par une réforme vers des politiques davantage communes et solidaires", a-t-il indiqué.
De même, la politique migratoire nécessiterait une solution commune et solidaire, Serge Urbany pointant les réticences, dans de nombreux Etats membres, à la relocalisation de demandeurs d’asiles dans l’UE. "Cela montre qu’on va toujours plus vers une défense des intérêts nationaux. Or, nous avons besoin d’une véritable solidarité et la réponse de l’UE est trop tardive et ne s’attaque qu’aux symptômes du problème", a-t-il dit, notant qu’il s’agissait notamment d’offrir des perspectives dans les pays d’origine.
Enfin, le député déi Lénk a jugé que les accords commerciaux négociés par l’UE "vont trop loin". "Il est faux de dire que cela va aider les PME européennes à s’implanter aux USA, il s’agit en réalité de mettre des barrières à l’espace de décision politique". Dès lors, le député appelle à stopper net les négociations de ces accords.
En guise de conclusion, Jean Asselborn a rappelé un leitmotiv des priorités de la Présidence luxembourgeoise, à savoir la promotion de la dimension sociale de l’UE. Il s’agit selon lui de renforcer l’économie, de promouvoir l’investissement, et de créer de la plus-value qui ait des répercussions sur le plan social.
Pour ce qui est de la motion introduite par Fernand Kartheiser (ADR), Jean Asselborn a appelé la Chambre à faire preuve de "prudence". "Si la Commission dépasse ses compétences, il y aura un accord mixte sans que la Présidence ne doive insister pour cela", a souligné le ministre. "Avant de pouvoir prendre une décision à la Chambre, il faut vérifier quelle sera la substance du TTIP", a-t-il encore dit.
La motion a ainsi été renvoyée en commission des affaires étrangères et européennes de la Chambre des députés. A noter qu’au cours du débat, Serge Urbany (déi Lenk) a déclaré que le TTIP devait selon lui être soumis au référendum.