Les gouvernements belge et luxembourgeois se sont retrouvés à Bruxelles pour une réunion commune qui s’est tenue le 5 février 2015 sous la présidence conjointe des Premiers ministres Charles Michel et Xavier Bettel. Cette rencontre suit la tradition des rencontres entre les deux gouvernements entamée lors de la première réunion conjointe de la Gäichel du 28 avril 2004.
Une déclaration conjointe publiée à l’issue de la réunion évoque les nombreux sujets bilatéraux qui ont été traités, et notamment les questions transfrontalières, mais aussi un certain nombre de points qui sont directement liés à l’actualité politique européenne.
Cette rencontre fut l’occasion pour les deux gouvernements de rappeler "la valeur ajoutée" qu’apporte le Benelux dans une Europe élargie "en tant que laboratoire et stimulant de l’intégration européenne".
"Ensemble, les trois pays Benelux renforcent leur impact dans le processus décisionnel européen, de même qu’en interagissant avec d’autres regroupements", met en avant la déclaration qui évoque notamment la rencontre et la position commune des ministres des Affaires étrangères du Benelux et de leurs homologues balte la veille.
Les réunions en format Benelux se poursuivront dans le cadre de la préparation des réunions européennes, indique la déclaration. Il en sera de même pendant la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE, au second semestre 2015. Les gouvernements ont ainsi procédé à un échange de vues sur les principales questions qui seront abordées dans les prochaines réunions du Conseil européen et du Conseil de l’UE.
Les membres du Benelux participent au Forum Pentalatéral de l’Energie pour renforcer la coopération énergétique régionale et aller vers une intégration au niveau européen, rappelle la déclaration en soulignant que "le Benelux prépare ainsi le terrain d’un marché intérieur européen de l’énergie". Ce que font aussi la Belgique et le Luxembourg en se préparant à la mise en place d’un marché gazier intégré pour le 1er octobre 2015.
"L’actualité économique et géopolitique démontre l’importance d’agir ensemble face aux grands défis communs que sont l’approvisionnement en énergie fiable, suffisant et accessible financièrement, l’amélioration de l’interconnexion et la transition vers un système énergétique plus durable", notent les deux gouvernements dans leur déclaration.
Autre sujet important pointé par les deux gouvernements, et qui est crucial du point de vue luxembourgeois, le renforcement du marché intérieur sera le grand sujet d’un Sommet Benelux spécial en avril prochain.
En matière de justice, les deux gouvernements ont réaffirmé l’importance de la mise sur pied du Parquet européen pour lutter efficacement contre la fraude aux intérêts financiers de l’UE. Ils ont rappelé leur préoccupation quant à l’évolution des négociations au sein du Conseil et leur volonté de maintenir une forte intégration européenne quant à la structure et au fonctionnement du procureur européen afin d’en garantir l’efficacité.
La déclaration mentionne la volonté des deux gouvernements de coopérer de manière efficace et intensive, y compris au niveau européen, dans la lutte contre le terrorisme. Des concertations sont prévues dans le cadre des efforts législatifs en cours dans les deux pays pour ce qui concerne la définition des incriminations pénales de manière à appréhender les spécificités des menaces terroristes actuelles dans le respect des principes fondamentaux de droit pénal.
Un échange de vues a eu lieu à propos des difficultés des producteurs laitiers suite à l’abandon des quotas et à l’embargo russe. Les deux ministres de l’Agriculture plaident pour une analyse détaillée de la situation sur le marché du lait et dans ce contexte pour le développement qualitatif des informations reçues de l’observatoire Européen des prix. Ceci devrait permettre une meilleure réactivité des divers mécanismes de gestion de marchés mis à disposition par la législation européenne et soutenir le développement de nouveaux débouchés pour la production laitière européenne, notamment à l’exportation.
La Belgique et le Luxembourg se réjouissent de l’accord obtenu à Lima, qui permet en effet de continuer le processus menant à la Conférence de Paris. "Nous voulons contribuer activement à la négociation d’un “Protocole de Paris” juridiquement contraignant pour tous devant permettre d’atteindre l’objectif des 2°C et répartissant de façon juste et équitable les efforts et les conséquences", assurent les deux gouvernements. Le Luxembourg s’est engagé à mettre à profit sa présidence du Conseil de l’Union européenne durant le second semestre pour "contribuer à la réussite de la Conférence de Paris".
A l’occasion de cette réunion, le Luxembourg et la Belgique ont aussi convenu, à l’intérieur du cadre juridique actuel de l’échange d’informations sur demande, d’échanger des renseignements relatifs aux décisions anticipées (“rulings”) impliquant leurs contribuables respectifs et vraisemblablement pertinents pour l’autre Etat.
La déclaration mentionne à ce sujet le fait que le Luxembourg "regrette que la Belgique envisage de rendre l’obligation de déclaration spéciale des paiements (visée à l’article 307 CIR 92) applicable à l’égard du Luxembourg" au motif que celui-ci serait considéré par le Forum mondial de l’OCDE sur la transparence et l’échange d’informations comme n’ayant pas mis substantiellement et effectivement en œuvre le standard international "de transparence et d’échange de renseignements".
Le Luxembourg a pourtant pris toutes les mesures législatives et pratiques nécessaires afin de remédier aux différentes critiques formulées par le Forum mondial et d’améliorer sa notation actuelle, argue le gouvernement luxembourgeois en soulignant que le Peer Review Group du Forum Mondial a donné son accord pour le lancement d’une procédure d’examen supplémentaire qui a débuté le 16 janvier 2015 et se terminera par la publication d’un rapport d’évaluation supplémentaire avant la fin de l’année.
Pour cette raison et eu égard aux libertés fondamentales de l’Union européenne et au principe de non-discrimination consacré à l’article 24 de la Convention avec la Belgique, le Luxembourg demande à la Belgique de reconsidérer la mesure envisagée. Le Gouvernement belge examinera prochainement l’opportunité de cette mesure à la lumière des nouveaux développements et informera le Luxembourg des suites y réservées.
En matière d’aviation, les deux gouvernements entendent atteindre un objectif d’intégration de la prestation de services et de l’espace aérien dans le Benelux, comme un tremplin vers la réalisation du FABEC et du Ciel Unique européen. Ils donnent dès lors un mandat conjoint aux deux entités concernées, Belgocontrol et ANA Lux, pour finaliser une étude de faisabilité et une étude coûts-bénéfices afin de permettre aux gouvernements belge et luxembourgeois de prendre une décision de principe quant à la réalisation de la synergie envisagée avant la fin de l’année 2015.
En matière de transports ferroviaires, les ministres ont évoqué le projet de modernisation de l’axe Bruxelles-Luxembourg d’Infrabel démarré en 2007 afin de renouveler entièrement les composantes techniques de l'infrastructure ferroviaire des lignes 161 (Bruxelles – Namur) et 162 (Namur – Luxembourg (Sterpenich)) à partir d’Ottignies avec pour objectif d'augmenter la vitesse de référence de la ligne à 160 km/h. Ce projet fait partie des 30 projets prioritaires identifiés par la Commission européenne dans ses lignes directrices pour le développement du réseau transeuropéen de transport (RTE-T). Pour cette raison, ce projet bénéficie, au niveau belge, depuis 2007 d’un cofinancement européen qui se poursuivra jusqu’en 2015.
Dans ce contexte, les deux pays prennent acte de l’état d’avancement du dossier relatif à l’axe Bruxelles-Luxembourg tant pour les aspects relatifs à l’infrastructure que pour ceux relatifs au matériel roulant. Les deux parties se félicitent de la signature, par les deux ministres en charge du transport ferroviaire, d’une lettre de soutien aux demandes de subside pour le projet dans le cadre du Call for Proposals 2014 du programme CEF Transport.
Les ministres François Bausch et Jacqueline Galant ont annoncé dans la foulée de la rencontre avoir saisi conjointement la Commission au sujet du dossier ERTMS. Le déploiement du système européen de surveillance du trafic ferroviaire (en anglais, European Rail Traffic Management System, ERTMS) est d’une importance capitale en matière de mobilité en Europe, assurent-ils en effet dans un communiqué de presse distinct. Les deux ministres déplorent que la Commission ne veuille maintenant plus cofinancer l’équipement de certains matériels roulants de la SNCB et des CFL. Pour les CFL il s’agit d’une mise à jour logicielle du système de sécurité européen pour 22 automotrices du type 2000 et 3 locomotives du type 3000, précise le communiqué.